(ecriture d'un roman d'heroic-fantasy) Les Larmes du Spectre

Les Larmes du Spectre (ecriture d'un roman d'heroic-fantasy) - Arts & Lecture - Discussions

Marsh Posté le 23-06-2004 à 13:42:42    

Depuis quelques semaines je m'essaye à l'écriture d'un roman. Soucieux de savoir ce que penseraient d'éventuels lecteur, j'ai cherché sur google une communauté où des gens postaient leurs écrits et google m'a conduit ici  
 
Si ces écrits vous ont inspirés une réaction ( bonne ou mauvaise ), prenez le temps svp de répondre afin que je sache...l'incertitude est la pire des peur quand j'écris.
 
 
Pour les nouveaux venus, vous trouverez ci dessous une réorganisation avec les liens direct vers les chapitres adéquats , dans l'ordre ou il faut les lire, et en zappant les chapitres 'éliminés' .
 
En espérant que cette réorganisation amenera de nouveaux lecteurs :)
 
 

La fille du nécromant

 
Prologue , Chap 1, 2 et 3 http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t4244771
 
Chap 4 http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t4386788
 
Chap 5 http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t4716087
 
Chap 6 http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t5020892
 
Chap 7 http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t5930852
 
Chap 8 http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t6377493
 
Chap 9 http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t7109739
 
Les larmes du spectre
 
Prologue http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t3050244
 
Chap 1   http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t3058111
 
Chap 2  http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t3144406
 
Chap 3  http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t3224615
 
Chap 4  
http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t3467285
 
Chap 5  
http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t3632509
 
Chap 6  
http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t3656574
 
Chap 7
http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t3694080
 
Chap 8
http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t3847190
 
 
Nouvelle : Tombé des cieux
 
http://forum.hardware.fr/hardwaref [...] m#t5901841


Message édité par deidril le 30-11-2005 à 14:33:51
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Marsh Posté le 23-06-2004 à 13:42:42   

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Marsh Posté le 24-06-2004 à 13:26:04    

;) Je met un drapal. Je te dirais ce que j'en pense ce soir ou cette nuit.  :hello:

Reply

Marsh Posté le 24-06-2004 à 17:35:25    


  avant de lire, c'est de l'héroique-fantasy ?


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écrire, y'a que ça de vrai !
Reply

Marsh Posté le 24-06-2004 à 18:25:01    

Voila donc le prologue des Larmes du Spectre :
 
   Un cri strident déchira l’air. Il résonna dans la plaine rocailleuse et gagna la cité. Ceux qui l’entendirent ne purent l’ignorer car la voix inhumaine s’insinuaient dans leur esprit, les rendant sourds à toutes les autres choses. Dans les rues, les gens tombaient à genoux en se tenant la tête, saignant du nez et des oreilles. D’autres gisaient inanimés, l’esprit brisé à tout jamais par les hurlements déments qui avaient ravagé leur raison. Les animaux devenaient fous. Des chevaux conduisant un carrosse se jetèrent contre une échoppe d’argenterie, brisant la devanture en pierre sous leur charge. La voiture fit une embardée, se renversant dans l’avenue et écrasant plusieurs passants sous les têtes à queues.  Sombreden tout entière était la proie du chaos.
 
   Un nouveau cri percuta la ville. Les fenêtres volèrent en éclats et les jarres se fendirent, libérant leur contenu liquide. Sur certains bâtiments les moins solides apparurent des lézardes.  Une femme sortit de sa maison en hurlant, pleurant des larmes de sang et se griffant le visage si profondément qu’elle se défigurait sans doute à vie. Construit à quatre lieues des habitations dans une lande aride et désertée de toute vie, le mausolée d’où venaient les hurlements était désormais l’objet de toutes les attentions. Sur les remparts de Sombreden, les sentinelles se cramponnaient aux créneaux pour supporter la douleur. L’un des gardes se jeta dans le vide pour stopper la folie qui lui dévorait l’esprit.  
 
   Un petit groupe de cavaliers montant de sombres palefrois franchit les murs de la cité sitôt la grande herse levée. Chevauchant au galop ils s’élancèrent vers la construction alors qu’un nouveau gémissement emplit l’air, ravageant la cité d’une nouvelle vague de chaos.
Un sorcier en faction sur les remparts épongea la sueur froide qui coulait de son front tandis qu’il observait les cavaliers arriver à destination. Habitué à la douce musique des sortilèges de démences et aux plaintes des âmes tourmentées, le sorcier savait que cette voix là ne venait pas de la gorge d’une créature vivante. Ni même d’une créature morte. Les mots que contenaient les hurlements n’appartenaient à aucune langue connue. En fait, il n’avait pas la moindre idée de ce qui se passait. Si son esprit gardait encore son intégrité, c’était uniquement grâce à ses sortilèges protecteurs, mais il les sentait s’effilocher à chaque nouvel assaut. Si cela ne s’arrêtait pas bientôt lui aussi sombrerait dans la folie. La cité de Sombreden avait beau être l’incarnation de la perfidie, de l’ignominie et de ce qu’il y avait de plus noire comme magie, ce qui se passait était fortement inhabituel et tous les esprits qui pouvaient encore penser se demandaient quel cataclysme s’abattaient ainsi sur eux.
 
   Les cavaliers mirent pieds à terre. Ils portaient de grands manteaux noirs à capuchon et leur visage restait dans l’ombre mais leurs mains gantées de métal trahissaient leur équipement militaire. La lande autour d’eux était déserte. Une poignée de gros rochers noirs brisaient l’horizon, s’élevant de la mer de scories volcaniques et de charbons ardents qu’était la Terre des Cendres. Devant eux, le mausolée était plongé dans l’obscurité. Quatre colonnes gigantesques supportaient une unique dalle de pierre de quarante mètres de coté. De grands boucliers blasonnés qui avaient appartenu à des armées disparues à l’aube de ce temps faisaient office de murs. Au centre, un escalier titanesque descendait dans les entrailles de la terre. Au-dessus de la lande, le ciel était noir de nuages colériques. Au lointain, un éclair fendit le ciel. Une pluie de cendre chaude commença à tomber sur la lande et la ville alors que les silhouettes avancèrent vers la construction.  
 
   Une fois devant l’escalier, ils scrutèrent les profondeurs qui s’ouvraient à eux. Large de trente mètres, l’escalier de marbre noir était assez majestueux pour laisser entrer une foule entière. Les décorations étaient à l’image de la maléfique cité. Sur les murs descendants, de vieilles fresques sculptées et peintes relataient des batailles d’une barbarie et d’une infamie sans limites. D’antiques bannières arrachées aux vaincus pendaient d’un plafond situé quelque trente mètres plus haut. D’abord un lion d’or à deux têtes sur fond de saphir, puis venait un loup noir sur fond de sable. Les oriflammes se succédaient les uns au autres, déchirés et tachés de sang comme autant de témoignages de pays ravagés. D’autres trophées beaucoup plus morbides délimitait une allée centrale dans l’escalier. De vieux trônes arrachés à des royaumes brisés soutenaient encore leur souverain, pauvre pantin squelettique encore habillé de ses atours royaux. Chacun des cadavres conservait sa propre tête tranchée sur ses genoux, leur précieuse couronne encore ceinte sur le front. Les soumissions des territoires conquis, écrites en lettres de sang sur de la peau humaine, étaient présentés tel des tableaux précieux dans ce macabre musée. Des séries de têtes bouillies et blanchies par des substances alchimiques de conservation complétaient l’immonde collection.
 
   Un autre cri monta des profondeurs du mausolée, tirant le petit groupe de l’expectative des décorations. Glissant sur les visiteurs, le bruit explosa dans la lande, secouant Sombreden dans ses fondations. Malgré l’obscurité complète, la douzaine de silhouettes avança de nouveau dans l’escalier sans l’ombre d’un doute, faisant résonner sur les marches de marbre le bruit de leurs chausses métalliques.  
 
   Quelque mille marches plus bas, les visiteurs débouchèrent dans un vaste hall. Plus large que les avenues de Sombreden, celui-ci se terminait au loin sur une massive double porte en fer noir. Sur chaque battant, huit glyphes magiques irradiaient une lumière rouge sang qui nimbait les portes d’une aura menaçante. Tel des oiseaux médusés par un serpent, vingt gardes fixaient la porte. Chacun d’entre eux portait autour de leur armure de plaque noire une épaisse cape pourpre bordée de fourrure maintenue sur leurs épaules par des broches d’argent finement ouvragées. La plupart avaient leurs armes à la main, des épées d’acier pourvues d’une garde d’ivoire et sur chaque lame se trouvait gravé le même écusson. Bien que d’apparence humaine, les soldats avaient la peau d’une blancheur cadavérique et leurs veines ressortaient violacées sur leurs tempes et sur leurs puissants muscles. Alors que les visiteurs arrivèrent devant yeux, les soldats se retournèrent et leurs yeux rouges brillèrent dans l’obscurité.  
 
   Le premier des visiteurs se découvrit en son capuchon : une femme de grande taille à la silhouette élancée, au teint de peau violet pâle, aux longs cheveux noir et d’une beauté surnaturelle. Une armure de plaque noire de même facture que celle des soldats protégeait son buste,  ses épaules et ses jambes mais laissait son ventre nu. Ses yeux d’un rouge flamboyant semblèrent répondre à ceux des gardes, brillant un court instant d’un éclat rubis flamboyant. Les soldats mirent un genou à terre et baissèrent la tête pour indiquer leur soumission. Elle passa au milieu d’eux comme une ombre, suivit par ses compagnons qui se découvrirent également, révélant leur appartenance à la même engeance. Elle s’arrêta devant l’un des soldats. Plus grand que ses compatriotes, l’homme tenait sous son bras un heaume pourvu d’un cimier rouge et or. La femme le questionna sans daigner baisser les yeux vers lui.  
 
   « Quand cela a-t-il commencé ?
   - Depuis environ une heure Votre Altesse. J’ai envoyé un messager vous avertir aussitôt que cela a commencé.
   - Postez vos hommes à l’entrée du mausolée et assurez-vous que personne ne vienne troubler mon inspection.  
   - Sur ma vie ! » répondit le capitaine, en plaçant sa lame levée devant lui selon un salut traditionnel.
   « En effet capitaine, sur votre vie… ».  Bien que prononçant des menaces, la princesse Satrina parlait comme toujours d’une voix suave et charmeuse. Chaque mot, chaque phrase exprimait la sensualité hypnotique qu’elle dégageait. Le capitaine, bien que soldat d’élite, fut immédiatement captivé par les paroles de sa souveraine. Retrouvant ses esprits alors que celle-ci s’éloignait, il se redressa et ordonna à son bataillon de le suivre vers l’escalier.
 
   La princesse s’avança vers la double porte d’où venaient maintenant des gémissements ponctués de mots incompréhensibles. Elle retira ses gantelets de métal. Avec l’un de ses longs ongles noirs, elle se fit une sanglante strie dans la main gauche d’où perla un sang violet, et la plaqua contre la porte droite exactement à l’emplacement de l’une des glyphes lumineux. Celle-ci s’éteignit. Elle répéta l’opération pour chacun des symboles magiques protégeant la porte, puis elle se retourna vers ses compagnons.
 
   « Restez ici. »
 
   Se mettant en garde à vous, ils se tournèrent vers l’entrée et dégainèrent leurs épées pour former un barrage. Pendant ce temps, Satrina poussa les portes qui s’entrouvrirent sans effort devant elle. Elle se glissa alors à l’intérieur. Les battants se refermèrent derrière elle et les glyphes réapparurent, aussi flamboyantes et menaçantes qu’un instant plus tôt.
 
   La pièce était plongée dans les ténèbres mais l’obscurité était pour les yeux rougeoyants de la princesse comme la lumière pour le commun des mortels. Le sol était recouvert d’une couche de poussière véritablement millénaire. Au centre de la pièce reposait deux sarcophages d’un métal noir entourés de trésors dorés. Devant celui de gauche reposait une armure de plaque et de maille noire et or sur un parterre de crânes. Une épée de grande taille était plantée dans le sol, juste devant la tombe. Des stries violettes à l’image des veines violacées de Satrina parcouraient la lame. Une gemme grosse comme un poing d’enfant était enchâssée dans le pommeau. La gemme s’illumina subitement d’une aura chatoyante allant du rouge à  l’or. Des lueurs fantasmagoriques se reflétèrent sur les murs, se mouvant telles des flammes. Tout aussi subitement que cela avait commencé, l’intensité lumineuse de la gemme diminua, ne projetant plus qu’une faible aura rougeoyante dans l’obscurité.
 
   Apaisée que l’arme l’ai reconnue, la princesse tourna son regard vers l’autre sarcophage. Devant celui-ci étaient déposés soigneusement pliés des vêtements féminins de fils d’argent et d’or plus fin que des cheveux, ainsi qu’une tiare de platine ornée de saphirs noirs. Satrina s’approcha du sarcophage car de celui-ci venaient les bruits. Elle enleva complètement son manteau et le jeta sur le deuxième sarcophage, puis son armure qu’elle fit glisser à terre et finalement ses vêtements de satin noir. Une fois nue, elle s’allongea sur la tombe. Les gémissements se turent, comme si celle qui les poussait avait pris conscience d’une présence. Complètement allongé sur le ventre, Satrina susurra alors lentement des mots à l’intention de l’occupant du sarcophage.
 
   « Mère, j’entends votre appel. Confiez-moi la source de vos angoisses. »
 
   La voix souffla des mots dans une langue secrète. Les yeux de Satrina s’écarquillèrent de surprise lorsqu’elle en compris le sens. Elle se cramponna des deux mains au couvercle du sarcophage, écoutant avec stupeur les révélations qui lui était confiée. Durant de longues heures, Satrina écoutait et répétait chaque mot afin de les graver dans sa mémoire.
 
   Lorsque la voix se tue, le silence revint dans le mausolée. Satrina se releva et remis ses vêtements et son armure, puis quitta le mausolée très troublée, tandis que la lueur émanant de l’épée s’éteignait complètement. En franchissant la double porte, elle fut surprise par l’éclat lumineux de multiples torches et lanternes. Sa garde personnelle faisait front contre une petite troupe d’une centaine d’individus qu’elle identifia comme des humains. Les soldats arborant sur le plastron de leur armure un blason représentant des flammes noires consumant les cieux et le soleil, symbole qu’elle identifia comme étant celui du Feu Obscur. Leurs armes grossières à la main, les soldats se tenaient prêt à bondir sur elle et ses gardes. Peu intimidée malgré leur nombre, Satrina éclata de rire devant la haine évidente qu’ils portaient à son égard mais également la terreur qu’elle leur inspirait. Les gardes de Satrina suivirent d’un rire énorme qui résonna dans le hall.
 
   « Je ne me souviens pas avoir commandé mon repas », déclara la princesse à l’attention de la horde qui se massaient devant elle. « Mais puisque vous êtes venu à moi… », continua-t-elle en souriant, révélant deux canines proéminentes.
 
   « Faite place ! » scanda alors une voix. Les soldats s’écartèrent tandis que s’avançait une femme portant une armure de plate et de maille d’acier noir. Tenant son heaume sous le bras, elle avança fièrement dans l’allée formée par les soldats s’écartant sur son passage, puis elle se campa devant les gardes de Satrina, fixant directement la princesse dans les yeux.
 
   « Dame Yliane ! C’est une visite impromptue que voici. Je vous remercie de vos mets mais j’en disposerais plus tard. Veuillez les faire sortir de cet endroit avant que leur odeur pestilentielle n’imprègne les pierres de ce mausolée sacré. Une fois lavés et débarrassés de leur crasse humaine, j’en disposerais à ma guise. » lança Satrina à l’intention de la nouvelle venue. Plus grande qu’Yliane, elle la dévisagea d’un air hautain et méprisant. Yliane était à l’image de ses soldats. Humaine, de corpulence très athlétique, elle incarnait un idéal guerrier tout à l’inverse de la grâce et de l’élégance que la princesse représentait. Elle avait natté ses longs cheveux blonds en une unique tresse qui descendait dans son dos. Des petites mèches bouclées encadraient son visage. Ses yeux vert émeraude brûlait d’une haine évidente à l’intention de Satrina.
 
   « Qu’est ce que votre mère vous a confié ?
   - Voyons dame Yliane, vous savez sûrement que les liens qui unissent une mère et sa fille sont d’ordres privés, et vous plus que tout autre vous comprenez cela n’est ce pas ? »
 
   Les mots prirent Yliane au dépourvue. Comprenant l’insulte dissimulée dans la phrase, elle devint rouge de colère. Elle dégaine son épée, une rapière d’un métal argenté d’une facture exquise. Aussitôt sortie, des étincelles sombres parcourent l’arme, électrisant l’atmosphère. Des crépitements de Feu Obscur entourèrent Yliane. Ses soldats tout comme ceux de Satrina reculèrent immédiatement d’un pas en fixant les décharges d’énergie noire.  
 
   C’est alors qu’une voix mit fin à la dispute : « Range donc çà, sombre idiote ! »
 
   Une vielle femme s’avançait parmi les soldats. Ceux-ci tombèrent à  
genoux devant elle, faisant preuve d’une déférence et d’un respect qu’envia Yliane. S’avançant lentement, la silhouette courbée s’aidait d’un bâton métallique dont elle frappait le sol à chaque pas. Elle était vêtue d’une robe violette et noire d’une austérité toute religieuse et un manteau de fourrure d’hermine blanche était posé sur ses épaules. Son visage n’etait plus qu’un ramassis de rides. Sa peau était décolorée et pendait sous le cou et sur le coté des joues. Son crâne était presque dégarni et il ne restait que de minces filets de cheveux blancs ébouriffés. Marchant lentement le bâton dans la main droite, un jeune page au visage chérubin portant la livrée des serviteurs du Feu Obscur la soutenait par le bras gauche.
 
   Elle s’avança ainsi jusqu'à Yliane
 
   « Je t’ai dis de ranger ton arme » ordonna-t-elle, fixant de ses yeux noirs ceux d’Yliane. Celle-ci s’exécuta en contenant sa rage. Aussitôt fait, la vieille femme l’écarta avec le bout de son bâton et s’avança vers Satrina. La princesse salua la vieille femme d’un hochement de tête respectueux et prudent, mais sans jamais la quitter des yeux.
 
   « Matriarche Alveera, c’est toujours un honneur de vous rencontrer…
   - Trêve de politesse, princesse. Vous savez fort bien la raison de ma présence ici alors épargnons-nous les modalités d’usages et venons en au fait.
   - Si vous parlez de l’agitation provoquée par ma mère, c’est sans grand intérêt. Un mauvais rêve a troublé son éternel sommeil et je suis venu apaiser son esprit tourmenté. Nous avons simplement échangé quelques mots de mère à fille et le calme est revenu.
   - Un mauvais rêve dites-vous ? La dernière fois que votre prophétesse de mère s’est trouvée prise d’une telle ‘agitation’, pour employer vos termes, nos armées victorieuses furent balayées et renvoyées au néant, nos pères respectifs plongés dans un sommeil sans rêve et notre sombre Seigneur exilé de nouveau dans les plans extérieurs. Sans parler de nos propres personnes, diminuées sans nos pouvoirs car sans lien direct avec notre noir Seigneur…Aussi pardonnerez vous ma curiosité de vouloir m’insinuer dans cette discussion  de mère à fille ! »
 
   Disant ceci, la matriarche Alveera dardait la princesse d’un regard pénétrant. Impassible, celle-ci arborait un sourire à la fois courtois et narguant. De sa voix rauque brisée par le temps, la matriarche continua son exposé des faits.
 
   « J’ai convoqué les représentants des Douze Légions pour une assemblée extraordinaire, laquelle se tiendra à la Tour Noire lors de la prochaine nuit. Ceux qui n’étaient pas présent aujourd’hui à Sombreden sont désormais au courant de l’événement. Nul doute que nos pairs seront aussi curieux que moi d’entendre les révélations qui vous ont été confiées. Evidemment, en tant qu’héritière de la Légion du Sang, il vous appartient d’y représenter votre père. »
 
   La vieille femme se fendit d’un sourire machiavélique, révélant ses dents jaunies.  
 
   « Je me ferais bien évidemment une joie d’entretenir les Douze de ce qu’il m’a été confié » répondit la princesse d’une voix suintante d’hypocrisie.  
 
   « De cela je ne doute pas » repris Alveera en employant a dessein le même ton. Elle lui tourna alors le dos et s’en fut par le chemin qui menait à l’escalier, toujours soutenu par le jeune garçon qui n’avait dit mot durant toute la conversation. Yliane lança un dernier défi avant de partir.
 
   « Garce vampire, la partie n’est pas finie ! » Elle tourna le dos à Satrina qui fit mine de n’avoir rien entendu pour se retrouver face à face avec sa cousine Jaeryne, la seule personne qu’elle détestait plus que la princesse des vampires. Sa cousine incarnait en effet tout ce qu’elle n’était pas. Elle avait une douce et magnifique peau bleu marine, héritage paternel d’une race d’immortels, une allure majestueuse et un charisme sensuel. Particulièrement douée en magie comme aux armes, elle possédait tous les talents. Elle portait pour l’occasion une robe de soie rouge sombre très décolletée brodée de fils d’argent dessinant des symboles mystiques.  
 
   Jaeryne pouffa d’un petit éclat de rire afin de rappeler à sa cousine qu’elle avait été ridiculisée un instant plus tôt par la matriarche, puis elle s’en alla entourer de ses courtisans. Yliane la regarda partir, la main pressant la poignée de sa rapière, luttant pour ne pas se jeter sur elle et l’embrocher. Jaeryne était tout comme elle héritière des pouvoirs du Feu Obscur et puisqu’elle était dotée d’une espérance de vie incroyablement longue, le temps jouait en sa faveur. Si Yliane était l’héritière en titre, elle savait pertinemment que cela ne durerait qu’un temps. Alors qu’elle vieillirait, sa cousine grandirait en pouvoirs magiques, jusqu’au jour où elle l’écraserait pour prendre sa place. Yliane savait que personne ne serait surpris le jour où on la retrouverait assassinée, car la plupart des autres maisons nobles considéraient Jaeryne comme celle qui aurait du être choisie. Une fois sa cousine hors de sa vue, elle s’en alla à son tour.
 
   Prétextant une lanière défaite, elle s’agenouilla à mi-chemin de l’escalier pour refaire un lacet et susurra aux ombres. « Espionne la vampire et trouve ce qu’il lui a été révélé avant la réunion du conseil. », puis elle repartit avec ses soldats, laissant le hall à Satrina et à sa garde.
 
   Lorsque le dernier des soldats d’Yliane fut partit, Satrina remarqua les corps de la garnison du mausolée dans l’escalier ainsi que les cadavres d’un grand nombre de soldats d’Yliane. Des torches encore allumées jonchaient l’escalier, projetant des ombres tremblantes sur les fresques impitoyables des murs. Satrina aperçu le cadavre de son capitaine. La tête tranchée avait roulé tout en bas des marches et le cou était brûlé sur le pourtour. La chair était noircie, rongée par la pourriture, et celle-ci se répandait à vue d’œil sur le corps. Satrina reconnut les blessures caractéristiques qu’infligeaient l’arme d’Yliane.  
 
   « Disposez des corps en les saisissant par les armures,  ne touchez pas la chair si elle est noircie. Nettoyez-moi le reste, le tombeau de mon père ne doit pas être souillé par du sang corrompu. » ordonna-t-elle avant de partir a son tour. Des plans se bousculaient dans son esprit et elle devait faire vite afin de prendre un pas d’avance sur les autres rois et princes ténébreux. Elle commença l’ascension de l’escalier, prenant soin d’éviter les corps dont les chairs étaient dévorées par le Feu Obscur d’Yliane. Elle ne remarqua pas que son ombre semblait se mouvoir d’une volonté propre.
 
   Au même moment, à des milliers et des milliers de lieues au nord, le prince Thorvan félicitait son épouse d’un chaste baiser sur le front. Celle-ci, épuisée, était allongée dans un grand lit à baldaquin aux draps trempés de sang. Ses cheveux argentés s’étiolaient autour d’elle trempés de sa sueur et ses yeux étaient cernés d’une fatigue qui enlaidissaient son visage nacré, mais elle n’avait de regard que pour les deux nouveau-nés jumeaux qui dormaient maintenant de leur tout premier sommeil dans ses bras. L’heureuse maman aurait hurlé de savoir qu’une princesse vampire connaissait déjà les noms de ses enfants alors qu’elle-même ne les avait pas encore choisis.
 
Voilà, j'espere que ce prologue plaira à quelque lecteurs, j'attend les réactions :) ( prend son bouclier )
 
Edit : corrections des fautes d'orthographes & tournures trop alambiquées.
 


Message édité par deidril le 30-11-2005 à 14:14:00
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Marsh Posté le 24-06-2004 à 20:16:21    


  Voili voilou !  :p  
 
  J'ai donc lu ton bouk  :hello:  
  Je n'ai qu'un mot à la bouche : MAGNFIQUE  :love:  :love:  :love:  
  J'adore  :bounce:  :bounce:  
 
  Franchement, le style est excellent, et l'histoire interressante  :jap:  :jap:  :jap:  
  Je n'ai rien à redire !
 
  Voilà, alors j'aimerai beaucoup que tu postes la suite  :D  :D  
 
  Et en tout cas bravo
 
  [:roi]


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écrire, y'a que ça de vrai !
Reply

Marsh Posté le 24-06-2004 à 20:25:01    

Jlis ca apres metre rempli le ventre et je te donne mes impressions

Reply

Marsh Posté le 24-06-2004 à 21:00:17    

Bon alors je vais pas juger l'histoire car c'est un peu trop court pour vraiment ce faire une idée. Donc je vais parler du texte lui meme.
Alors deja fais gaffe rien que dans ces quelques pages y'a un nombres de fautes d'orthographes (d'accords surtout) assez impressionnant, mais ca c'est pas tres grave c'est vrai.
Ensuite je trouve le style trop lourd par moment, surtout au debut du texte car j'ai limpression que ca sarrange sur la fin (ou je metais habitué je sais pas je relirais). Mais certaines tournures de phrase rendent la lecture de quelques passages moins fluide...
Des petits exemples :  

Ni d'une créature morte non plus

(moi j'aurais dit : "Ni meme d'une creature morte" mais c'est personnel hein!)

... et de charbons ardans et pour cause car...

(le et pour cause car j'aime pas, mais pas du tout...)

Et ainsi de suite se succedaient..

(c'est peut etre fait expres mais pareil jaccroche pas se genre de repetition...)
 
 
Tout ca ce n'est que mon avis personnel, mais tu as demandé des reactions alors je dis ce que je pense vraiment. En esperant que ca t'aide, et si les autres ne sont pas daccord avec moi dites le il se peut que ca soit juste un style pas fait pour moi!

Reply

Marsh Posté le 24-06-2004 à 21:25:03    


  C'est vrai quand le revoyant, le "et pour cause", c'est trop lourd.
  Sinon tes decriptions sont très biens


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écrire, y'a que ça de vrai !
Reply

Marsh Posté le 25-06-2004 à 09:28:27    

Maintenant que vous m'en parlez, je trouve certaines tournures mal adaptés. J'ai apporté le chapitre 1 et les corrections du prologue. Je posterais ca pendant ma pause dejeuner :)

Reply

Marsh Posté le 25-06-2004 à 13:04:14    

J'ai corrigé les fautes d'orthto et de grammaire du prologue et j'ai modifié les tournures de phrases qui vous choquaient.  
 
"Une poignée de gros rochers noirs brisaient l’horizon, s’élevant de la mer de scories volcaniques et de charbons ardents qu’était la Terre des Cendres. "
 
et  
 
"Les oriflammes se succédaient les uns au autres, déchirés et tachés de sang comme autant de témoignages de pays ravagés."


Message édité par deidril le 25-06-2004 à 14:05:02
Reply

Marsh Posté le 25-06-2004 à 13:04:14   

Reply

Marsh Posté le 25-06-2004 à 13:14:15    

Voilà maintenant le chapitre un, et l'entrée en scène du premier personnage mâle (  ;) ):
 
            Chapitre 1
 
           La Fraternité de l’Acier
 
   C’était un matin d’automne de l’année 972. La neige avait profité du couvert de l’obscurité pour descendre des montagnes et envelopper la vallée et les contreforts d’un blanc linceul. Le vent avait soufflé en bourrasque toute la nuit et jusque tôt dans la matinée. Seul le soleil perçant au-delà des monts à l’est, avait calmé son ardeur et arrêté la furie des éléments. La petite ville de Fortavent s’était donc réveillé sous quatre pouces de neiges. Pour bon nombre des habitants, cette première chute, plus ou moins prévisible car ni trop tard et ni trop tôt dans l’année, était annonciatrice du rude hiver qui venait chaque année blanchir la terre en contrebas des Monts de la Muraille. Pour presque tout le village, c’était le signe annonçant que l’hiver viendrait bientôt assiéger le village et le couper du reste du monde. Pour trois enfants insouciants, c’était la première des batailles de boules de neige qui constituaient annuellement l’un des divertissements les plus prisés localement.
 
   La boule de neige éclata littéralement contre la joue de Hagen. Le choc, comme une gifle, le sonna un instant. Juste un instant fut cependant suffisant pour que Freya, chargeant par derrière, le renversa face dans la neige. Voyant sa victime au sol, Alderick, lança la seconde boule qu’il avait préparé dans sa main gauche et celle-ci toucha Hagen au visage, l’aveuglant de neige. Il s’élança ensuite pour rejoindre sa jumelle dans la lutte au corps à corps qui commençait. Mais avant même qu’il arrive, Hagen eut vite fait d’envoyer la frêle fillette au sol pour ensuite le réceptionner et finalement lui faire déguster la toute fraîche cuvée annuelle.  
 
   Crachant quelques restes de son repas forcé, Aldérick, assis dans la neige, considéra son frère sous un angle nouveau. Certes il avait grandi cette année mais cette force qu’il venait d’afficher était nouvelle. Jusqu’à récemment les efforts combinés des jumeaux avaient presque toujours porté leurs fruits.  Hagen le dépassait maintenant de presque deux têtes malgré seulement deux années d’écart. Sa stature se durcissait de semaine en semaine et il était maintenant presque aussi grand et aussi fort que Valdrek, le robuste fils du forgeron. C’est à dire qu’Aldérick considérait qu’au-delà d’un certain âge, on devenait beaucoup moins digne de faire partit de son échelle des valeurs, et jusqu’à aujourd’hui, Valdrek avait représenté le sommet de cette échelle.  
 
   Hagen avait grandi en taille et en force, cela était indéniable, mais il avait fallu ce cuisant échec pour qu’il l’admette. Pourtant, malgré qu’ils fussent frères de sang, ils étaient comme le jour et la nuit. Hagen avait hérité de la stature impressionnante de leur grand-père, et des longs cheveux noirs soyeux de leur père. Un cerclet d’argent, symbole de son rang d’héritier de la modeste principauté de Fortavent, ceignait son front et retenait une chevelure tombante jusqu’aux épaules. Son visage commençait à devenir carré et rude, comme celui du grand- père et des gens de la montagne. La dure vie de la contrée avait formé ses petites épaules et son buste. Un port altier, des yeux bleus perçant, et une voix forte en surplus de ses qualités physiques avaient permis à Hagen de s’imposer naturellement comme le futur héritier.  
 
   A l’opposé, Aldérick et sa sœur Freya avaient hérité de la fine stature de leur mère. Elle leur avait transmis ses cheveux fins et argentés, symbole d’une ancienne maisonnée noble et respectée dans le monde du dehors. Pour l’instant ils étaient presque indissociables par le même fin visage, les mêmes yeux verts et leur peau laiteuse. Leur petit nez retroussé et leurs sourires permanents faisaient des jumeaux les mascottes de tous les parents, envieux du couple de chérubins.  
 
   Freya se releva de la congère dans laquelle Hagen l’avait poussée et tenta de faire sortir la neige de l’une de ses oreilles avec une moue qui en disait long sur son inconfort. Hagen, avec le sourire du vainqueur, donna un coup de pied dans la neige afin d’envoyer une dernière giclée au vaincu, avant de lui tendre une main magnanime. Aldérick considéra la main tendue de son frère pendant un instant. Trop orgueilleux pour l’accepter, il se releva tout seul. C’est à cet instant que la vieille Elga, leur nourrice et également la cuisinière du château, apparue en haut de la colline en vociférant à propos de leurs habits trempés, des maux qu’ils allaient attraper et les somma de rentrer. Les trois jeunes enfants prirent alors conscience que la neige tombait doucement de nouveau sur la vallée.
 
   Le domaine de Fortavent se situe sur la bordure sud des Ereygirs, une chaîne de montagne coupant le Saint Empire d’est en ouest. Aucune route ni sentier ne parvint jamais à traverser les hauts cols enneigés et les Pics du Tonnerre, les trois grands sommets situés au centre, demeurent terres inexplorées. C’est pourquoi la plupart des échanges entre le nord et le sud de l’empire sont maritimes car les routes le long des contreforts des Ereygirs demeurent hasardeuses. En effet, le temps fort capricieux peut très bien ensevelir le voyageur et sa suite dans un de ces formidables blizzards qui surviennent en un instant.
 
   Sur plus de trois milles lieues d’est en ouest et cinq cents du nord au sud s’étendent les cimes des Ereygirs. De vastes forêts de conifères recouvrent les flancs abrupts et remplissent les vallées et les combes. Des champs de neiges inviolés tant par l’homme que par l’animal surplombent des précipices insondables et des mers de rocs et de pierres. C’est dans la partie sud ouest de l’Empire, dans une des vallées au pied de montagnes particulièrement escarpées que se trouve Fortavent.
 
   La petite ville est située le long du lac des Hauts Vents, ainsi nommé à cause des sifflements que provoquent les courants d’airs descendant des sommets. Construit sur un petit plateau dominant le lac, le modeste château de Fortavent vers lequel se dirigeaient maintenant les trois enfants, faisait face à la bourgade et à la vallée. Vieilles de six siècles et rongées par les vents, les pierres de la demeure semblaient brisées et effritées, donnant un petit air de ruines à l’édifice. Une unique tour bâtie le long d’un mur d’enceinte surplombait les autres constructions. De son sommet, la vallée de Fortavent apparaissait alors comme un champ de verdure et de neige, vierge de presque toute civilisation.
 
   Nichée entre les montagnes, la petite principauté vivait paisiblement sa vie, année après année, ignorante des affaires des grandes villes et des querelles sanglantes des grandes maisons nobles.  
 
                       ***
 
   Le vent des Ereygirs se faufila dans la tente et réveilla Aldérick qui se dressa dans un sursaut. Une bourrasque plus violente que les autres fit trembler l’armature en bois de l’abri et un vent glacial s’infiltra par un entrebâillement des fourrures qui calfeutrait l’entrée.
 
   Le rêve avait semblé si réel qu’Aldérick entendait encore résonner le rire enfantin de sa jumelle. Pourtant presque quinze années avaient passé depuis, mais revenir sur sa terre natale avait réveillé sa mémoire.  
 
   Revenant à la réalité, Aldérick entendit son compagnon bougonner et s’emmitoufler davantage sous les fourrures. La tente, constituée de peaux tendues sur des tiges de bois, tremblait sous la bourrasque. Elle se serait probablement envolée si elle n’était fixée au sol par des piquets de fer. Aldérick tenta de se lever pour aller remettre en place la peau tendue dans l’entrée quand il réalisa que son autre compagnon, celui à quatre pattes, était couché sur ses jambes. Ne voulant pas réveiller celui-ci, il se rallongea, les mains sous la tête, pensif…
 
   Cela faisait maintenant presque quinze années qu’il accompagnait Maître Sandarel et la Fraternité de l’Acier sur les routes de l’empire. Celui-ci l’avait recueilli quand…
 
   Chassant de douloureux souvenirs, Aldérick tenta de se concentrer sur la journée à venir. D’ici quelques heures, le maître épéiste lui ferait passer un test, afin de symboliquement reconnaître qu’il avait terminé son apprentissage. Bien qu’à sa portée, l’épreuve nécessitait quand même toute son énergie et son attention. Aussi Aldérick fit le vide dans son esprit pour profiter des quelques heures de repos qu’il lui restait.  
 
   Ne pouvant trouver le sommeil, il se leva dès lors que les premiers rayons de lumière apparurent. Déjà le campement était en effervescence. Au centre, Hirago préparait le repas du matin, en coupant de la viande salée et en la mélangeant dans une grande marmite de fer noir avec une bouillie de patates et de blé cuit. Chasseur émérite à la silhouette mince et élancée, Hirago préparait quotidiennement le repas de la troupe avec le produit de la chasse et l’accommodait toujours de quelques préparations de son cru afin que chaque repas soit une fête. Fenbran, un gaillard musclé à la chevelure blonde et bouclée, quittait sa garde nocturne, traversant le camp composé d’une trentaine de tentes en fourrure à l’image de celle d’Aldérick, en direction de son propre abri. Le maître chien Doleas, un vieux bonhomme grincheux au crâne dégarni et aux yeux perçants, débitait une carcasse de cerf et en jetait les os à ses animaux affamés.
 
   Alors que le soleil se levait par delà les collines à l’est, le campement s’éveillait à la vie. Aldérick remarqua que le maître épéiste était déjà levé. S’étirant, il contemplait les premiers rayons du soleil.  Le vieux maître d’arme avait la carrure des gens des montagnes. Bâti comme une armoire à glace, il avait également l’amabilité d’un rocher. Pourtant tous dans le camp et Aldérick plus que les autres chérissaient le vieux bonhomme pour les avoir élevés et leur avoir inculqué un code d’honneur. Malgré le froid, Sandarel ne portait qu’une tunique de coton noir sans manches, laissant nus ses puissants bras. Plaçant un cerclet d’acier sur son front, il rabattit sa longue chevelure hirsute et grise en arrière. Il remarqua Aldérick et lui fit un signe de tête, puis se dirigea vers Hirago et la marmite autour desquels se massait déjà une petite horde d’affamés.
 
   «  Déjà debout ? »
   Aldérick se retourna. Essekar, le compagnon qui partageait sa tente, sortait péniblement du sommeil. A l’image du maître d’arme, Essekar était une force de la nature. Dépassant allègrement les deux mètres, Essekar était puissamment bâti, avec un buste en V, de larges épaules et une musculature qu’Aldérick qualifiait de bovine pour le taquiner. Essekar évoquait pour Aldérick ce que son frère Hagen aurait pu devenir. Tous deux était originaire de la région et avait été recueilli ensemble. Aldérick se rappellerait toujours les premiers jours où le Maître l’avait adopté. Dès qu’il en avait terminé avec ses corvées, il dénichait un coin tranquille sous un chariot pour pleurer de fatigue, ne pouvant faire le deuil de ses parents, de son frère et de sa jumelle. Un jour un autre garçon de son âge le rejoignit et lui confia « Moi aussi j’ai perdu ma famille dans la guerre de Fortavent ». Sans trop savoir pourquoi, le jeune garçon avait étreint Aldérick pour le consoler. Les deux enfants étaient restés l’un contre l’autre, partageant l’un la peine de l’autre. Depuis lors, ils étaient inséparables.  
 
   Souriant, Aldérick haussa les sourcils vers le jeune géant qu’était devenu son ami. Il jeta un coup d’œil vers le râtelier d’arme contenant les épées réservées à l’entraînement. Saisissant l’allusion, Essekar sourit à son tour. Les deux jeunes hommes prirent chacun une arme et se dirigèrent vers un terrain dégagé.
 
   Le soleil déclinait vers l’horizon. La tempête avait cessé avant l’aube et le ciel avait été limpide toute la journée. Une partie de la neige qui s’était accumulée les derniers jours commençait à fondre. Toute la population du petit camp s ‘était rassemblée autour du terrain d’entraînement, un espace plus ou moins plat situé entre le camp et la route enneigée qui menait de Valenbrume à Roquefer. Guerriers, chasseurs, artisans, tous étaient venus assister aux combats initiatiques organisés par Maître Sandarel afin de récompenser les efforts de l’année passée. Organisé chaque premier jour du printemps, cette célébration permettait de reconnaître comme tel les nouveaux guerriers et de confirmer dans leur apprentissage les plus jeunes. Sur le champ de bataille, le dernier combat, lequel opposait Essekar et Aldérick, faisait rage depuis de longues minutes.
 
   Essekar, ayant saisit son épée à deux mains, la brandit au-dessus de sa tête. Poussant un cri de guerre, il chargea Aldérick. Celui-ci attendit le dernier moment pour esquiver, afin qu’Essekar ne puisse modifier sa charge. Il plongea sur la droite, exécuta un roulé-boulé et retomba sur ses pieds. Autour du terrain, les spectateurs poussaient des vagues d’encouragements pour l’un et l’autre. Essekar se retourna et s’apprêta à charger de nouveau son compagnon d’entraînement, mais Aldérick pris l’avantage. Croisant ses deux fines lames devant lui, il courut à la rencontre d’Essekar et bloqua sa grande épée entre les deux siennes.  Du coin de l’œil, Aldérick surpris le maître d’arme en train de les observer, impassible, les bras croisés. Essekar, remarquant l’inattention soudaine de son adversaire, fit peser son poids et lui balaya les jambes d’un croche-pied. Littéralement renversé, Aldérick se retrouva par terre sur le dos. D’un saut carpé parfaitement exécuté, il revint sur ses deux pieds. Connaissant les goûts d’Aldérick pour ce genre d’acrobatie, Essekar attendait le bon moment et utilisant toutes ses forces, il décocha un coup du plat de la lame à l’instant exact où Aldérick s’était rétablit. L’une des lames d’Aldérick fut brisée et l’autre vola dans les airs.  
 
   « J’ai perdu » abdiqua Aldérick alors que le grand gaillard pointait le bout de sa lame vers son torse.  
   
   Un tonnerre d’applaudissement mis fin au duel. Les spectateurs brisèrent la limite de la surface de combat pour venir féliciter l’un comme l’autre. Hirago réconforta Aldérick mais ne pu contrôler un éclat de rire.  
 
   « Merci de cette démonstration d’acrobatie !
   - De rien. Il me semble pourtant que c’est toi qui me l’avais enseigné. Mon professeur serait-il imparfait ? »  ironisa Aldérick.
   «  Ton professeur n’exécute pas des sauts pour atterrir juste sous le nez d’un gaillard de la carrure d’Essekar. Ensuite, tu exécute ces tours à chaque combat. Je suis sur qu’il te gardait cette réplique tout spécialement pour ce combat.  
   - Mouais » fit Aldérick mollement.
 
   Essekar avança vers Aldérick, la main tendue.
   
   « Sans rancune ?  
   - Sans rancune, acquiesça Aldérick en saisissant la main tendue. Mais j’aurais ma revanche.  
   - J’ai déjà hâte de recroiser le fer. »
 
   Les spectateurs s’écartèrent alors que Maître Sandarel s’avançait vers les deux duellistes. Derrière lui, un jeune apprenti portait un fardeau enveloppé dans une épaisse étoffe blanche. De sa voix rauque, il les félicita solennellement.
 
   « Essekar, Aldérick, aujourd’hui vous avez fait preuves devant vos pairs et vos professeurs de la maîtrise que vous avez acquise. Enfants, vous avez suivit l’apprentissage de vos aînés, adolescents vous avez appris l’art de l’épée, et toujours vous avez su garder cet esprit honorable qui sépare le guerrier du brigand. »
 
   Marquant une pause pour que chacun mesure la valeur de l’instant, le maître repris son discours en saisissant le colis que portait l’apprenti.  
 
   « Aujourd’hui, moi Sandarel Noiracier je vous reconnais comme mes pairs. Je ne suis désormais plus votre professeur, mais votre compagnon d’arme, ainsi que tous ceux qui vous entourent. »  
Dépliant l’étoffe, il révéla deux magnifiques épées courtes d’un acier blanc étincelant.
 
   « Voici Brise et sa jumelle Zéphyr. Elles ont été forgées par Draugrim, notre forgeron. Un pouce de large et douze de long, elles sont légères et rapides. C’est de la bel ouvrage… »  commenta –t-il en les remettant à Aldérick.
   « Quant à toi, je te remets FendLaRoche. Un mètre quatre vingt de long pour seize kilos, c’est le genre d’arme qui n’appartiendra qu’à toi. Si elle te paraîtra lourde, sache que maniée avec puissance, elle sera imparable. Un entraînement quotidien te permettra de batailler avec des heures durant s’il le faut. »  
 
   Le regard d’Essekar s’illumina alors qu’il se saisit de l’épée gigantesque.  
 
   Les autres combattants saisirent à leur tour leurs armes et les levèrent vers le ciel. D’une seule et même voix puissante, la centaine d’individu prononça alors solennellement le serment d’usage qui les liait tous l’un à l’autre.
 
   « Nous, la Fraternité de l’Acier, jurons protection et aide à nos Frères. Leur combat est désormais notre combat. Notre tente est désormais leur tente. Nous lions notre destin aux leurs pour ne former qu’une seule et même famille sous les étoiles. » Les paroles furent prononcées avec force et gravité et tous exprimait dans leur voix et sur leur visage une sincérité que personne n’aurait alors remis en question.
 
   Puis, se fut au tour d’Aldérick et d’Essekar de donner la réplique.
 
   « Nous rejoignons la Fraternité de l’Acier. Amis nous étions, Frères désormais nous sommes. Votre combat est désormais notre combat. Notre nourriture est votre nourriture. Nous lions notre destin à celui de la Fraternité pour devenir une seule famille sous les étoiles. Nous promettons de respecter la loi et l’ordre des nations, de ne jamais servir une cause déshonorante, d’accepter la réédition d’un ennemi quel qu’il soit et de  combattre avec bravoure et honneur pour le nom de la Fraternité. »
 
   Hirago s’avança vers Aldérick, se campant juste en face de lui tandis que Fenbran faisait de même avec Essekar. Les deux baroudeurs confirmèrent alors le serment des jeunes hommes.
 
   - Nous avons entendu votre serment et en serons les gardiens. Nous jurons de protéger l’honneur de la Fraternité et son intégrité contre le parjure et la malveillance. Si vous deviez faillire à votre parole, nous, les gardiens serions alors vos bourreaux.
 
   Aldérick vit que Hirago prêtait serment avec un sérieux qu’il ne lui avait jamais montré. La coutume voulait que pour chaque nouveau venu dans la Fraternité, un ancien se porte volontaire pour être le gardien de la parole donnée. Si jamais Aldérick devait faillir à son serment ou causer du tort à la réputation de la Fraternité, il serait alors du devoir d’Hirago de venger celle-ci. A la simple idée de décevoir Hirago qui lui avait tant appris, qui s’était même porté volontaire en son nom aujourd’hui, Aldérick bouillonna. Jamais il ne trahirait son serment et jamais il ne serait parjure devant ses frères d’armes !
 
   - Pour nos deux nouveaux frères d’armes ! » cria Fenbran, et tout les autres répondirent d’un « Force et Bravoure ! » qu’il firent résonner maintes fois dans les montagnes.  
 
   « Et maintenant,  conclut Sandarel, célébrons l’événement comme il se doit. Faite couler la bière et que rôtissent les viandes ! »
 
   La fête dura jusqu'à tard dans la nuit. Pour Aldérick, elle fut la plus mémorable fête de son existence. Allongé sur sa couche, il grava ces instants magiques dans sa mémoire avant de s’endormir. C’est alors que d’autres souvenirs qu’il croyait avoir oubliés ressurgirent.
 
                  ***
 
   La tempête de neige augmenta en fureur et en force tout au long de la soirée. Aldérick sentait que quelque chose couvait. Ils s’étaient rassemblés dans le grand salon alors qu’habituellement à cette heure Freya et lui attendaient couchés dans leurs lits jumeaux que leur mère vienne les border. Chaque soir en effet, leur mère Lantanna venait les embrasser et leur lire à la lueur des chandelles un passage des Chroniques d’Albior. Mais ce soir là, leur père Thorvan et Hagen s’affrontaient aux cartes. Un plateau d’argent avec de fins verres de cristal et une bouteille d’ylpocras encore fermée était posée sur la table à coté des deux joueurs. Ceux-ci s’étaient rendus au salon en début de soirée vêtu de leurs plus beaux atours. Thorvan portait une chemise blanche sous un pourpoint de damas noir à haut col. Hagen était entré dans la pièce vêtu d’une veste de coton noir sur une chemise bouffante bleu océan. L’un comme l’autre s’étaient rasé au plus près, peignés et portaient leur plus belle paire de bottes. Lantanna, assise dans le grand fauteuil de cuir et de peaux avec Freya sur ses genoux, chantait doucement une berceuse tout en caressant amoureusement les cheveux de sa fille somnolente. La mère comme la fille arboraient une robe de satin rouge mat. Elles avaient coiffé leur chevelure argentée en une longue tresse ornementée d’un foulard noir noué en papillon juste derrière la nuque. Aldérick n’avait pu échapper à une toilette complète ainsi qu’à un habillage des grandes occasions. Il portait un pourpoint avec manches en coton vert et attendait maintenant assis en tailleur devant la cheminée où brûlait un grand feu, se laissant hypnotiser par la danse des flammes et le crépitement du bois, les mains en avant pour en ressentir toute la chaleur.  
 
   Les heures passaient et Aldérick remarquait bien que son père n’était pas vraiment concentré par le duel de cartes qu’il livrait contre son aîné. C’est alors qu’on cogna violemment à la porte. Le bruit fit sursauter Aldérick. Inquiet, il fixa son père et le vit se lever de table pour se diriger vers l’entrée du manoir. Thorvan fit une pause devant la porte et respira profondément avant de l’ouvrir et une bourrasque de neige pénétra dans la maison en même temps qu’une silhouette encapuchonnée.
 
   - Bienvenue en mon humble demeure, Magister Isolde.  
 
   Aldérick vit son père exécuter une révérence devant ce tardif visiteur et il réalisa qu’il n’avait jamais vu jusqu’à maintenant son père baisser la tête pour quiconque.
 
   « C’est en grande nécessité que je me rends chez vous, Thorvan de Fortavent, car il tarde au Conseil des Arcanes de tester le potentiel de votre descendance, ainsi que vous le fût en votre temps. L’hiver installé, il m’aurait été pénible de venir avant l’année suivante. »
Thorvan hocha la tête d’un air très grave et indiqua de son bras gauche le salon où attendait sa famille. La mystérieuse personne s’avança vers la pièce en relevant sa capuche, dévoilant une femme apparemment jeune, aux courts cheveux noir de jais, au teint ensoleillé et au regard très pénétrant.  
 
   « Je vous présente ma tendre épouse Lantanna » fit Thorvan à l’intention de la visiteuse, tandis que Lantanna exécuta à son tour une révérence.  
    « Voici mon fils aîné Hagen, puis Aldérick et enfin Freya » continua-t-il.  
   « C’est un grand honneur de recevoir l’envoyé du Conseil » ajouta Lantanna. « Une collation vous a été préparée bien évidemment.
   - L’honneur est pour moi, Héritière des Eldryns » répondit courtoisement Isolde. « Votre hospitalité me touche mais d’abord il me faut mener à bien ma mission. Une fois les enfants testés et le conseil avertit de mes observations, c’est avec plaisir que je dînerais.
   - Nous ignorions que nos enfants revêtaient tant d’importance pour les Anciens du Conseil » dit Thorvan en jetant un regard inquiet vers sa femme qui lui renvoya également ses soucis.
   « Les Anciens pensent que le temps de la malédiction d’Andragoras arrive » déclara Isolde. « Afin de se prémunir contre le Messie d’Andragoras, les Anciens ont décrypté les signes afin d’identifier le successeur d’Albior. Il serait même possible qu’il soit déjà né. Aussi recherchons-nous tout jeune garçon ou fille avec un potentiel inhabituel, en particulier parmi certaines familles… »
 
   Disant cela, la magister observait la chevelure argentée de Freya tout en lui souriant chaleureusement. Aldérick n’avait pas perdu une miette de l’étrange conversation mais il ne pouvait dire de quoi il était question.  
 
   « Certaines familles qui avaient de jeunes enfants que nous devions tester ont disparues » continua Isolde. « D’autres fois c’était bien pire… »
 
   Isolde regarda Aldérick puis Thorvan, lui faisait comprendre qu’elle ne voulait pas en dire plus devant ses enfants. Lantanna ouvrit la bouche d’horreur. Le seigneur de Fortavent réconforta son épouse.
 
   « Allons, il ne s’est encore rien passé ici.  
   - Exactement » acquiesça Isolde, « et il ne vous arrivera rien car désormais vous êtes sous ma protection. »
 
   Isolde se tourna solennellement vers Hagen, et le fixa d’un regard pénétrant.
 
   « Hagen de Fortavent, je vais tester ta Force d’Ame. Approche-toi mon garçon. »  
 
    Le père du jeune homme posa sa main sur l’épaule de son fils inquiet et lui acquiesça d’un mouvement de tête de faire confiance à la Magister. Hagen s’avança vers la magicienne en tentant de conserver toute son assurance.
 
   « Que dois-je faire ? » demanda-t-il.
   « Agenouille-toi devant moi et détend toi. Il me faut accéder aux forces qui sommeillent en toi pour en déterminer l’essence et l’intensité. »
 
   Hagen s’exécuta et la Magister toucha les tempes du jeune garçon du bout des doigts. Elle releva la tête et ferma les yeux, entrant dans une concentration absolue. Le silence se fit dans la pièce, chacun retenant sa respiration. Aldérick observait la scène avec attention. Pour avoir écouté attentivement sa mère lui conter les Chroniques d’Albior, il savait que la Force d’Ame était un pouvoir que possédait certains héros. Cependant le recueil en avait une approche assez romanesque et ne s’étendait pas vraiment sur la nature exacte de ce pouvoir.
 
   Isolde rouvrit les yeux et secoua négativement la tête.  
   « La Force d’Ame est présente mais trop endormie et encore trop faible. Il faudra attendre sans doute quelques années pour assister à un Eveil. »
 
   Hagen se releva, déçu de ne pas disposer de cette force mystique dans l’instant.
 
   « A ton tour jeune Freya. »  
 
   La petite fille s’avança timidement, lâchant la main de sa mère. Celle-ci l’encouragea.  De nouveau, Isolde palpa la tête de son sujet et se concentra. Elle rouvrit les yeux presque aussitôt.
 
   « Celle-ci dispose d’un don anormalement puissant, et il est presque Eveillé » dit la magicienne en souriant à la fillette surprise. « Votre fille est désormais le quatorzième successeur potentiel. Je dois en toute urgence me recueillir et transmettre par magie les résultats de mes observations au Conseil. Je vous rejoindrais aussitôt cela fait et je pourrais vous narrer plus en détails les évènements. Nous discuterons alors de ce qui doit être fait pour la sauvegarde de votre fille.
   - Et moi ? » demanda timidement Aldérick.
   « La Force d’Ame ne se manifeste pas au même âge chez les garçons et les filles » lui expliqua Isolde. « Quand le temps sera venu, dans deux ou trois ans, je reviendrais te voir. »
 
              ***
 
   Le soleil était déjà haut dans le ciel lorsque Aldérick se réveilla. Essekar ronflait du sommeil du bienheureux à coté de lui. Jenki aboyait à l’extérieur de la tente. Les paroles d’Isolde résonnaient encore dans sa tête. S’extirpant de sa couche, Aldérick sortit de la tente et cligna des yeux lorsque la lumière du jour l’aveugla. Le vieux chien de son grand-père attrapait les morceaux de viande que Doleas lui jetait. Malgré son âge, Jenki était encore très vif. Noir de pelage, il était presque aussi gros qu’un loup. Il conservait d’ailleurs de multiples cicatrices d’une échauffourée avec l’un d’entre eux. Son oreille gauche était déchirée et une partie de son museau conservaient les traces d’un coup de griffe. Lorsque Aldérick sortit de la tente, Jenki s’approcha de lui pour lécher la main qu’il lui tendit. S’agenouillant près de lui, Aldérick lui frotta la tête tandis que le chien lui léchait la joue affectueusement. A ce jour, Jenki était la seul chose qu’il lui restait de sa famille, aussi chérissait-il le vieux chien comme un trésor. Encore ému du rêve de la nuit, il joua presque une heure avec Jenki, courant et se roulant avec lui dans la neige, se rappelant qu’autrefois son frère Hagen se joignait à lui dans ces jeux.
 
   La journée fut relativement calme. La plupart étaient trop mal en point suite à un abus d’alcool et les autres trop fatigués pour faire autre chose que de traîner autour de la marmite. Pour Aldérick le moment était venu. Cela faisait plusieurs années qu’il y pensait et l’instant était arrivé. Il allait retourner sur la terre de sa famille pour tirer au clair les funestes évènements qui s’y étaient déroulés. Le maître d’arme venait de le confirmer en tant que guerrier et il se sentait prêt. Il interprétait comme un signe du destin que la petite troupe avait choisit la frontière entre Fortavent et Cerwyn pour son campement. Occupé à faire ses paquetages, il ne vit pas Essekar arriver derrière lui.
 
   « Je viens avec toi ! »
   
   Aldérick se retourna surpris vers son ami.  
 
   « Moi aussi je suis de la région…Moi aussi je veux revoir l’endroit où je suis né… »
 
   Aldérick savait qu’Essekar venait de Roquefer, une toute petite bourgade basée autour d’une des deux mines qui faisait la fortune de Fortavent. Enfants, alors qu’ils venaient de se rencontrer, ils s’étaient confiés les malheurs qui les avaient amenés à être adopté par Sandarel. Aldérick savait donc que son ami avait perdu son père dans un accident de mine, sa mère ayant succombée à une épidémie des années auparavant.  
 
   « Roquefer est à trois jours d’ici » finit par répondre Aldérick. « Nous irons rendre hommage à tes parents, puis je te montrerais le château où je suis né, … si tu veux bien ? »
 
   Le grand gaillard s’élargit d’un sourire.  
 
                       ***
 
   « Je suis venu vous dire au revoir, maître. »
 
   Sandarel se tenait à l’écart du campement. Une fois par jour il s’éclipsait pour méditer et se concentrer. Aldérick souhaitait faire ses adieux à son professeur en privé et avait donc décidé de troubler sa quiétude aujourd’hui, mais il avait trouvé le vieil homme en train de l’attendre sur une proche colline, entourée de sapins enneigés.
 
   " Je savais que tu viendrais me voir », dit simplement Sandarel pour répondre aux yeux surpris d’Aldérick.  
   « Je  ne pouvais pas partir sans vous dire au revoir. Je tenais à vous remercier pour votre enseignement, pour toutes ces années où vous m’avez appris votre art de l’épée.. »  
 
   Aldérick pris une longue inspiration, afin de rendre solennel l’instant.  
 
   «  Je vous serais éternellement reconnaissant pour cela. Comme vous le savez sûrement, j’ai décidé de retourner sur les terres de mes ancêtres afin d’apprendre ce qu’il s’est réellement passé, et…
   - Attend, quelque chose me tracasse toujours à ton sujet. Hier lors du combat contre Essekar, tu aurais pu le vaincre et de cela je suis persuadé. Tu m’as fixé du regard, hésitant à porter ton attaque, ce qui t’a perdu. Je suis sûr qu’à cet instant tu aurais pu porter un coup qui t’aurait assuré la victoire, je me trompe ?
   - Non, mais je ne voulais pas faire mal à mon ami. »
 
   Sandarel hocha de la tête, pensif.
 
   « Si les rôles avaient été inversés, aurait-tu apprécié la victoire sachant que ton adversaire t’avait épargné par pitié ?  
   - …Non » finit par admettre Aldérick. « Je lui en aurais voulu de m’avoir épargné… » Voyant où le maître voulait en venir, il poursuivit sa réflexion. « Je ne pensais pas humilier Essekar en l’épargnant ainsi.  
   - Il ne s’en est pas rendu compte. Je crois qu’à part Hirago, personne ne l’a remarqué.
   - Je devrais m’excuser auprès d’Essekar je crois…
   - Garde plutôt cela pour toi, et la prochaine fois souvient toi que la compassion peut blesser certaines personnes. Ne pas retenir ses coups contre son partenaire, c’est aussi le respecter et lui faire confiance. »
 
   Aldérick hocha la tête, mémorisant la leçon que lui donnait son maître.
 
   « A-tu entendu parlé de la Force d’Ame ? demanda subitement Sandarel.
   - Oui, ma mère me lisait les Chroniques de Saint Albior. Elle me relatait comment Albior et les paladins de Valarian vainquirent les démons d’Andragoras en utilisant ce don. Les Douze Légions étaient invincibles à la bataille mais après qu’ils trouvèrent la Force d’Ame, Albior et ses compagnons finirent par renvoyer le dieu obscur dans l’au-delà.
   - En fait, Elle est en chacun de nous mais Elle ne s’éveille que rarement. Elle se manifeste de différente façon selon les individus. Par exemple, chez ceux qui font preuve d’une âme de guerrier, Elle peut augmenter leur force physique. Les plus expérimentés peuvent même transmettre une partie de leur Force d’Ame à leur arme, lui donnant ainsi des capacités surnaturelles.
   - Alors l’épée d’Albior qui pouvait couper un rocher en deux était …
   - Possible. Les artisans qui disposent de la Force d’Ame peuvent aussi infuser des propriétés particulières à leurs œuvres. Il se peut également que la légende soit vraie et qu’il s’agisse d’une arme divine que lui remit l’Archange Andramael. »  
 
   Tout à coup, Aldérick saisit que cette discussion en apparence anodine revêtait un caractère important pour son professeur. Sandarel l’avait attendu ici sur cette colline afin d’avoir avec lui cette conversation privée sur la nature de ces pouvoirs légendaires. Un peu inquiet mais impatient d’en savoir plus, il demanda :
 
   « Pourquoi me parlez-vous de la Force d’Ame ?
   - Parmi ceux qui en dispose, certains ont une sensibilité particulière à l’égard des autres personnes chez qui la Force d’Ame est puissante, comme une sorte de sixième sens permettant de reconnaître son égal... »
 
   Le vieux maître d’arme fixait Aldérick sans le regarder, comme en transe. Un souffle de vent balaya la colline, faisant osciller les sapins environnants. De la neige qui s’était accumulée sur des branches tomba sur le sol. Touché par une étrange sensation de déjà-vu, Aldérick revit la Magister Isolde tester sa jumelle,  
 
   Sandarel continua alors subitement sa phrase : « .. et moi je crois que tu possède aussi cette Force. »
 
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Voilà, c'est ici que s'achève le premier chapitre :) J'espère qu'il suscitera du bon temps, des réactions et plein de commentaires.


Message édité par deidril le 25-06-2004 à 13:24:49
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Marsh Posté le 25-06-2004 à 13:14:38    

[:drapo]
 
J'ai pas le temps aujourd'hui


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"The two most common elements in the universe are Hydrogen and stupidity." - Harlan Ellison
Reply

Marsh Posté le 25-06-2004 à 13:52:08    

[:michrone] Même chose.

Reply

Marsh Posté le 25-06-2004 à 13:58:23    

m'en vais lire ça, attention aux critiques  [:rhetorie du chaos]  [:rhetorie du chaos]  [:rhetorie du chaos]  [:rhetorie du chaos]


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écrire, y'a que ça de vrai !
Reply

Marsh Posté le 29-06-2004 à 13:18:07    

c bien , y'a des petite seereurs de style ( o sjt d maisons ki se lézardent) lmé sinon oué c bien !!!

Reply

Marsh Posté le 29-06-2004 à 16:01:26    

Ahhhhhhhhhhh Mais c'est terrible!!!
 
Le style du debut du prologue est un peu lourd mais ca s'arrange a fur et a mesure et surtout....l'histoire est captivante!!!!
 
La suite svp!!!!!!!!!!!!!!

Reply

Marsh Posté le 29-06-2004 à 16:49:27    

Je pesne que tu peux continuer , ça devrais plaire !!
Une question : la style héroïc-fantasy est il une sous-branche de la SF ?

Reply

Marsh Posté le 29-06-2004 à 17:32:17    


  Non


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écrire, y'a que ça de vrai !
Reply

Marsh Posté le 29-06-2004 à 19:00:39    

J'ai noté que plusieurs personnes trouve l'introduction trop lourde. J'essayerais de la réécrire afin de fluidifier le gros bloc de description tout au début.
 


Message édité par deidril le 30-06-2004 à 13:28:18
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Marsh Posté le 30-06-2004 à 13:28:46    

Et voilà le chapitre 2 :
 
                          Chapitre 2
 
                      La lettre du magicien
 
  « Le chemin de la connaissance est long, mais celui des arcanes magiques ne peut être parcouru en une seule vie humaine. La plupart des voyageurs qui empruntent cette route se perdent sur des voies sans issues. Seul l'esprit affûté saura trouver son chemin dans les méandres des écrits et distinguer la connaissance de la supposition ou de l’affabulation. Au cours des siècles, certains voyageurs avisés posèrent des jalons pour ceux qui les suivraient. Celui qui pose le premier pas sur cette route est l'Apprenti. Son esprit est encore embrumé d'illusions et la route lui paraît droite, directe et facile. Le Magicien est celui qui a appris à contourner la colline plutôt que de l'escalader. Il a déjà accomplit une partie du trajet, mais il n'a seulement traversé la forêt que pour arriver au pied de la montagne... Le Mage est un voyageur chevronné. Il sait reconnaître son chemin parmi les sentiers multiples qui s'offrent à lui. Il sait aussi reconnaître les signes laissés par ses prédécesseurs et est capable, le cas échéant, de tracer sa propre route. Le Sorcier est celui qui a renoncé à parcourir la route sous le soleil et les étoiles. Il préfère emprunter une obscure route souterraine dont il a trouvé l'embranchement au prix d'un pacte avec le Malin.  
La plupart des voyageurs s'arrêtent au cours de l'ascension, victime de l'âge ou du destin, car la route n'est pas sans danger. D'autres abandonnent leur quête de savoir face à la falaise infranchissable de l'impossibilité ou le gouffre béant de l'inconnu. Pourtant, certains parviennent à se frayer un chemin jusqu'au sommet. Noms de légendes illustrant des cours de théorie arcanique, esquisses dans un livre de légende, maîtres parmi les maîtres, leur nom est aussi puissant que la foudre ou le feu. Leurs mains déchirent l'air et ouvrent les eaux.  Mais c’est avec leur esprit que les Archimages refaçonnent le monde.
Cependant toute ascension, aussi haute qu'en soit le sommet, commence toujours quelque part, aussi commenceront-nous par une étude approfondie de ce qu’est la Force d’Ame, source de toute manipulation magique.  
… »

 
   Son doigt suivait inlassablement les lignes du vieux grimoire, soulignant d'un trait invisible ces mots issus d'un autre temps. Le papier était vieux, presque pourri. Une partie avait dû subir les assauts de l'eau car l'encre en était délavée et certains mots étaient devinés plus qu’ils n’étaient lus. La couverture de cuir était si usée que le titre avait disparu depuis longtemps. Les mots eux-mêmes étaient vieux. Ils étaient ceux d’un cours de magie qui fût donné à des Apprentis des siècles auparavant.
 
   Délicatement, la jeune femme referma l'ouvrage. Elle décida qu’elle terminerait son devoir sur l’Evolution de la Théorie Arcanique plus tard. Elle se leva de la table pour remettre le livre à son emplacement, sur l'étagère. Elle était seule dans la vaste salle d'étude. Celle-ci couvrait la moitié du premier étage du covenant. Les murs étaient dissimulés par de grandes bibliothèques dans lesquels étaient classés des milliers d’ouvrages. Encyclopédies géographiques, cours d’histoire, tome de botanique et d’alchimie, ainsi que tout ce qui pouvait être étudié incluant bien sûr la magie, s’accumulaient sur les planches et souvent en plusieurs exemplaires. Pour ce qu’elle en savait, la bibliothèque du covenant de Karador était la plus grande qui soit hormis peut être celle des moines archivistes de l’Ordre de Saint Tenadir.
 
   En d’autres occasions, cette pièce avait représenté la sagesse, mais en cette journée chaude et ensoleillée, elle suintait d’ennui alors que tous les autres étudiants étaient sortis profiter de la saison. De chaud rayons de soleil traversaient les grandes fenêtres vitrées et venaient dessiner sur les tables d’études des carrés d’ombres et de lumières.
 
   Suprême punition, la jeune femme fêtait ses vingt trois ans aujourd’hui et devoir travailler sur un sujet aussi rébarbatif et ennuyeux que la Théorie Arcanique au lieu de célébrer son anniversaire lui semblait d’une injustice démesurée. Pour le coup, elle regretta vraiment de s’être fait surprendre en possession d’Herbe-à-Fey, substance illicite mais dont les effets secondaires par absorption de la fumée était hautement appréciés des étudiants lettrés.
 
   Korigwene fixait ses pieds en soupirant, comme s’ils allaient soudainement répondre à ses souhaits et la sortir de cet enfer d’encre et de papiers. Elle ferma les yeux, tentant de retrouver cette ferveur et cette envie d’apprendre qui avait nourrit sa concentration pendant des années. A chaque fois qu’elle désespérait, elle se rappelait la jeune fille de dix ans aux boucles rousses tenant sa poupée de paille dans une main, alors qu’un grand homme en robe noire déclarait à ses parents qu’elle avait en elle la Force d’Ame, leur expliquant qu’elle possédait le Don du Manipulateur et que celui-ci lui permettrait de devenir peut-être, une magicienne. Korigwene se souviendrait toujours de cet instant où l’homme s’était agenouillé devant elle, posant ses mains sur ses frêles épaules d’enfant. Il lui avait alors expliqué qu’elle pouvait apprendre la magie si elle le souhaitait, que le covenant de Karador subviendrait à tous ses besoins jusqu’à sa confirmation comme magicienne et que si elle en avait la volonté, elle deviendrait quelqu’un de respecté et de puissant. Cet homme, le Mage Boerus, était devenu dès lors un deuxième père pour elle. Patient, attentif, il avait tenté de planter en elle les graines qui ferait d’elle une adepte des arcanes, mais le don que Boerus avait détecté et dont il lui avait confirmé la présence à maintes reprises ne s’était jamais manifesté. Elle faisait donc partie de ceux que l’on appelait les Morteforces, ceux dont la Force d’Ame était potentiellement puissante et susceptible de se manifester, mais dont l’Eveil était bloqué pour une raison indéterminée.  
 
   Korigwene se rendit compte alors qu’elle fixait l’étagère contenant les livres traitant du sujet, des livres qu’elle ne connaissait que trop bien. Désespérée de ne pas pouvoir mettre son don latent à profit, elle avait épluché la moindre ligne de ces ouvrages. A sa connaissance, la seule personne qui aurait pût l’aider était le Magister, le représentant du Conseil des Arcanes lequel était formé par l’ensemble des covenants. Le Magister était en effet le seul apte à pratiquer le Rituel de l’Eveil qui forçait la Force d’Ame à se dévoiler. Elle avait alors demandé à Boerus de l’emmener voir ce Magister mais celui-ci lui avait catégoriquement refusé. Avec une infinie patience, le mage lui avait expliqué que le Rituel de L’Eveil n’était autorisé que dans des circonstances extraordinaires, car forcer des Eveils en masses c’était violer la première loi du magicien : « L’œuvre des dieux tu ne changeras pas. ». Si son don ne voulait pas s ‘éveiller, elle devait l’accepter et vivre avec cette déception. Boerus avait alors insisté, avec une fermeté et un sérieux qu’il n’avait jamais utilisé à son égard sur le fait qu’elle ne devait jamais, au grand jamais, chercher à éveiller celui-ci par des pratiques que le Conseil interdisait. Pour la convaincre, il l’avait alors orienté vers des ouvrages historiques relatant d’anciens jugements du Conseil à l’encontre de ceux qui passèrent outre la loi. La description des châtiments l’avait convaincu d’être patiente ou à défaut, résignée.
 
   Revivre sa déception ne fit que la convaincre qu’elle devrait plutôt profiter de sa journée. La porte de l'étude s'ouvrit alors dans un grincement qui fit sursauter la jeune femme. Armantin, son compagnon d'infortune, entra dans la pièce d'un pas assuré. Morteforce comme Korigwene, Armantin était tout de même l’assistant de Boerus. La déception de ne pas vivre un Eveil n’avait pas changé sa passion pour l’étude de la magie mais son corps reflétait désormais les trop longues heures qu’il passait dans le laboratoire de leur professeur. Malingre et de taille moyenne, ses cheveux blonds étaient désordonnés et sales.  Ses joues étaient creusées et ses yeux bruns alourdis de cernes. Ses épaules étaient tombantes, comme autant de poids sur son maigre corps. Pourtant, ses bras étaient toujours en mouvement, car il parlait toujours en agitant les mains, comme si ses doigts pouvaient décrire davantage que ses mots. Il ne portait que qu’un vieux pantalon de toile troué aux genoux, une chemise rapiécée et tachée de substances alchimiques et pour finir de simples sandales de cuir.
 
   « Bonjour Kory, Un messager vient de délivrer un paquet à ton nom. » déclara le jeune homme en lui tendant un paquet enveloppé de tissus verts. « Je parie que c’est le cadeau d’anniversaire de tes parents » commenta-t-il alors qu’elle se saisissait du colis.
   « Merci.
   - Et Maitre Boerus veut te voir de suite. Il t’attend dans son laboratoire.
   - Tout de suite ?
   - Oui, il a précisé que tu devais venir immédiatement.
   - Je m’y rends dans l’instant alors. Merci pour la livraison. »
 
   Sur ce, elle sortit de la pièce devant lui. Armantin soupira en la regardant partir. Il la connaissait depuis plusieurs années et devinait qu’elle s’était encore morfond sur sa condition de Morteforce, une activité qu'il l'avait vu pratiquer de plus en plus ces derniers temps.  
 
   Le covenant de Karador était une large bâtisse de quatre étages. Le bâtiment ne contenait que les salles de classes, les laboratoires, la bibliothèque et les quartiers des professeurs permanents. Les étudiants comme Korigwene demeuraient en ville dans des dortoirs appartenant au covenant ou bien louaient des chambres dans le quartier pour les plus fortunés. Derrière le covenant se trouvait une grande propriété et des dépendances habitées par les serviteurs. Richement décoré, le covenant rappelait aux visiteurs les hauts faits de tout les étudiants passés qui s’était illustrés au dehors. Des portraits signés des plus grands peintres étaient commandé pour ceux qui acquéraient quelque renommée. Quant à l’élite, elle était représentée sous la forme de statues en marbre situées dans les alcôves des grands couloirs. Tous les murs étaient recouverts de fines boiseries et le sol de tapis moelleux. A intervalle régulier, des candélabres en cuivre étaient disposés pour éclairer la bâtisse, dispositif inutile puisque la Lanterne Irradiante de Solara constituait l’un des tous premiers sortilèges qu’apprenaient les Apprentis, exception faite de Korigwene, d’Armantin et des quelque très rares autres Morteforces qui devaient recourir aux services des bougies.
 
   Korigwene se pressait dans l’escalier qui menait au troisième étage, tentant de se convaincre que la convocation n’avait d’autre but que de la libérer de sa punition. Elle arriva devant la seule entrée fortifiée de la demeure, une porte de chêne massif renforcée d’une armature en acier qui protégeait le laboratoire personnel de Boerus. Après une longue inspiration elle toqua à la porte.
 
   « C’est moi, Kory.
   - Entre » fit une voix.
 
   Boerus  l'attendait, plongé dans la contemplation d'un parchemin. Il était confortablement assis dans le vieux fauteuil de cuir qu'il utilisait pour réfléchir calmement. Il incarnait pour Korigwene l'idée qu'elle se faisait d'un professeur. Calme et patient, Il savait écouter les questions qu'on lui posait et tentait d'y répondre du mieux qu'il pouvait. Il avait maintenant dépassé sa soixantième année et ses cheveux avaient perdu leur noirceur au profit d'un gris cendre. De grande taille, il savait être imposant par sa voix et son regard perçant.  Pourtant, elle ne l'avait jamais vu en colère. Le simple fait qu'il haussait le ton exprimait l'ensemble de son mécontentement. Mais c'est d'une voix calme et grave qu'il lui parla, d'un ton qui lui rappelait des mots prononcés il y a maintes années lorsqu’il lui révéla l’existence de son don.
 
   « Assied toi je te prie. »
 
   Korigwene s’installa sur un des bancs posé contre le mur. . Elle remarqua dans le bois des inscriptions d’étudiants probablement faite avec un couteau. Elle se rappela que la pièce servait parfois de salle de classe pour les étudiants les plus avancés. Deux grandes tables en occupaient la majeure partie. Celles-ci étaient surchargées de matériel alchimique. Des alambics compliqués permettaient de distiller des filtres. Au dessus des bancs, des étagères supportaient nombre de bocaux et de boîtes contenant les composantes propres à l’expérimentation. Korigwene posa le paquet qu’on venait de lui délivrer à coté d’elle. Fixant son professeur, elle hocha la tête pour signaler qu’elle était désormais attentive.
 
   « Ma petite Kory, c'est aujourd'hui ton anniversaire. Comme chaque année, c'est une date qui sert à nous rappeler le temps que nous avons déjà passé sur cette terre, mais aussi le temps qu'il nous reste. C'est aussi un moment privilégié où nous pouvons prendre certaines décisions… »
 
   Boerus soupira et considéra d'un œil critique son élève. De petite taille, elle passait inaperçue, presque invisible. Réservée, silencieuse, elle avait un physique passe partout. De magnifiques cheveux roux étaient sa seule pointe d'orgueil féminin, mais leur coupe courte empêchait la formation des généreuses boucles qu’elle avait étant enfant. Son visage était devenu triste, voire sinistre depuis qu’elle était officiellement une Morteforce. Il aurait presque pu compter les occasions  où il avait vu ces petites lèvres s'élargir en un sourire, même en coin. Elle ne prenait pas vraiment le temps de s'habiller ou de se faire belle. Depuis sa déception de ne pouvoir devenir magicienne, elle était devenue une élève médiocre en comparaison des autres étudiants. Par contre, elle était naturellement douée en tant que traductrice. Il savait qu’elle se refusait à admettre ce talent car cela aurait signifié pour elle renoncer totalement à la magie. Néanmoins, elle savait parler eldryn, kaemite et connaissait même des rudiments de langages religieux comme le valarin.  
 
   « Je pense que rester étudier ici davantage ne t'aidera guère plus. Il est arrivé dans le passé que des M.. » Boerus se rappela soudainement que le terme blessait son élève, bien qu’il n’ait aucune connotation péjorative. «.. que de jeunes mages ayant des difficultés avec leur don ont parfois pu profiter d’un Eveil simplement en changeant d’horizon… »
 
   L’explication n’évoquait rien à Korigwene mais son moral étant au plus bas, elle se laissa convaincre par les paroles de son professeur.
 
   «…  Un de mes amis a grand besoin d'un traducteur pour l'aider dans ses recherches. Il étudie des ruines remontant à la Guerre Sainte qu’il a découvert dans la baronnie de Mythrar, au sud ouest des Ereygirs… »
 
   Songeant aux formidables montagnes telles qu’elles étaient dépeintes dans les encyclopédies, Korigwene frissonna sous le coup d’un froid imaginaire.
 
   « …Xanderthot et moi avions le même maître et nous nous sommes connus dans les salles d'études et les laboratoires, ici mêmes… »
 
   A ces mots, Boerus serra fermement le parchemin dans sa main. Un souvenir particulièrement amusant lui revenait à l’esprit et lui arracha un sourire.  
 
   « Xanderthot est un homme de bien. C’est un érudit qui s'est consacré à l’étude de la Guerre Sainte. Il est devenu un spécialiste en ce qui concerne les batailles légendaires qui eurent lieu dans la région d’Orphalyss. Récemment, m'écrit-il, des mineurs ont mis à jour une excavation dans laquelle ils ont découvert l’entrée d’une tombe qui pourrait bien appartenir à un grand homme du passé. Il a pu situer l’époque de la construction à la période précédant la fondation du Saint Empire, mais pour l’instant il n’a pu en ouvrir l’accès ni en déchiffrer les inscriptions. Dans une de mes lettres, je lui avais parlé de toi en tant que traductrice.  Il a tout naturellement pensé à l'Apprentie de son ancien ami pour l’aider à déchiffrer ses trouvailles… »
 
   Korigwene ne savait que penser. Un coté de son esprit lui disait que cette opportunité lui permettrait de voyager et d’acquérir de l’expérience pratique, l’autre lui confiait qu’elle deviendrait une simple lettrée tout juste bonne à écrire les notes d’un mage historien. « De toute façon, pensa-t-elle, je vais devenir folle à rester ici. » Elle acquiesça donc aux paroles de son professeur.
 
   « Cet emploi te permettra de gagner de l'argent pour toi-même et ainsi profiter d'un meilleur traitement. Même si la paie qu'il t'offre n'est pas une fortune, elle te placera hors du besoin. Si tu mène à bien tes traductions, tes travaux t’ouvriront sûrement d’autres portes. La Force d’Ame ne fait pas tout, il faut aussi le talent. La majorité des gens compense l’un par l’autre.
   - C'est une aubaine rare qui ne se présentera pas deux fois, finit-il par ajouter après un silence.
   - Je comprends. Je vais y réfléchir cette nuit. »
 
   Le magicien acquiesça alors qu'elle sortait du laboratoire. Malgré sa faiblesse pour les herbes illicites, il l’aimait bien et souhaitait vraiment qu’elle trouve sa voie.  
 
   « Je te dispense de terminer ton devoir, finit-il par ajouter alors qu’elle fermait la porte, mais seulement pour que tu puisses prendre ton temps à réfléchir à la proposition de Xanderthot ! »
 
   Korigwene sortit du covenant. Elle s’arrêta sur le perron et fermant les yeux, elle laissa la chaleur du soleil inonder son visage.
 
   « Finalement, la journée n’a pas été si mauvaise » conclut-t-elle.
 
   Bien que le calendrier marquait cette journée comme la première de la saison du printemps, le temps était estival. Il régnait une douce et agréable chaleur apaisée par quelques brises. Le quartier était tout entier dédicacé à la vie des étudiants. Le covenant  occupait l’un des quatre cotés d’un square verdoyant, les trois autres l’étant par des tavernes où les étudiants passaient beaucoup de temps, bien trop selon certains de leurs professeurs. Aujourd’hui, les taverniers avaient sortit les tables et les chaises sur leurs terrasses. Korigwene aperçut des compagnons de classes attablés, riant aux éclats, buvant et festoyant, mais elle ne se sentit pas d’humeur de les rejoindre. Elle descendit une rue pavée bordée de boutiques de vêtements, de composantes destinées à la pratique de la magie et des échoppes d’alchimistes. Elle salua un herboriste de sa connaissance spécialisé en herbes aromatiques et en encens, qui réparait son enseigne. Juste à coté, un escalier tortueux coincé entre cette échoppe et celle du papetier où elle se fournissait régulièrement, montait vers la porte d’un appartement, en l’occurrence le sien. De nombreuses personnes venaient le long de la rue marchande, admirant les vitrines. Un petit groupe de jeunes Apprenties regardait avec envie une robe noire brodée de fil argentée présentée dans une devanture. La marchande, remarquant les jeunes filles, sortie de son échoppe pour aller leur présenter l’ouvrage plus en détail et les allécher. Korigwene dépassa les jeunes étudiantes non sans avoir admiré le vêtement en question qu’elle trouva trop voyant. Elle croisa un peu plus bas son professeur d’alchimie, une grande femme dans une robe festive verte brodée de motifs sylvestres. Elle était accompagnée d’un homme d’un certain âge mais bien habillé et tout à fait charmant. Korigwene hocha la tête poliment quand elle les croisa et son professeur acquiesça en retour. Alors que Korigwene s’éloignait, elle l’entendit expliquer à son chéri qu’elle était une de ses étudiantes. Cela la fit sourire d’imaginer cette vieille chouette en train de profiter du beau temps au bras de son galant.
 
   Tout en bas de cette rue fortement inclinée, elle arriva à l’entrée du parc impérial, véritable forêt au cœur même de la cité. En cette journée particulièrement chaude, celui-ci était fortement peuplé. Les promeneurs habituels y croisaient les curieux en quête de fraîcheur et les couples d’amoureux se promenant main dans la main. Korigwene surpris un garde de la ville conter fleurette à une marchande de fruits exotiques. Elle quitta le sentier pour se diriger vers les abords du fleuve. En face d’elle sur l’autre rive, l’espace était occupée par les artistes peintres exerçant leur talent à immortaliser le parc. Elle songea qu’elle était venu souvent faire une sieste tranquille ici, sous la protection d’un grand chêne tranquille qu’elle affectionnait, écoutant le bruit tranquille de l’eau et observant les peintres débutants qui tentaient peut être de peindre cette inconnue rousse dormant sous les arbres.
 
   Elle prit de sa poche un morceau de lin dans lequel était dissimulé de l’Herbe-à-Fey. Elle sortit également un fin tube de métal ordinairement réservé à l’alchimie qu’elle bourra d’herbe puis qu’elle alluma grâce à sa Pierre d’Etincelles, une invention magique très pratique et communément utilisée dans les riches cités. Aspirant voluptueusement la fumée, elle laissa son esprit s’enivrer des essences féeriques prodiguées par cette herbe magique.
 
   « Alors, que vais-je faire… »
   Le paquet délivré par Armantin lui revint à l’esprit. Elle l’avait oublié dans le laboratoire de Boerus, sur le banc.  « Tant pis, j’irais le chercher ce soir. » Elle souffla la fumée parfumée qu’elle venait d’inhaler et tenta de former des cercles dans l’air avec. Sur le fleuve, une noble dame faisait une promenade confortablement installée dans une barque, protégée du soleil par une fine ombrelle. Un jeune homme en livrée de serviteur ramait avec ardeur pour avancer. Sans doute cela etait dû aux effets secondaires de l’herbe, mais voir peiner ainsi le jeune garçon pour satisfaire sa maîtresse la fit éclater de rire.
 
   Le soir alors qu’elle rentra chez elle, Korigwene fut interpellé par Skem, l’herboriste qui tenait l’échoppe au dessus de laquelle elle résidait.  
   « Quelqu’un du covenant a déposé ceci pour toi. »  
   Et il lui tendit son paquet. Korigwene le remercia et grimpa chez elle.  
   Elle habitait une modeste chambre au plancher de bois grinçant, juste sous les combles. L’endroit était petit mais l’unique fenêtre donnait sur le fleuve et le parc. La vue magnifique, le doux bruissement de l’eau et la fraîcheur parfois si recherché à Karador l’avaient persuadé lorsqu’elle avait visité l’endroit. Elle se laissa tomber sur son lit. A coté de celui-ci, une table de nuit supportait un petit arbre nain qu’elle avait acheté à un marchand Eldryn. A l’autre bout de la pièce se trouvait un bureau de travail qui était déjà la lorsqu’elle s’était installée. Un courant d’air passa par la fenêtre et fit frémir les parchemins qui s’y trouvait. L’un deux roula sur le bureau et tomba par terre.
 
   Skem frappa à la porte. Elle se leva pour aller ouvrir. Le jeune artisan, bien qu’un peu plus âgé qu’elle, avait gardé une silhouette d’adolescent. Il avait de magnifiques cheveux noirs soyeux qui encadrait son visage bronzé. Débarrassé de ses vêtements de vendeur, il portait à présent une chemise blanche et un pantalon noir ample. Dès qu’elle ouvrit, Skem s’approcha et lui vola un baiser. Elle l’attrapa par la chemise pour l'embrasser à son tour, l’attirant dans la chambre. Puis elle ferma la porte.
 
   Tard dans la nuit, tous deux étaient assis sur le toit, contemplant les lumières nocturnes de la ville. Sur le fleuve, un navire marchand arrivait à destination et l’équipage s’activait à baisser la grande voile. Plus loin, les eaux se séparaient en deux pour encercler le palais de l’empereur construit sur un îlot rocheux. Un grand pont le reliait à la cité, une construction si massive que des échoppes, des restaurants et mêmes des habitations étaient bâtis dessus. Une fête devait sûrement y avoir lieu car cette nuit, le palais de pierres rouges de l’empereur Orilan troisième du nom brillait de mille feux. Au-delà, on apercevait les eaux miroitantes de la baie.
Skem et Korigwene échangeaient tout à tour des bouffées d’Herbe-à-Fey.  
 
   « Tu devrais accepter », finit par dire Skem pour briser le silence.
   « Je ne sais pas encore…l’idée me tente bien mais c’est quitter tout ce que je connais.
   - Et alors ? Sais-tu combien d’étudiants payent pour visiter des ruines de la Guerre Sainte ?
   - Les hommes sont bien tous les mêmes. De vieilles tombes poussiéreuses, des squelettes desséchés ? Et après ?
   - Je dirais plutôt l’attrait du mystère, l’appel de l’aventure et l’excitation de la découverte. »
 
   Skem repris le tube d’herbe et en tira une longue bouffée. Fixant les étoiles dans la nuit claire, il exalta longuement la fumée.
 
   - Quand même, imagine que le vieux ai raison et que le changement réveille ton don. Qu’est ce que tu perds à lui faire confiance ?
   - Et toi ? Tu ne serais pas triste de me voir partir ?
   - Oh si bien sur, … jusqu’à ce qu’une autre étudiante vienne louer ta chambre.
   - Mais je rêve, quel goujat ! »  
 
   Elle le poussa et Skem perdit soudainement l’équilibre. Il glissa sur le coté et roula sur le toit en pente.  
 
   « Attention ! » cria Korigwene tandis qu’elle tenta de le rattraper.  
 
   Glissant du toit, Skem tomba dans le fleuve  comme une pierre, quelque dix mètres plus bas. Inquiète, Korigwene s’approcha du bord et avec soulagement, elle le vit remonter à la surface en barbotant.  
 
   « Je crois que je vais accepter en fait, puisque notre relation est comme ainsi dire, tombée à l’eau ! »
 
       ***
 
   Trois jours plus tard, elle était accoudée au rebord de La Vierge à l’épée. Le navire quittait la baie de Karador alors que le soleil se levait. Tranquillement installée contre le bastingage  elle ouvrait enfin son colis, découvrant une lettre à son nom et une petite boite en bois entourée d’un ruban rouge.
 
  Ma très chère et tendre Kory,
 
   nous te souhaitons un très bon anniversaire. Nous espérons tous que tu te porte bien. Ta tante Lisera t’embrasse très fort. Ton petit cousin grandit très vite et il a hâte de jouer de nouveau avec sa cousine préférée. J’espère que tu prendras le temps de nous rendre visite cet été.
 
   A cette intention ton père et moi-même avons organisé pour la célébration du solstice une petite fête, afin que tu rencontre le jeune Aucquebert. Fils d’un riche fermier, il cherche une épouse cultivée pour tenir sa maison et lui assurée une solide descendance.  
Puisque la magie semble t’avoir refusé, ton père et moi avions pensés que….
 

 
   Korigwene n’acheva pas sa lecture. L’instant d’après la boîte et la lettre voguaient eux aussi sur les eaux.  Derrière elle, la cité de Karador située au fond de la baie s’éloignait lentement. Le soleil levant projetait sur les eaux un miroitement argenté et la cité prenait alors une allure féerique sous les couleurs chatoyante de l’aube. Plusieurs passagers s’approchèrent du bord afin de profiter de la vue. Les marins, trop blasés de ce spectacle, s’activaient à manœuvrer le navire qui quittait les eaux calmes pour s’engouffrer sur la haute mer. Korigwene décida qu’elle ne se retournerait pas pour admirer la capitale une dernière fois.
 
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Et voila :) Je pense alterner d'une part les chapitres sur Alderick et d'autre part ceux sur Kory jusqu'à leur rencontre. Le prochain chapitre s'appelle 'Bapteme du Sang'  :sol:

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Marsh Posté le 01-07-2004 à 14:39:17    

J'adore et je prevois de grandes choses pour nos deux M....
euh nos deux pas de chance....

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Marsh Posté le 01-07-2004 à 14:59:10    

Deidril a écrit :

Si ces écrits vous ont inspirés une réaction ( bonne ou mauvaise ), prenez le temps svp de répondre afin que je sache...l'incertitude est la pire des peur quand j'écris.


 
Deux mots: très bon.
 
Le style est parfois hésitant, il y a de nombreuses maladresses, mais le potentiel est incontestablement là. Tu as réussi le plus dur sur ce genre de forums, à savoir me donner envie de savoir la suite.
 
Histoire de rentrer un peu plus dans le détail, tu devrais retravailler le début, jusqu'à l'arrivée de la princesse vampire. J'ai failli décrocher à ce moment-là. En effet, tu livres un style très descriptif, sans la moindre émotion, complètement détaché de ton histoire. Il faut absolument que tu revoies ça. Même si les gardes sont inhumains, ils ont probablement des réactions face à cette étrangeté. Et ainsi de suite.

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Marsh Posté le 01-07-2004 à 15:23:59    

Tout le monde semble avoir eu des difficultés à entrer dans le récit, alors je pense vraiment réécrire le début au plus vite, dès que j'en aurais terminé avec le chapitre 3. D'ailleurs j'ai pas mal de difficulté avec celui-ci. Il s'agit de la première bataille ( Baston !! ) et je trouve pour l'instant le résultat assez décevant. J'ai utilisé jusque la un style assez descriptif et les descs  de mon combat me semble assez terne... en même temps tout décrire rendrait le combat insipide si chaque coup d'épée s'étalait sur 1 paragraphe alors je cherche le bon milieu pour l'instant.
 
Comme je ne suis pas la ce week end, ca n'aura pas avancé d'ici lundi soir mais je monte dans le train avec le dernier Eddings et le dernier de Katherine Kurtz ( ca fait des ANNEES que j'attendais qu'elle sorte un nouveau livre  :love: ). Peut-être que mes auteurs favoris me livreront leurs secrets.  
 
En tout cas merci d'avoir lu mon histoire jusque là, je vais faire des efforts pour livrer le recit d'un combat épique  :sol:  
 
 :bounce:


Message édité par deidril le 01-07-2004 à 15:27:35
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Marsh Posté le 01-07-2004 à 17:37:43    

Deidril a écrit :

Voilà maintenant le chapitre un, et l'entrée en scène du premier personnage mâle (  ;) ):
 
(...)
Voilà, c'est ici que s'achève le premier chapitre :) J'espère qu'il suscitera du bon temps, des réactions et plein de commentaires.


 
Lu.
Même chose que pour le prologue. Tu as un don pour les descriptions, mais elles sont à mon sens trop poussées au début. Tout est au discours indirect, ce qui finit par rendre la bataille de boules de neige et globalement le premier passage assez indigeste. Par contre, dès le moment où le vent réveille ton héros, ça devient très sympathique.
 
Le style est sympa, le vocabulaire agréable et varié. Quelques fautes de grammaire mais rien de grave. L'histoire donne envie de savoir la suite, même si le cliffhanger, à mon avis, est un peu pauvre et convenu.
 
Bref, j'aime beaucoup. Quel âge as-tu, sans indiscrétion, et est-ce ton premier essai ?

Reply

Marsh Posté le 01-07-2004 à 17:46:08    

Grenouille Bleue a écrit :

Lu.
Même chose que pour le prologue. Tu as un don pour les descriptions, mais elles sont à mon sens trop poussées au début. Tout est au discours indirect, ce qui finit par rendre la bataille de boules de neige et globalement le premier passage assez indigeste. Par contre, dès le moment où le vent réveille ton héros, ça devient très sympathique.


 
C'est aussi ce que je me dis parfois quand je vois le rapport description / dialogue. Je me souviens avoir zappé pas mal de page de tolkien pour cette raison alors je vois pas pourquoi les gens ne zapperaient pas les miennes surtout que je n'ai pas sa prose. C'est une des choses que j'essaye de travailler :(
 

Grenouille Bleue a écrit :


Le style est sympa, le vocabulaire agréable et varié. Quelques fautes de grammaire mais rien de grave. L'histoire donne envie de savoir la suite, même si le cliffhanger, à mon avis, est un peu pauvre et convenu.
 
Bref, j'aime beaucoup. Quel âge as-tu, sans indiscrétion, et est-ce ton premier essai ?


 
Pour l'écriture : oui c'est ma premiere tentative. Pour la conception des histoires : j'ai X années d'expérience pro où j'ai assisté des auteurs de roman et de BD dans des écritures pour des jeux videos.
Quand à mon age, euh... on va dire 30+ :)


Message édité par deidril le 01-07-2004 à 18:37:34
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Marsh Posté le 06-07-2004 à 09:30:37    

Allezzzzzzzzzzz la suite!!!!!!!!!!! Bon sang ;)

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Marsh Posté le 06-07-2004 à 09:46:32    

Je l'ai terminé hier soir. Je posterais le chap3 pendant ma pause miam ce midi :)

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Marsh Posté le 06-07-2004 à 11:40:26    

J'ai hate :) :)

Reply

Marsh Posté le 06-07-2004 à 12:31:47    

Et voila le chapitre 3. J'ai pris le parti de mettre en scène des ennemis vraiment mauvais et des combats vraiment violents. Vous medirez ce que vous en pensez à la suite de la lecture de ce chapitre.
 
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                            Les larmes du spectre - Chapitre 2
     
                            Baptème du sang
 
   La route traversait une forêt de sapins. Les arbres toujours enneigés formaient comme deux murs de silhouettes noires en cette froide soirée printanière. Le soleil déclinant avait disparu derrière les arbres depuis plusieurs heures, bien que de fugaces rayons parvenaient parfois jusqu’aux voyageurs. Cela faisait maintenant trois jours qu’Aldérick et Essekar avaient quitté Sandarel et la Fraternité.  
Aldérick s’était imaginé qu’ils partiraient simplement sans adieux larmoyants mais Hirago en avait décidé tout autrement, organisant une petite réception à leur intention.  
 
   A l’instant de leur départ, ils avaient vu l’ensemble du campement se rassembler et leur souhaiter bonne route. Aldérick pensait voyager léger mais c’était sans compter les cadeaux que chacun avait préparés. Hirago lui avait offert un arc qu’il avait fabriqué dans le plus grand secret. Le chasseur lisait en Aldérick comme dans un livre ouvert et avait pressentit que le jeune homme partirait une fois son initiation terminée. Aussi s’était-il attelé secrètement à la fabrication d’un arc en bois d’ébène de la plus grande qualité.  
 
   « C’est sans doute l’arc dont je suis le plus fier » avait-t-il confié à Aldérick en lui remettant.  
 
   Très ému, celui-ci prit l’arc que lui tendait le chasseur. Le bois noir poli était magnifique, lisse au possible. Gravés à chaque extrémité de l’arc, Aldérick remarqua sur l’arc des arabesques argentées finement ouvragé.
 
   «  Je ne sais pas quoi dire vraiment, c’est une pièce magnifique.
   - Je pense que tu peux essayer merci.
   - Merci ! » Et Aldérick serra fraternellement dans ses bras son ancien professeur.  
   «  N’oublie pas le carquois et les flèches car tu pourrais en avoir besoin. »
 
   Puis se fut au tour d’Essekar de recevoir des mains de Fenbran une cotte de maille ajustée à sa taille ainsi qu’un casque en fer rembourré de cuir. Ne pouvant résister, Essekar enfila la cotte et mis le casque sur sa tête.
 
   « Alors de quoi ai-je l’air ? »  
   - Je ne sais pas mais tu sens le chaudron rouillé » mentit Aldérick.  
 
   Le grand gaillard avait fière allure une fois équipé. L’immense cotte de maille lui couvrait les épaules et descendait jusqu’au genoux. Tout d’un coup il n’était plus un jeune homme mais un guerrier. Aldérick ne s’imaginait pas combattre avec autant de poids mais pour Essekar cela n’avait pas l’air d’être plus encombrant qu’une chemise.  
 
   «  A ceci il ne faut pas oublier le petit matériel pour les réparations, précisa Fenbran. Une pince, un sac d’anneaux de rechange et beaucoup de patience.
   - Mais je ne saurais jamais la réparer… »
 
   Fenbran éclata de rire.
 
   « Tu auras l’occasion d’apprendre, fait-moi confiance. »
 
   Doleas donna une sacoche de cuir à Aldérick, précisant que
   « Ceci n’est pas pour toi mais pour Jenki. Ces baumes soigneront ses blessures aussi bien que les philtres d’une rebouteuse. Mais attention, ils ne fonctionnent que sur les chiens. Ne les essaye surtout pas sur toi ! »  
 
   Draugrim, le forgeron du campement, leur avait ensuite offert des pierres à affûter ainsi que de l’huile pour nettoyer la graisse des armes et empêcher que le gel ne bloque les lames dans les fourreaux. Chacun des membres de la Fraternité y était allé de son étreinte, de son conseil et de son cadeau de départ.  
 
   Chargés comme des baudets, les deux amis se demandèrent comment ils allaient pouvoir transporter tout cela. Finalement, Maître Sandarel leur présenta Brunette.  
 
   « C’est une jeune mule qui n’en fait qu’a sa tête. Je ne me sens pas d’humeur de lui apprendre les bonnes manières aussi je vous la confie. Une tente neuve, quatre sacs de provisions et quelques autres affaires sont déjà empaquetés dessus. »
 
   Sandarel donna une accolade à chacun en signe d’au revoir.
 
   « Souvenez-vous que vous serez toujours les bienvenus. J’ignore ce que vous réserve ce retour aux sources mais n’oubliez pas que vous appartenez à la Fraternité de l’Acier. Comme je pensais convoyer vers Arkadyr pour l’été… »
 
   La nouvelle suscita la liesse générale. Arkadyr, une cité état appartenant à la Ligue des Villes Libres, était le quartier général de la Guilde des Mercenaires et en tant que tel, le paradis des combattants. Tavernes, arènes, armureries, forges, terrains d’entraînements, spectacles et compétitions permanentes, toute la ville était dédiée à la gloire de l’art du combat et de la guerre. Certaines des plus grandes compagnies de mercenaires y avaient leur quartier général et les plus petites ou les fraternités errantes comme celle de Sandarel pouvaient louer des baraquements entiers pour une saison, voir des années.  
 
   « …, vous pourrez donc facilement nous retrouver si quelque problème devait survenir dans votre quête.  Rappelez-vous que votre combat est désormais le nôtre, pour le meilleur comme pour le pire. Je me sentirais personnellement insulté que vous ne veniez pas quérir mon aide si le besoin s’en faisait sentir. »
 
   Aldérick et Essekar s’étaient ensuite engagés sur la route en direction de Roquefer. Alors qu’ils s’éloignaient, Aldérick ne pouvait s’empêcher de repenser aux révélations que le Maître avait faites. Il avait détecté en lui le Don de la Radiance, le don propre aux combattants dans l’âme. Aldérick n’avait pour toute connaissance de la Force d’Ame que les descriptions romanesques des Chroniques d’Albior. Il n’avait donc aucune idée sur la manière de s’en servir. Le maître d’armes l’avait alors rassuré…
 
   «  Le moment venu, ton instinct te dira ce que tu dois faire. La Force d’Ame t’habite depuis ta naissance et je suis sur qu’en de mainte occasion tu l’as inconsciemment utilisé. Même si toi tu ne la reconnais pas encore quand elle se manifeste, ton cœur et ton esprit savent naturellement en tirer profit. Laisse-toi guider par tes perceptions et tout ira bien. »
 
   Tout ira bien ! Aldérick tentait de s’en persuader car il était réellement angoissé à l’idée de vivre un Eveil. Cela pouvait survenir maintenant, demain, dans un mois ou bien jamais. L’extraordinaire confiance qu’il portait aux leçons du vieil homme apaisait ses angoisses, aussi se répétait-il simplement « Tout ira bien ! »
 
   Il s’engagèrent donc sur la route, saluant une dernière fois les membres de la Fraternité de l’Acier, puis ils s’en allèrent. Hirago les regarda s’enfoncer dans la sombre forêt de conifères qui recouvrait quasiment tout Fortavent. Une sensation de malaise s’en dégageait lorsqu’il l’observait. Il ne savait pas pourquoi mais observer cette forêt lui procurait un frisson et cela ne lui disait rien de bon.  
 
                            *
                           ***
 
   La première journée de voyage fût l’occasion pour Essekar, particulièrement impatient de revoir son village natal, de décrire les mille détails chaleureux dont il se souvenait. Impassible, Jenki trottinait à coté d’Aldérick qui écoutait son ami tout en tenant les rennes de Brunette.
 
   « …mais le plus agréable, c’est quand l’heure du travail s’arrête. Les mineurs ressortent de la montagne, accueillis par l’odeur du repas. Roquefer, voit-tu, est avant tout une communauté. Aussi toutes les femmes préparent-elles le soir un repas commun à tout le village. Sans cette générosité, je serais moi-même mort de faim lorsque je suis devenu orphelin. Les plus anciens racontent alors des histoires du passé. Le scribe qui tient les comptes du village… comment s’appelait-il déjà… »
 
   Aldérick ne se lassait pas d’écouter son ami lui décrire son village natal. L’expression d’Essekar faisait plaisir à voir et sa bonne humeur l’avait conquis. Aldérick, alléché par les descriptions, avait hâte d’atteindre Roquefer et de profiter de l’hospitalité et de la convivialité que Essekar décrivait.
 
   « …mais le souvenir que je chéris le plus - et tu va peut-être trouver ca idiot - c’est un après midi d’été. Ce jour là, j’avais accompagné Fianna, la fille du berger, garder le troupeau. Il faisait un temps magnifique et nous nous sommes allongé dans l’herbe près d’un ruisseau. Ses cheveux blonds étaient comme de l’or sous le soleil… »
 
   Aldérick souriait à son ami alors qu’il lui contait son premier amour, une histoire très innocente entre deux enfants. Essekar avait une voix puissante et claire qui donnait à ses récits une force incroyable. Aldérick ne doutait pas un instant que son ami aurait pu devenir conteur si les circonstances avaient été différentes.
   
                         *
   ***
 
   L’excitation du départ avait transporté les deux guerriers mais les traversées de grandes étendues enneigées avaient eu raison de leur endurance. Le premier soir, ils avaient eu à peine la force de monter leur tente. Dès qu’ils furent allongés, le sommeil les enveloppa aussitôt.
 
   « Pourquoi c’est toujours toi qui joue Albior ! »
 
   La voix de Hagen ramena Aldérick des années plus tôt.
 
   En cet agréable après midi d’été, sur les bords du lac des Hauts Vents, quatre jeunes enfants reconstituaient une antique bataille. A la neige de l’hiver avaient succédées les prairies verdoyantes parsemées de tâches jaunes, rouges et blanches. Chargées de pollen, les fleurs des montagnes déchargeaient dans les douces brises un parfum enivrant. Prêt du rivage, la carcasse noircie et moussue d’un vieux bateau devenait pour l’occasion le bastion des Douze Légions infernales.
 
   Aldérick se plaignait auprès de son frère de ne jamais avoir le beau rôle. Son frère incarnait toujours le Champion de Valarian dans les batailles pour la sauvegarde du monde. En bon serviteur, Valdrek se voyait assigné celui de Kalaan Dar Argor, le commandant suprême des douze légions que constitua Andragoras pour s’emparer du monde. Déguisé d’une cape noire rapiécée et d’une grossière épée de bois, le fils du forgeron incarnait donc celui que les Chroniques appelaient le Mangeur de Lumière.  
 
   Assise sur une poutre de l’embarcation détruite, Freya attendait, une casserole sur la tête et un bâton dans la main. Seule élément féminin du petit groupe, elle avait le privilège de jouer Astrielle, la championne de l’Archange Andramael.  
 
   « Nous sommes deux et donc vous devez être deux ! raisonna Hagen. Tu dois choisir celui des Douze que tu veux jouer.  
   - A quoi cela servira-t-il puisque de toute façon on doit te laisser gagner ?
   - C’est vrai ca, renchérit Valdrek. Pourquoi est ce qu’on doit toujours perdre !
   - Parce que ca c’est passé comme çà. Bon, commençons la bataille. Aldérick, tu joueras Ogbar, le Roi du Feu Obscur.  
   - Mais je joue toujours Ogbar ! On pourrait changer pour une fois. Freya peut jouer la Reine Noire et moi Saint Tenadir.  
   - Je m’ennuie, fit Freya.
   - On verra la prochaine fois. Pour aujourd’hui on reste comme d’habitude » conclut Hagen.
 
   Et la guerre commença. Hagen et Valdrek s’affrontèrent, échangeant des coups factices de leurs épées en bois. Mimant une blessure, Hagen mit un genou à terre.
 
   « Je t’ai vaincu, champion de Valarian. Maintenant je vais m’emparer de ton monde pour le soumettre au bon vouloir de mon maître.
   - Jamais démon ! Jamais Valarian ne laissera les ténèbres envelopper la lumière des hommes, récita Hagen.
   - ….
   - A toi Freya !
   - Je t’apporte, oh champion, la Lame de Lumière Flamboyante, Libertine.
   - Hevertyne ! soufflèrent les trois autres
   - ... Hevertyne. Chasse les ténèbres et ramène l’espoir dans le cœur des hommes » finit Freya, contente d’en avoir terminé avec son passage.
 
   Hagen se saisit du morceau de bois que lui tendait sa petite sœur, et le brandit.  
 
   «  Voit engeance du mal, voit celle qui te pourfendra, et disparaît ! »
 
   Valdrek, touché mortellement, s’écroula. Aldérick s’interposa entre Hagen et le bateau, traînant Jenki avec lui.  
 
   « Jamais je ne te laisserais fermer la Porte, champion. Redoute le Feu Obscur car personne ici bas ne résiste à sa morsure, même l’archange dont tu porte l’arme. Je brûlerai ton corps et Morglor s’en régalera. »
   
   Morglor, ou plutôt Jenki, peu enclin à participer à la joute oratoire, se coucha  mollement aux pieds d’Aldérick.
 
   « Non point, Roi du Feu Obscur, Non point car le secret de ton molosse, je connais ! »
 
   Hagen lançant Hevertyne au loin et Jenki bondit pour aller chercher le morceau de bois.
 
   «  Que la porte soit fermée, que la clef soit forgée et que le passage soit scellé. »
 
   Hagen transmis alors solennellement à sa sœur un petit bout de fer symbolisant le Sceau d’Astrielle.
 
   « Fuit, douce Astrielle, fuit tandis que je contiendrais l’ire des Douze. Fuit, et cache le Sceau afin que à jamais notre monde soit sauf.
 
   Sans grande conviction, Freya s’empara du sceau et s’éloigna.
 
   « Fuit donc, femme enfant, continua Aldérick, fuit donc mais aussi grand que soit ton monde, il sera toujours trop petit pour te cacher d’Ogbar, car à jamais je te pourchasserais. Devant mes pairs et mon maître je fais le serment que je te suivrais, que mon fils te traquera, que ma famille te harcèlera, de génération en génération si besoin est. Devant mes pairs et mon maître je fais le serment que le Feu Obscur te consumera et que le Sceau je détruirais. »
 
   Valdrek, s’éloigna à quatre pattes pour réapparaître au milieu de l’embarcation détruite.  
 
   « Les murs d’Ordrahyr se referment à nouveau sur moi, déclama Valdrek, jouant maintenant le rôle d’Andragoras. Sur mon trône d’obsidienne je retourne. Mais avant de partir ce monde je maudis. La venue de mon Messie je prédis. Il dressera le fils contre le père, le frère contre le frère et répandra la damnation éternelle. Il préparera mon retour et ce jour là, aucun Sceau ne protégera les hommes de mon courroux. »
 
   Finissant son texte, Valdrek disparut dans la carcasse du bateau, pour reparaître vêtu d’une cape blanche au coté de Hagen.
 
   « Les coups des Douze m’ont transpercé. De mille blessures je me meurs. C’est à toi, fidèle Tenadir, de rassembler les hommes et de reconstruire ce monde. C’est à toi, mon ami, de les préparer pour la venue du Messager d’Andragoras.  
   - Ton noble combat je conterais, brave Albior. Repose en paix car ta quête je perpétuerais. L’homme ne sera pas démuni lorsque les heures sombres viendront à nouveau. Repose en paix mon ami. »
 
   Valdrek détacha sa cape blanche pour en recouvrir Hagen, allongé immobile par terre.
   « C’est finit ? demanda Freya.
   - Oui, les Chroniques se terminent ainsi, expliqua Aldérick. Albior meurt tué par les Douze et ceux-ci s’endorment pour l’éternité car ils ne peuvent survivre sans la présence d’Andragoras. Astrielle s’en va en un lieu inconnu pour dissimuler le Sceau, poursuivit par les descendants d’Ogbar et jamais on ne la revit. Saint Tenadir revient parmi les hommes comme le seul survivant des Paladins de Valarian pour fonder le Saint Empire.
   - Pourquoi tu me racontes la fin ? Maman n’avait pas terminé la lecture.  
   - … »
 
   Le rêve se fit lointain dans l’esprit d’Aldérick, comme des sons étouffés. Encore endormi, il sourit cependant au dépit de Freya d’avoir été spolié de la surprise d’entendre la fin des Chroniques de la voix de leur mère. Les brumes du sommeil profond l’enveloppèrent, chassant les songes et les souvenirs. Ce fut Essekar qui le réveilla alors que le soleil commençait à pointer à travers les arbres, réchauffant la neige gelée par la nuit et chassant les ombres de la forêt.
 
                               *
                              ***
 
   Le deuxième jour, passablement fatigués et courbaturés, les deux amis avaient ralenti l’allure. Les souvenirs d’Essekar s’étaient épuisés dans la matinée et Aldérick se sentait peu enclin de renvoyer la pareille. Pour autant qu’il s’en rappelle, il ne restait de Fortavent que des ruines et ne voulait pas détruire la bonne humeur d’Essekar par de macabres récits. Seul Jenki semblait garder sa vitalité. Le chien avait même surpris son maître en dénichant un lapin des neiges dont ils avaient festoyé. Conformément à ce que Doléas lui avait enseigné, Aldérick fit attention de ne pas donner d’os à Jenki car ceux des lapins et autres lièvres se brisent en éclats, blessant parfois mortellement les canidés. De nouveau sur les terres où il avait vécu, le vieux molosse rajeunissait et semblait retrouver ses marques.  
   Au quatrième jour, Essekar avait regagné sa vitalité de la première heure. Il trottinait, encourageant Aldérick à forcer l’allure. Mais quelque chose troublait Aldérick. Depuis leur départ ils n’avaient croisé absolument personne alors que dans ses souvenirs Roquefer était une petite ville riche grâce aux fruits de la mine, attirant les marchands itinérants, les colporteurs ainsi que des travailleurs saisonniers. Une petite caravane convoyant le précieux minerai était passé la semaine dernière par le campement de la Fraternité, les rassurant quant à la vitalité de la petite bourgade. Mais depuis il ne se souvenait pas d’avoir vu un quelconque voyageur sur la route. Quelque chose de plus impalpable le perturbait. La forêt elle-même lui paraissait étrangère, pour ne pas dire malsaine. Un sentiment indéfinissable le gênait. Il savait qu’un détail le troublait mais son esprit n’arrivait pas à le cerner. Il n’eut pas le temps d’approfondir son analyse alors qu’Essekar pointa le doigt devant eux.
 
   « Nous y sommes presque ! C’est ici que je venais ici pêcher lorsque j’étais petit. Je m’asseyais sur ce rocher là. Roquefer est de l’autre coté de la rivière, après ce bosquet de sapins. …J’aperçois de la fumée, la forge doit être en activité… »
 
   Et pour cause.  
 
   Contournant le dernier bosquet de sapins qui leur dissimulait la vue, les deux jeunes gens pouvaient voir la grande forge de Roquefer se consumer dans les flammes. Sous les yeux horrifiés d’Essekar, des brasiers gigantesques dévoraient la ville toute entière.  
 
   Un étroit défilé entre deux parois rocheuses menait à la porte fortifiée de la petite ville. Le passage était juste assez large pour permettre à une charrette de passer. Un mur de pierre surmonté d’un rempart protégeait l’accès à Roquefer, laquelle occupait un cirque rocheux dans la montagne. Les grandes portes en bois étaient abattues et plusieurs grandes tâches de sang salissaient la neige. Aldérick nota qu’aucun corps n’était visible.  
 
   « C’est impossible ! » pleura de rage Essekar.
 
   Aldérick ne trouvait pas ses mots.
 
   Un cri de femme parvint jusqu’aux deux jeunes guerriers. Ils se précipitèrent vers la ville, Jenki sur leurs talons.
Aldérick, plus rapide que son compagnon, déboula dans une grande avenue en proie au chaos de l’incendie. Juste devant lui était renversée une charrette. Des ballots de tissu coloré et des vêtements féminins jonchaient le sol à coté de vêtements ensanglantés. Sur sa droite une taverne, pauvre bâtiment en bois de sapin, était littéralement dévorée par les flammes.  
 
   De nouveaux cris sortirent d’une échoppe proche. Trois hommes habillés de fourrures traînaient hors de la bâtisse une jeune femme. Les individus avaient le visage enfariné de blanc. Leurs yeux étaient cernés de peinture noire et leurs joues arboraient d’étranges sigles rouge sang. Dans leurs cheveux et dans leurs barbes, Aldérick remarqua de petits ossements qu’ils portaient comme des colifichets.
La jeune femme se débattit et l’un des hommes lui flanqua un violent coup de pied dans l’estomac puis la saisit par les cheveux pour la tirer au milieu de l’avenue. Comme hypnotisé par la violence, Aldérick restait immobile.
 
   Les trois hommes entourèrent la villageoise avec un mauvais sourire. Celle-ci portait une tenue de servante verte et blanche. Son visage et ses longs cheveux blonds étaient noircis de suie et sa joue était marquée d’une vilaine ecchymose ainsi que l’un de ses yeux. Ils se jetèrent sur elle et la mordirent cruellement. Arrachant des morceaux de chairs, les trois hommes dévoraient vivante leur victime tandis que celle-ci hurlait sa douleur et sa terreur. L’un d’entre eux plongea ses doigts dans l’orbite de la jeune femme pour en retirer la substance écrasée d’un œil dont il se délecta. Le deuxième mordant un sein, rabattit la tête en arrière, arrachant un morceau de chair. Le dernier coupait les doigts de la pauvre femme désormais évanouie, dans le but avoué de les ronger.
 
   Essekar rejoignit Aldérick. Celui-ci était paralysé d’horreur. A la vue du festin ignoble, Essekar s’élança vers les cannibales en faisant tournoyer FendLaRoche.
 
   « Immondices ! Vous allez payer vos ignominies ! » cria-t-il.  
 
   Ils se tournèrent vers lui, la bouche dégoulinante de sang. Un doigt humain encore dans la bouche, l’un d’entre eux s’avança pour s’interposer, une épée longue de facture grossière à la main.
 
   « Viande ! Viande ! De la viande pour Kiglor le Rongeur d’Os ! »
 
   Ce n’est qu’au dernier moment que Kiglor compris son erreur en réalisant la masse de métal qu'était FendLaRoche. Il tenta une parade de fortune pour protéger sa tête mais l’espadon d’Essekar brisa net la lame avant de lui défoncer l’épaule avec un craquement d’os écœurant qui fit sursauter Aldérick. Le bras de l’homme fut presque arraché par le coup et lorsque Essekar extirpa FendLaRoche de son buste, un flot de sang jaillit. L’homme hurla en tombant en arrière, agonisant.
 
   Les deux autres restèrent interdit devant la brutalité du coup. La vue du corps en charpie de leur compagnon leur fit tourner la tête. Pris d’une frénésie sanguinaire, ils se jetèrent sur Essekar. L’un s’empara d’une lance plantée dans un proche cadavre et l’autre pris dans chaque main une des dagues en os qu’il avait à la ceinture.
 
   « Gorlouk manger toi ! Gorlouk boire sang pour prendre force !
   - Toi bon ! Toi remplir Urgruk et faire roter plein !
   - Immondes animaux ! hurla Essekar, vous allez payer pour ce carnage ! »
 
   Aldérick rejoignit son compagnon et se plaça sur son flanc gauche. Il ne pouvait détacher sa vue du cadavre de l’homme qu’Essekar venait de tuer.  
 
  Nous venons de donner la mort ! Une bête plus qu’un homme mais c’est nous qui l’avons tué !
 
   Les mots résonnaient dans sa tête et il ne parvenait pas à se convaincre de la réalité. Il reporta son attention sur leurs adversaires. Leurs yeux étaient exorbités et gonflés de sang. Leurs corps étaient striés de cicatrices et de brûlure, savamment faite comme autant de reconnaissance d’un rang parmi les leurs. Il leur manquait un, voir deux doigts à chaque main. Ils refoulaient une odeur pestilentielle de chairs pourries. Aldérick se sentit presque défaillir alors qu’il devinait le nombre d’horreurs que ces choses avaient dû perpétuer.  
 
   Face à ces bêtes, mieux vaut la mort que le destin de cette femme.   Aldérick sentit de la sueur couler dans son dos. Les quatre hommes se fixaient les uns les autres, près à réagir.
Essekar bondit en premier. Il éleva son épée et frappa directement la lance de son adversaire, la brisant sous le choc.
 
   « Meurs ! »
 
   En proie à une rage incontrôlable, Essekar abattit FendLaRoche sur la tête du cannibale qui fixait interdit les débris de sa lance sur le sol. La tête de l’homme éclata comme une pastèque trop mure lorsque les seize kilos de FendLaRoche pulvérisèrent la boite crânienne.  
Aldérick, Zéphyr dans la main gauche et Brise dans l’autre, se fendit en avant en même temps que son ennemi. D’un contre sixte parfaitement exécuté, il écarta l’une des dagues de son adversaire puis plongea sa seconde lame dans le torse de celui-ci. Crachant du sang, l’homme se saisit de Zéphyr et tenta de l’extirper de son estomac mais il semblait vidé de toute force et ses doigts glissaient sur l’acier sans parvenir à le déloger. Jenki bondit et le saisit à la gorge, le renversant sous son poids. De sa puissante mâchoire, le molosse lui arracha un morceau du cou.
 
   Aldérick semblait en état de choc, réalisant qu’il venait de tuer son adversaire.  
 
   « Je suppose qu’il n’y avait aucun autre moyen.
   - Ce n’était plus des humains mais des animaux enragés. Tu sais ce qu’il convient de faire lorsqu’un animal est ainsi malade.  
   - Oui, je suppose »  répéta encore Aldérick.
 
   La villageoise gisait inanimée. Aldérick pris une couverture du stock de marchandises renversé à l’entrée de la ville pour en couvrir le corps. Derrière eux, le premier étage de la taverne s’écroula dans un fracas qui les surpris. Les flammes montèrent de plus belle dans le ciel, projetant des braises rougeoyantes sur les alentours.
 
   « Nous devrions voir s’il y a des personnes à secourir,"  fit Aldérick.
 
   Pauvre femme pensa Aldérick. Le vieux souvenir d’un jeune enfant errant dans les ruines de Fortavent lui revint en mémoire. Secouant la tête pour chasser les images, il suivit Essekar qui s’élançait dans l’avenue principale de Roquefer.
 
   Le même spectacle de désolation se répétait partout dans la petite ville. Des maisons étaient partout la proie des flammes. Des corps jonchaient les rues, déchiquetés, éviscérés et démembrés. Hommes, femmes, enfants et animaux, personne ne semblait avoir survécu à la barbarie de l’attaque. A la plupart des victimes il manquait des doigts et les yeux. Ne pouvant contenir davantage son dégoût, Aldérick tituba dans un coin pour vomir alors que la rage d’Essekar ne cessait de monter.
 
   Une nouvelle colonne de fumée commençait à s’élever d’un point situé près de la falaise rocheuse à l’opposé de l’entrée de Roquefer.  
 
   « Ca vient de la mine ! » expliqua Essekar
 
   Les deux jeunes gens se mirent à accélérer leur course dans cette direction. Des clameurs commencèrent à se faire entendre.
 
   « Allez mes chiens ! Prenez-moi cette donzelle afin que je m’en régale ! Elle portera ma descendance et je nourrirais alors mes fils nouveau-nés de son sang ! »
 
   Essekar et Aldérick se glissèrent le long d’une maison. Arrivée au coin, ils jetèrent brièvement un regard pour jauger la situation.
 
   L’entrée de la mine, un grand tunnel haut de cinq mètres dans le flanc même de la montagne, était murée en partie par une palissade de fortune faite de bric et de broc. Un amoncellement de tonneaux, de caisses et de chariots formait un ultime rempart défensif derrière lequel étaient embusqués des archers. Une vingtaine de cannibales, vêtus des mêmes haillons misérables que ceux qu’ils avaient combattus, tentait de s’approcher en longeant les parois de la montagne, hors d’atteinte de la vision des tireurs embusqués. Cinq corps criblés de flèches devant la barricade suggéraient la difficulté de l’entreprise. Quatre autres mangeurs d’hommes équipés d’arc court étaient à l’affût d’une cible potentielle, couverts par un chariot renversé. Un cinquième leur donnait des ordres. Plus grand que ses compatriotes, l’homme portait une armure de cuir et de maille. Son visage était dissimulé par un masque de peau humaine attaché derrière la tête par des lanières de cuir. Son crâne était brûlé et ne restait que des filaments de vieux cheveux mêlés aux chairs carbonisés. Il arborait par contre une longue barbe rousse, nattée en de multiples petites tresses. Il tenait dans sa main droite une cognée de bûcheron tachée de sang. De nouveau il intima l’ordre à ses troupes d’attaquer.
 
   « Allez mes chiens de guerre, allez à l’assaut ! Et que vos crocs soient rouge du sang de Roquefer. »
 
   L’un des cannibales qui s’était approché de l’entrée tenta de se précipiter à l’intérieur sous l’impulsion des paroles de son chef, un épieu dans les mains. Une silhouette féminine se leva derrière la barricade, un long arc en main et une flèche prête à partir. Celle-ci siffla dans l’air pour se planter dans sa poitrine et une sixième victime rejoignit les autres cadavres. Les quatre archers embusqués derrière la charrette se levèrent d’un bloc et tirèrent une salve de flèches mais celles-ci ne firent que hérisser davantage la palissade.
 
   « A mon signal, attaquez d’un seul bloc !… Maintenant ! »
 
   Toute la troupe embusquée sur les bords de la mine se précipita à l’intérieur. Le premier rang s’écroula sous la salve de flèches, mais ceux qui étaient derrière escaladaient déjà la barricade, les armes à la main. Comme des loups enragés, ils se jetèrent du haut de la barricade sur les défenseurs, les mordants à la gorge.
 
   « Agissons maintenant ! » intima Essekar.  
 
   Il sortit de l’angle du mur et provoqua celui qui commandait les brigands.
 
   « Eh toi ! Pourquoi ne viendrais-tu pas affronter quelqu’un de ta taille, chien de cannibale ! »
 
   L’homme se retourna pour voir Essekar avancer sans ciller au beau milieu de l’avenue.  
 
   « Pourquoi pas en effet… mais il existe tellement de petits plaisirs dont il faut savoir profiter quand l’occasion se présente. » fit l’homme au masque avec une érudition et une diction qui surpris Aldérick.
 
   « Tirez-moi cet imbécile ! »
 
   Les quatre archers encochèrent leurs flèches alors qu’Aldérick sortit en courant de sa cachette en hurlant un avertissement. Jenki bondit à sa suite ventre à terre en direction des tireurs.  
 
   La première flèche se planta dans l’épaule d’Essekar. La deuxième lui traversa la jambe. La troisième lui frôla le visage, lui déchirant la joue. Lorsque la quatrième se figea dans la poitrine, Essekar tomba à la renverse.
 
   Le roux éclata d’un rire sardonique. Aldérick fonça vers les brigands au mépris du danger, emplit d’une rage qui le rendait aveugle à toute prudence.
 
   Les archers tirèrent une seconde salve. L’une d’entre elle stoppa net Jenki dans sa course et le chien roula sur le sol, une flèche dans le flanc. Haletant, le chien ne bougeait plus.
 
   S’en était trop pour Aldérick qui chargeait maintenant les archers. L’un d’entre eux encocha une flèche, souriant à la cible facile qui courait vers lui. Les autres archers ne prirent même pas la peine de bander leurs arcs, riant et fixant Aldérick pour se régaler du spectacle à venir.
 
   A droite !
 
   Son instinct sauva Aldérick. A l’instant où le projectile partit, il fit un bond de coté et la flèche siffla en passant à un pouce de lui. L’archer hoqueta de surprise d’avoir raté l’immanquable. Aldérick lui planta Zéphyr dans l’œil. L’épée courte ressortit derrière le crâne avec un flot de sang et de cervelle.  
 
   « Bien joué petit homme. »  commenta le chef des brigands. Il empoigna alors de ses deux mains sa cognée, avançant tranquillement vers le jeune guerrier.  
 
  Derrière !
 
   Aldérick se retourna pour parer avec Brise une dague d’os que maniait un des cannibales. Les deux autres, laissant leurs arcs à terre, avaient également dégainé des armes fabriquées dans les ossements de leurs victimes.  
 
   L’image de Jenki mourant sur le sol lui revint en tête.
 
   Il frappa de taille l’un des brigands. Celui-ci interposa sa massue d’os pour parer. Quand Zéphyr la frappa, celle-ci explosa sous l’impact, projetant des éclats qui se plantèrent dans le chariot comme des dards. Continuant son mouvement, Zéphyr trancha net le bras au niveau de l’épaule et tailla l’homme dans le torse si profondément qu’une rivière de sang jaillit derrière et devant, recouvrant littéralement Aldérick.
 
   Les deux autres regardèrent le jeune guerrier hébété. Le géant roux s’arrêta d’avancer. Il aurait juré que l’épée avait brillé quand le jeune guerrier avait porté son terrible coup.
 
   Essekar était toujours au sol, immobile. Les flèches dépassaient de son corps comme autant de blessures potentiellement mortelles. La rage n’en brûla que davantage en Aldérick
 
   « Toi avoir mangé plein pour avoir autant force ! » rugit un des cannibales en attaquant.
 
    Le choc de son épée courte contre Brise lui tétanisa le bras. L’instant d’après son membre tombait par terre alors que Zéphyr traçait un arc de cercle argenté dans l’air. Sans même regarder, Aldérick para l’assaut du dernier ennemi qui tenta de plonger sa dague dans son dos. Se retournant vif comme l’éclair, il lui saisit le poignet. L’homme tentait de se libérer de l’emprise mais il ne pût que hurler quand il entendit les os craquer.  
 
   « La Force d’Ame…» souffla le chef des bandits.
 
   Couvert du sang des mangeurs de chair humaine, Aldérick acheva impitoyablement le dernier en le sabrant. Ses cheveux argentés étaient maintenant rouge de sang, tout comme ses vêtements. Ses épées qui paraissaient si pure lorsque Sandarel les avait exhibées étaient maintenant ruisselante.  
 
   Le roux lança à deux mains son immense cognée en direction d’Aldérick. Celui-ci fit simplement un pas de coté et la hache se figea dans le chariot. Le coup fut cependant si violent que la cognée fendit le bois sur toute la longueur de la remorque. Le chef des cannibales se retourna et se mis à courir aussi vite que lui permettaient ses jambes, oubliant ses hommes qui livraient un combat acharné à l’entrée de la mine. Il ne put faire dix pas avant qu’une vive douleur l’arrêta. Fixant son ventre, il vit le bout d’une épée dépasser ainsi qu’un abondant filet rouge coulant le long de sa jambe jusqu’au sol.
 
   Aldérick retira Brise du dos de l’homme qui tomba à terre. Aldérick le frappa encore, encore et encore, faisant gicler le sang et la chair, tailladant les os, déchirant les viscères.
 
   Derrière lui, la petite troupe de brigands qui n’avait pu investir la barricade fixait le sanglant carnage qui venait d’avoir lieu. Profitant de l’incertitude de leurs adversaires, les villageois de Roquefer retranchés dans la mine escaladèrent la barricade et se jetèrent sur eux, avide de se venger de la destruction de leur ville. Les archers tirèrent les cannibales comme des lapins.
 
   Ceux qui ne furent pas taillés en pièces ou criblés de flèches détalèrent.
 
   Aldérick fixait le cadavre qu’il venait de démembrer et d’éviscérer. Revenant à lui, il se souvint qu’Essekar et Jenki devaient être soigné.  
 
   Pourtant il ne pût faire un pas.  
 
   Son corps ne lui obéissait plus. Ses bras étaient si lourds qu’il lâcha ses armes. Ses jambes étaient si fatiguées qu’il tomba à genoux. L’horrible vision du corps déchiqueté lui souleva le cœur et il ne pût contrôler un vomissement de bile. La tête du roux était encore plus ou moins intacte. Le masque avait été déchiré par un coup d’épée. Le visage, bien que brûlé horriblement, semblait étrangement familier à Aldérick mais il n’arrivait plus à penser tellement la fatigue et les nausées le rendaient malade.  
 
   Avant de sombrer dans l’inconscience, un nom lui revint en mémoire.
 
   Valdrek.
 
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Voilà, c''etait le premier combat ! Il a quand même fallut que je le réécrive 2 fois entièrement sans compter les corrections avant d'avoir un résultat qui me satisfaisait.  
 
Je m'attaque a la suite et a une petite reecriture du prologue pour fluidifier le début.


Message édité par deidril le 30-11-2005 à 14:18:16
Reply

Marsh Posté le 06-07-2004 à 13:18:07    

Bien bien. c'est super vivant. C'est vraiment violent et le passage avec la pauvre fermiere est horrible mais j'aime bien.
 
Par contre j'ai eus un peu de mal a comprendre qui assiegait qui...Meme si j'ai lu rapidement...
 
ENCORE :)

Reply

Marsh Posté le 06-07-2004 à 13:38:51    

Le combat à la mine est assez convaincant. En tout cas j'aime assez la juxtaposition d'une scène calme (le voyage de deux potes émaillé de souvenirs d'enfance) et d'une scène d'action au rythme infernal. Les amateurs d'hémoglobine devraient apprécier. En parlant d'hémo je trouve que la scène de cannibalisme est un peu gore (normal diront certains). Ne serait-il pas préférable de suggérer l'acte plutôt que de le décrire par le menu (sans mauvais jeu de mot :lol: )?
 
Sinon quelques petites remarques en vrac:
 

Citation :

Aldérick ne doutait pas un instant que son ami aurait pu devenir conteur si les circonstances avaient été différentes


 
Tu ne préfères pas ... Aldérick ne doutait pas un instant que son ami aurait pu devenir conteur si le destin en avait décidé autrement.
 

Citation :

« Je suppose qu’il n’y avait aucun autre moyen.  
  - Ce n’était plus des humains mais des animaux enragés. Tu sais ce qu’il convient de faire lorsqu’un animal est ainsi malade.  
  - Oui, je suppose »  répéta encore Aldérick.


 
Cette petite pause philosophique me semble légèrement déplacée. Surtout en ce qui concerne Esskar. Le colosse est de retour à son village et découvre qu'une partie de ses compatriote s'est faite boulotée. On s'attend à ce qu'il entre dans une colère terrible,aveugle, incontrôlable.
 
 

Citation :

Plus grand que ses compatriotes, l’homme portait une armure de cuir et de maille.


 
Ce mot n'est pas à sa place je pense. Plutôt compagnons, comparses...
 
Allez vivement la suite :bounce: . Je pense qu'on aura droit à quelques petites révélations.
 
 
 
 

Reply

Marsh Posté le 06-07-2004 à 13:52:23    

Morpion Cosmique a écrit :

En parlant d'hémo je trouve que la scène de cannibalisme est un peu gore (normal diront certains). Ne serait-il pas préférable de suggérer l'acte plutôt que de le décrire par le menu (sans mauvais jeu de mot :lol: )?
.


 
J'ai hésité vraiment longtemps à l'écrire tel que c'est fait. C'est vrai que G Martin suggere plus qu'il ne decrit quand Gregor et compagnie 's amusent' - et parfois c'est vraiment horrible aussi (la scene où l'aubergiste va le déranger pendant son repas pour dire que sa fille n'est pas une catin : je crois que c'est Arya qui écoute deux soldats raconter des anecdotes ) Si d'autres personnes trouvent egalement ca trop hors-propos pour un roman de fantasy, je pense que je modifierais la scene pour suggérer plutot que de lister le menu :)
 
Je prend note des suggestions pour mes corrections à venir, merci :)
 
Je commence l'écriture du chapitre suivant ce soir.


Message édité par deidril le 06-07-2004 à 13:58:15
Reply

Marsh Posté le 06-07-2004 à 14:41:58    

Perso je ne trouve pas que cette scene soit aussi terrible au contraire elle nous montre vraiment de quoi son capable ces "monstres".

Reply

Marsh Posté le 08-07-2004 à 16:41:59    

drapal :o
 
 
La suite !

Reply

Marsh Posté le 08-07-2004 à 20:56:05    

la suite ! c'est po bien de nous laisser comme ca !

Reply

Marsh Posté le 08-07-2004 à 21:09:09    

ouaip !

Reply

Marsh Posté le 09-07-2004 à 14:20:41    

DocWario a écrit :

la suite ! c'est po bien de nous laisser comme ca !


 
Je laisse pas tomber :) A titre d'info il me faut entre 6 et 10h de travail par chapitre. Je viens juste de terminer le 'raw' du chapitre 4. je dois maintenant passer le grammairator dessus, corriger les incohérences, fluidifier les descriptions trop lourdes etc...Donc vous l'aurez lundi. Peut être avec le 5 si je suis motivé et que ma PS2 refuse toujours de s'allumer...
 

Reply

Marsh Posté le 09-07-2004 à 14:25:48    

Deidril a écrit :

D'ailleurs j'ai pas mal de difficulté avec celui-ci. Il s'agit de la première bataille ( Baston !! )


 
naheulbeuk attitude ???
 
sinon ben une chose a dire : Bravo ! (et merci aussi ...)


Message édité par TiPoussin le 09-07-2004 à 14:26:10
Reply

Marsh Posté le 09-07-2004 à 14:41:55    

Deidril a écrit :

Je laisse pas tomber :) A titre d'info il me faut entre 6 et 10h de travail par chapitre. Je viens juste de terminer le 'raw' du chapitre 4. je dois maintenant passer le grammairator dessus, corriger les incohérences, fluidifier les descriptions trop lourdes etc...Donc vous l'aurez lundi. Peut être avec le 5 si je suis motivé et que ma PS2 refuse toujours de s'allumer...


 
bon courage et tout mon soutient :)

Reply

Marsh Posté le 12-07-2004 à 09:53:02    

Et voilà le chapitre 4, tout chaud tout beau :)
 
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              Chapitre 4
           
             Le Testament d'Astrielle
 
« Voici l’objet en question, gente damoiselle »
 
L’homme posa sur son bureau un coffret plat en acajou poli. Des arabesques dorées enluminaient le bois, encadrant un blason. Celui-ci représentant un ange pourvu de deux paires d’ailes offrant une fine épée à une femme. Trois fermoirs en or maintenaient l’objet clos.  
 
L’homme poussa le coffret en direction de son invitée. Celle-ci avança la main vers l’objet mais son propriétaire garda sa main posée dessus.
La jeune femme fixa alors droit dans les yeux le propriétaire de la boîte, attendant une réaction.  
 
« Le Landsraad et le Saint Empire ont tout à gagner à rétablir de saine relations diplomatiques et je souhaite que cet échange ouvre la voie à de futures négociations »
 
L’intonation qu’il donna au mot échange n’échappa pas à la jeune femme.  Arborant un sourire purement diplomatique, elle sortit une bourse en cuir de sa tunique et la posa à coté du coffret.  
 
« Voici les joyaux de Gurandyr ainsi qu’il était convenu.
- Je ne vous cache pas mon étonnement de savoir qu’ils étaient en possession de l’église de Valarian. »
- En fait, comme vous le savez sûrement, ces joyaux étaient destinés à orner la couronne de l’empereur Shalimar II. Ce que vous ignorez peut-être, c’est qu’ils furent perdus dans un naufrage provoqué par des pirates vers le milieu du huitième siècle au large de Thaelyss. Bien des années plus tard, ils furent retrouvés par l’Inquisition lors du jugement d’un collectionneur accusé d’acquérir et de vendre des objets du culte d’Andragoras. Depuis lors, ils sont demeurés parmi les trésors de l’église. Il n’est que justice qu’ils retournent à leur véritable patrie après plus de deux cents ans d’attente. »
 
Lâchant le coffret, l’homme se saisit prestement de la bourse et l’ouvrit. Seize diamants d’une pureté incomparable tombèrent dans sa main. La lumière se reflétaient sur leurs facettes en se démultipliant. Dans la pièce faiblement éclairée, les gemmes brillaient comme les étoiles du firmament. L’homme en eu le souffle coupé.
 
« Je crois que l’affaire est entendue. »
 
Ranka scruta l’homme avec attention pour essayer de saisir ses émotions.
 
Verlius Dan Armeich puait la duplicité et la convoitise. Il ne faisait aucun doute dans l’esprit de Ranka qu’il avait subtilisé le coffret dans les trésors du Landsraad et qu’il comptait garder les diamants pour son propre profit. L’avarice se lisait dans le regard qu’il portait aux gemmes, tandis que son doigt ganté les caressait délicatement.  
 
Deux semaines plutôt, elle avait remarqué Verlius parmi les chargés de l’administration du Landsraad. Elle avait immédiatement perçut en lui les défauts qui faciliteraient l’acquisition qu’elle souhaitait faire. L’homme portait toujours la même lourde toge de velours précieux que lorsqu’elle l’avait abordé. Ses cheveux blonds étaient rabattus sur l’avant pour dissimuler une calvitie naissante. Les mots échanges, diamants et récompenses avaient capté son attention et il l’avait reçut dans son bureau, situé dans l’aile réservée aux gestionnaires des mille facettes que possède un grand empire comme le Landsraad.
La pièce n’était pas le lieu de travail que Ranka imaginait. Elle s’attendait à un capharnaüm de papiers et de rapports. Elle révisa son jugement sur sa cible lorsqu’elle entrait dans son bureau. L’endroit était spacieux. Le parquet du sol était soigneusement ciré. Une bibliothèque couvrait tout un mur, abritant des séries d’ouvrages méticuleusement alignés par section et par nom. Son bureau était soigneusement rangé, les plumes taillées et prêtes à l’emploi, les encriers remplis d’un noir de nuit, d’un bleu azur et d’un vert sylvestre de cette seule qualité remarquable qui sied aux documents portant le sceau de l’empereur. Deux grandes fenêtres derrière le fauteuil de cuir de Verlius donnaient dans les jardins et inondaient la pièce de lumière pendant les heures de la journée.
 
Cependant en cette soirée où la chaleur accablait plus qu’elle ne réchauffait, celles-ci étaient ouvertes pour prodiguer un peu de fraîcheur. D’ailleurs, Verlius ne manquait pas d’agiter un éventail afin de chasser la moiteur qui recouvrait son visage.
 
Ranka attira le coffret à elle. Elle ouvrit un à un les fermoirs et révéla le contenu de la boîte. Verlius jeta un œil dans sa direction.
 
« J’espère qu’il s’agit des parchemins que vous cherchiez. J’ai consulté un lettré pour décrypter le texte mais ce bon à rien s’est révélé incapable d’en effectuer la traduction. »
 
Ranka observa les documents. Craquelés, jaunis par un millénaire passé dans la boîte, ils étaient recouverts de symboles anciens. Alors qu’elle comptait le nombre de feuillets, Verlius ajouta :
 
« Je n’ai pu donc m’assurer qu’il s’agissait des originaux dès lors qu’il m’était impossible d’en comprendre le contenu. Vous m’aviez expressément averti de votre souhait d’acquérir uniquement ceux-ci mais je ne peux, en toute franchise, garantir leur authenticité.  
- Ils me semblent authentiques. »

Aldariel, Saint patron des lettrés, défenseur de l’unique vérité, accorde moi la Vision.

 
Ranka prononça du bout des lèvres la prière afin que Verlius ne puisse en entendre un seul mot. Elle entendit sa prière se répéter à l’infini autour d’elle en un cœur de voix majestueux et puissant tandis qu’elle se sentit investit de la Force d’Ame divine du saint. Sous ses yeux, les parchemins étaient maintenant auréolés d’une faible aura blanche. Elle enleva ses gants de satin blanc et effleura du bout des doigts le texte. Une douce chaleur se communiqua à elle, l’emplissant de cette béatitude qu’elle connaissait lors des communions les plus sincères.
 
L’aura de la Force d’Ame d’Astrielle ! Si douce et si chaleureuse ! Il ne peut s’agir que de la fameuse correspondance qu’aurait échangé la Championne d’Andramael avec Saint Tenadir. Dissimulée aux confins du monde et cherchant un lieu propice pour cacher le Sceau, la légende veut qu’Astrielle fut visitée par son archange et qu’elle reçut des révélations quant au destin de l’humanité. Elle aurait envoyé ces textes à Tenadir,  alors le Haut Prélat de Valarian et fondateur du Saint Empire. Et aujourd’hui, ces manuscrits légendaires sont enfin en ma possession !  
 
Profitant de la Vision, Ranka observa Verlius et lut en lui les sentiments qu’elle avait devinés. Elle vit le mensonge qu’il avait utilisé pour présenter l’affaire comme un échange de bon procédé en vue d’un rétablissement des relations entre le Landsraad et le Saint Empire. Elle avait désormais la confirmation qu’il n’en était rien. D’une certaine manière, la tournure des évènements l’arrangeait puisqu’elle souhaitait garder discrète la confirmation de l’existence de ces documents.
 
Elle brisa sa concentration et la Vision cessa.
 
« Je pense qu’il s’agit bien des originaux. En ce qui me concerne, vous vous êtes acquitté de vos engagements.
- Et vous des vôtre gente dame, répondit Verlius sans quitter des yeux les gemmes.
- Dans ce cas je vous laisse. Je dois préparer mon retour sur les terres du Saint Empire.  
- Je vous salue, gente dame, et vous souhaite un agréable voyage.
 
Ranka plaça le coffret dans un grand carré de tissu vert et replia celui-ci afin de faire un paquet. Saluant Verlius, elle quitta son bureau d’un pas pressé.  
 
Ces documents révèlent peut-être le destin de notre temps.
 
Ranka tenta de chasser son anxiété et son impatience. Elle aurait très bientôt l’opportunité de les examiner mais pour l’heure, elle se devait de quitter discrètement le palais.  
 
Un long couloir large comme une avenue traversait cette aile. Des dizaines de fonctionnaires de l’empire, des serviteurs portant messages, nourritures, affaires personnelles et autres colis formaient un flot continu de part et d’autre, se croisant devant elle. Des soldats en armure se tenaient au garde-à-vous à intervalle régulier, une hallebarde à la main. Des dignitaires de l’empire passèrent devant elle, dans leurs grandes robes rouges et bleues. Ils étaient escortés de jeunes pages portant leurs effets personnels. Sitôt qu’ils libérèrent le passage, Ranka se faufila dans la foule et elle se dirigea vers la sortie, le coffret soigneusement enveloppé sous son bras.
 
Sortant dans les jardins, une douce brise nocturne vint la rafraîchir. Le ciel était dégagé au-dessus d’elle, offrant un firmament d’étoiles magnifiques. Elle reconnut la Crinière du Lion et juste à coté, le Cœur d’Etilyr, une étoile particulièrement brillante qui indiquait le nord aux voyageurs.
 
Ranka attendit qu’un groupe de fonctionnaire s’éloigna d’elle pour écarter le tissu et révéler le coffret.
 
Oh Ystraelle, Gardienne des Secrets, Témoin des Serments. Que ton aura protège ce coffret du regard des curieux.
 
Celui-ci s’auréola alors d’une légère blancheur. La douce chaleur de la présence divine qui l’enveloppait chaque fois qu’elle procédait à une prière s’en alla et le coffret redevint normal à ses yeux. Elle remis la boîte dans le tissu et s’en alla.
 
Elle traversa les jardins du palais, grands prés bordés de fleurs aux couleurs variées et d’arbres rares. Le chemin jusqu’aux portes du palais se faisait sous le couvert de deux rangées de grands cerisiers eldryn dont les feuilles roses pâles tombaient en cascade, formant sous ses pieds un parterre de pétales du plus bel effet.
 
Un rempart massif de pierres rouges entourait l’ensemble du palais. S’élevant jusqu’à une dizaine de mètres, les murs étaient surmontés d’un chemin de ronde sur lequel Ranka remarqua des arbalétriers. Un court tunnel devant elle traversait la fortification. Au milieu de celle-ci, une dizaine de garde en armure et cotte de maille contrôlaient chaque personne. Elle s’avança jusqu’à eux.
 
Ranka salua d’un hochement de tête les gardes du palais. La bénédiction d’Ystraelle embrumant leurs esprits, les gardes ne réalisèrent pas qu’elle portait un paquet. Le lieutenant en faction lui renvoya son salut et ordonna de la laisser passer.
 
Au-delà des portes elle s’avança sur le Pont des Rois, une construction gigantesque reliant l’île sur laquelle était bâti le palais à la cité de Karador. Erigés à même le pont, les échoppes les plus prestigieuses, les auberges les plus renommés et les guildes les plus en vue avaient ici leur emplacement privilégié, entre le cœur même de l’empire et le reste du monde. Une foule issue de la haute société du Landsraad se pressait dans cette avenue suspendue au-dessus des flots. Ranka se fraya un chemin à travers les serviteurs en livrée, les groupes de jeunes nobles et d’aristocrate en quête d’un lieu de divertissement pour la soirée et les caravanes incessantes alimentant le palais en ressources. Elle s’écarta de la trajectoire d’un carrosse de bois noir tiré par quatre palefrois pour se diriger vers une des auberges. Elle poussa la porte de La Couronne des Rois.
 
L’auberge était réputée pour être la plus cossue et la plus respectée dans la capitale. Une trentaine de tables rondes entourait un pilier central percé de quatre cheminées. La plupart des chaises étaient occupées par des personnes aux vêtements princiers. Elle remarque un homme d’un âge respectable qui leva la main pour attirer son attention et alla s’asseoir en face de lui.
 
« Notre mission est accomplie mon ami. J’ai ce pourquoi nous sommes venus. »
 
L’ami en question, un robuste homme aux cheveux grisonnants, acquiesça. Il portait une chemise à jabot sous une tunique noire brodée d’or et d’argent. Sirotant une liqueur ambrée, il écoutait attentivement Ranka en caressant un court bouc poivre et sel qu’il arborait au menton.
 
« La tractation se déroula ainsi que je l’avais prévu. Il est fort probable que Verlius garde les diamants de Gurandyr pour lui-même, nous donnant ainsi une discrétion bien utile en vérité.
- Je n’aime guère ces méthodes d’une honnêteté douteuse, je ne m’en cache pas. L’idée qu’un avare petit nobliau profite d’une quête sacrée pour s’enrichir ainsi me fait tourner les sangs.
- A chacun sa récompense mon ami. Nous avons obtenu ce soir ce qui va peut-être sauver l’humanité toute entière lorsque… »
Ranka s’arrêta brusquement.
- Nous ne devrions pas parler de ceci maintenant. Gardons cette conversation pour un moment plus propice et un lieu moins peuplé.
- Comme toujours tu es la sagesse même. Dans ce cas profitons de l’excellente nourriture que dispense cet établissement et célébrons l’aboutissement de ces trois années de recherche. »
 
Siegnar acquiesça de  la tête. Levant la main, il interpella une serveuse afin de commander un repas.
 
«  J’ai rendu visite au capitaine Valderena cet après-midi. Nous pourrions embarquer à bord de La Vierge à l’Epée la semaine prochaine afin de revenir à Thaelyss.
- Cela serait forte aise.
- D’autant plus que j’ai entendu des rumeurs fort alarmantes alors que je conversais avec Valderena dans une taverne du port.
- J’ignorais que Siegnar, Paladin de l’Ordre de Saint Albior, prêtait foi aux racontars des marins et des soûlards. »
 
Siegnar stoppa la conversation alors que la servante revint avec le repas. Elle déposa sur la table un long plat d’argent sur lequel reposait un marcassin recouvert d’une onctueuse sauce, accompagné de pommes cuites au vin. Ranka ne se fit pas prier pour découper une large tranche dans la chair tendre. Siegnar la regarda entamer un gros morceau de viande bien juteux, attendant que la servante soit partie pour donner ses informations.  
 
« De quoi s’agit-t-il alors ? demanda alors Ranka.
- Je discutais avec le capitaine de La Vierge à l’Epée afin qu’elle nous réserve cette même cabine spacieuse dont nous avons profité lors de notre venue à la capitale. A une table voisine, un marin tentait d’impressionner des comparses en clamant qu’il connaissait un lieu secret ici même à Karador où se livrait de sanglants combats clandestins afin de divertir la noblesse en mal d’émotions fortes. Cela ne m’aurait pas interpellé s’il n’avait alors affirmé que ce sordide établissement appartenait au tristement célèbre Ramiel. »
 
Ranka s’arrêta de manger, la fourchette suspendue à un pouce de sa bouche.
 
« Ramiel le Scorpion ? »
 
Siegnar confirma d’un hochement de tête que la réponse était positive.
 
« J’ajouterais que Valderena m’a confiée que cette rumeur à propos d’un tel lieu perdurait depuis plusieurs mois. Plusieurs jeunes nobles un peu bavard se seraient vantés en sa présence lors d’une réception de fréquenter cet établissement clandestin. »
 
Ranka reposa sa fourchette d’argent dans l’assiette, un morceau de marcassin encore empalé dessus.
 
« Les Scorpions sont sans aucun doute les pires voleurs et les pires meurtriers que le monde ait jamais connus. Le moindre objet ayant un tant soit peu de valeur peut devenir leur cible. Si par hasard ils apprenaient que nous convoyons ce que tu sais, notre mission pourrait s’en trouver compromise. En fait, s’ils venaient à savoir, je crois que nous serions promptement éliminés. »
 
Siegnar ne pu qu’approuver sa camarade.
 
« Je n’ai aucune confiance en Verlius Dan Armeich, continua Ranka. Si jamais il venait à se vanter sous le coup de la boisson de notre tractation, qui sait dans quelles oreilles finiraient ses paroles.  
- Valderena et moi-même sommes arrivés également à cette conclusion. Valderena nous propose d’emménager à bord de son navire. Ses hommes sont dévoués et discrets.
- Je n’ai jamais douté de la ferveur et de la loyauté de Valderena à l’égard de notre culte. Ramiel le Scorpion dirigeant un établissement de divertissement à Karador ! Pourquoi ne suis-je même pas surpris d’entendre cela ?  
- Le Landsraad succombera tôt ou tard à sa propre décadence. De cela, je ne doute pas. Ce pays est gouverné par le vice et la corruption le ronge chaque jour davantage.  
- Ne nous attardons pas sur le futur de ces contrées païennes. Elles ont choisi leurs destins il y a longtemps déjà en refusant la lumière de Valarian. Je gage cependant que le cuisinier de ce succulent repas sera amendé de ses péchés alors faisons-lui honneur. »
Ranka retrouva son appétit et repris le cours du repas, malgré l’ombre d’un meurtrier dont la prime valait plus qu’un petit château, serviteurs et meubles compris.
 
                          *
                         ***
 
La Vierge à l’Epée quittait les eaux calmes de la baie de Karador. Le navire avait largué les amarres un peu avant le lever du soleil. A présent, celui-ci offrait à Karador ses premières lueurs. Les passagers étaient alignés le long du bastingage afin d’admirer les nuances d’or et de rouge dans le ciel. Les noirs et longs cheveux de Ranka flottaient au vent tandis qu’elle regardait avec un certain soulagement la cité disparaître à l’horizon. Elle avait troqué ses vêtements de voyage pour sa tenue ecclésiastique composée d’un tabard blanc paré de la croix de Valarian. Quitter les costumes serrés et compliqués qu’imposait une infiltration discrète dans le palais de l’empereur du Landsraad au profit des vêtements amples des prêtresses de Valarian avait été un plaisir.  Elle emplit ses poumons de l’air marins, retrouvant des sensations familières. Un long voyage en bateau n’était hélas pas du goût de Siegnar qui s’était éclipsé dans la cabine. Ne supportant pas ces traversées, le paladin s’était réfugié dès la première heure dans la prière afin de ne pas succomber au mal de mer.  
 
Ranka scruta les passagers à la recherche d’une éventuelle menace. Elle remarqua un couple de vieux notables, un marchand dont le pied marin disait qu’il était un habitué des mers ainsi qu’une jeune femme aux courts cheveux roux. Celle-ci tournait le dos à la vue magnifique de l’aube sur Karador et fixait l’infini de la mer du nord.
 
Le capitaine Valderena terminait de superviser l’accès du navire à la haute mer. Déléguant les manœuvres à son second, un grand marin à la barbe broussailleuse, elle s’approcha de Ranka.
 
« Magnifique n’est ce pas ? Et pourtant c’est toujours avec soulagement que je quitte la cité. Cela est triste à avouer mais c’est en mer et non à Karador que mon cœur demeure.
- Je vous comprends, capitaine. Pour ma part, Karador est trop emblématique du Landsraad pour avoir un quelconque intérêt à mes yeux. Je dirais même que cette cité incarne par beaucoup de ses aspects ce que nous combattons, nous les fidèles de Valarian.
- Je ne suis pas surprise de vos paroles en vérité. »
 
Le capitaine posa ses coudes sur le rebord et laissa son regard dérivé sur les flots jusqu’à la cité qui n’était désormais visible que par à-coup. Les deux femmes regardaient l’horizon, laissant les vents marins les saupoudrer d’embruns.  Ranka s’avoua qu’elle respectait réellement Valderena. Aventurière des mers, Valderena s’était taillé une solide réputation en effectuant régulièrement la traversées des océans. La Vierge à l’Epée etait le seul navire à avoir effectué trois fois le trajet entre le vieux continent et les colonies comme Port-Lointain et Sablerouge situées sur les nouvelles terres découvertes il y a un peu plus de trois siècles.  
 
Le nouveau monde ! Je me demande si la moitié de ce que l’on en raconte est vrai !
 
Des indigènes Thulums, cette race d’hommes noirs qui peuplaient ces terres lointaines avaient même rejoint son équipage. Son regard dériva sur l’un d’entre eux qui s’affairait avec les cordages. L’homme était relativement grand et très musclé. Il portait pour seul vêtement un pagne noir et Ranka dévora des yeux chaque parcelle de sa poitrine et de ses muscles tandis qu’il tirait sur une corde pour monter une voile. Ses longs cheveux étaient nattés en de multiples tresses qui pendaient dans son dos comme des tentacules. Valderena, remarquant l’intérêt que portait Ranka à son marin, sourit d’un air complice.
 
« Celui-ci se nomme Murobo. Vous pouvez me croire sur parole si je vous dis qu’il est aussi agréable comme compagnon qu’il a l’air appétissant. »
 
Ranka rougit aux pensées proprement indécentes qui lui vinrent à l’esprit.
 
« Enfin protesta-t-elle, je suis une prêtresse de Valarian et l’église ne reconnaît pas les Thulums comme appartenant au genre humain. Jamais je ne pourrais…
- Qui donc ira le raconter ? Sûrement pas moi.
- Qui est cette jeune femme là-bas ? demanda Ranka pour changer la conversation qui devenait un peu trop familière à son goût.
- Elle se prénomme Korigwene et c’est une envoyée du covenant de Karador.
- Une magicienne donc ?  
- Non point. Une traductrice d’après les lettres de créances qu’elle m’a remises.  
- C’est vrai que nous faisons escale à Yfor.
- Elle voyagera avec nous jusqu’à Thaelyss
- Vraiment ? Alors cela est fort etrange, murmura Ranka. Très étrange.
- En quoi cela ?
- Je me demande qui ferait venir une traductrice d’aussi loin que Karador alors que les moines de l’Ordre de Saint Tenadir sont reconnus comme des historiens renommés et des linguistes compétents. Qui possède des écrits à traduire à Thaelyss qu’il ne veuille partager avec l’église de Valarian.
- Qui, en effet. Mais je laisse cette question à votre personne. Mes passagers peuvent profiter de ma discrétion à leur égard et en vérité, je vous en ai déjà trop dit. Si vous voulez bien m’excusez, prêtresse, je m’en retourne à mon travail. »
 
Ranka regarda Valderena partir mais son attention se reporta de suite sur la mystérieuse inconnue. Ranka était partagée entre éclaircir cette situation et rester réservée à l’égard des passagers afin de ne pas attirer l’attention sur elle. Se sentant épiée, Korigwene se retourna et fixa la prêtresse. Celle-ci lui envoya un hochement de tête respectueux et cessa de la dévisager pour observer les marins à l’œuvre.
 
                        *
                       ***
 
La Vierge à L’épée avait jeté l’ancre dans la baie. Trois semaines s’étaient écoulées depuis que le navire avait quitté la cité de Karador. Sur le pont, des marins attendaient la marée haute en jouant leur maigre salaire aux dés. Ranka remarqua la mystérieuse traductrice en train d’observer la côte. Elle avait échangé nombre de mondanités avec la jeune femme sans avoir toutefois l’occasion d’une discussion sérieuse car celle-ci restait très évasive quant à sa personne.
 
Ranka décida que le moment était propice et s’approcha de Korigwene. Celle-ci observait d’anciennes ruines recouvertes d’algues qui sortaient des flots. Des centaines de vieux murs, de colonnes, d’enceintes et de remparts bloquaient le passage du navire jusqu’aux quais de Yfor. Les eaux particulièrement limpides à cet endroit permettaient de voir les fonds marins et de constater que la légendaire première Yfor reposait bel et bien sous les flots. De vastes rues maintenant parcourues par des bancs de poissons étaient visibles sous la surface. Ranka chercha des yeux le temple de Valarian mais elle ne put distinguer la nature des bâtiments tant les algues et les herbes recouvraient les édifices.
 
A l’avant du bateau, quatre marins plongeaient tour à tour pour explorer d’antiques ruines à la recherche d’un éventuel trésor.  
 
« C’est la première fois que vous contemplez les ruines d’Yfor ? demanda Ranka pour entamer la conversation.
- Oui, répondit Korigwene, se retournant en partie pour faire face à la prêtresse. En fait, c’est la première fois que je voyage aussi loin. Je vous avoue que ma curiosité n’en est que plus grande devant cette vision. Oserais-je vous demander quel est la part de vérité dans la légende ?
- Je crains de ne rien connaître que vous sachiez déjà. Yfor fut la première cité du Landsraad à accueillir le culte de Valarian, au septième siècle de notre temps.
- En six cents quarante trois si je ne me trompe pas.
- Vous êtes fort instruite, dame Korigwene. En fait, je suis très curieuse de connaître l’histoire d’Yfor tel qu’on l’enseigne au covenant.
- Il se trouve que la légende de Lysandre et de Thibault est l’une de mes histoires favorites. Le Landsraad fut depuis sa création une nation d'agnostiques, se refusant à légaliser les religions. En ce temps là, un fier et courageux paladin nommé Thibault poursuivait un vil sorcier.
- En fait, repris Ranka, Thibault n’était pas paladin mais inquisiteur. Les deux fonctions appartiennent à deux ordres différents. Quant à sa proie, ce n’était pas un sorcier mais un mage du covenant de Zaar, un nécromant du nom de Nesferius.
-  C’est exact, confirma Korigwene. Le mage qui créa l’enchantement du Souffle de Vie, lequel permet d’animer une création d’argile en un golem obéissant.
- Un hérétique qui corrompt l’œuvre de Valarian et qui dénature la valeur de la vie en créant des poupées sans âmes.
- Hum, toussa Korigwene. Toujours est-t-il que la piste de Nesferius mena Thibault à Yfor où il découvrit une cité en proie au vampirisme. Ses compagnons et lui-même combattirent ce qu’il pensait être l’engeance de Maligor, le Roi du Sang.  
- Vous êtes bien courageuse de prononcer ainsi son nom. Ne savez-vous pas que les Douze entendent ceux qui les invoquent en les nommant ?
- Mon maître, le Mage Boerus, affirme que cela n’est en rien fondé.
- Votre maître doit être un homme bien puissant pour savoir ce qui est vérité et ce qui ne l’est pas quand nous-même, fidèles de Valarian, l’ignorons. »
 
Korigwene haussa les sourcils. Elle décida de relever la joute oratoire que venait de lui lancer la prêtresse de Valarian.
 
« Pour en revenir à l’histoire, tel que l’enseigne le covenant, Thibault et ses compagnons affrontèrent donc ces vampires qui terrorisaient la cité. Au fil des batailles, ils parvinrent à identifier celle qui œuvrait dans l’ombre derrière les suceurs de sang, une vampire du nom de Lysandre.
- Une autre nécromancienne qui s’est volontairement contaminée avec l’essence vitale d’un vampire, devenant ainsi une abomination.
- La vision de l’histoire exposée par le covenant est beaucoup plus prosaïque. Lysandre travaillait à un élixir qui lui assurerait jeunesse et vitalité pour l’éternité.
- Et elle échangea son âme immortelle pour quelques siècles de vie supplémentaire, commenta Ranka.
- Pour conclure ce récit, Thibault confronta Lysandre mais ceux-ci tombèrent follement épris l’un de l’autre. Par amour pour son chevalier, Lysandre accepta de prendre l’élixir qui lui rendrait son humanité et promis de se soumettre au jugement de Valarian. De son coté, Thibault renonça à sa vie de justicier errant pour l’aimer quelle que soit la punition qu’elle subirait. »
 
Ranka éclata de rire.
 
« A Orma, on nous enseigne que Lysandre utilisa un philtre d’amour pour faire de Thibault son esclave, lui promettant de revenir dans le droit chemin à seul fin de le tromper pour le faire chuter de son statut de paladin.
- Mais à l’instant fatidique, Nesferius intervint. Il enferma l’esprit de Lysandre dans un golem grotesque et monstrueux. Il fit boire l’élixir d’immortalité de Lysandre à Thibault, le transformant en une créature maudite, une bête pire qu’un vampire. Thibault, privé de son âme, devint un monstre dévorant les habitants et Lysandre un jouet manipulé par Nesferius. A eux deux, ils terrorisèrent la cité des nuits durant mais dans un éclair de lucidité, Lysandre repris le contrôle d’elle-même et stoppa le monstre qu’était devenu son amant.  
- Mon cours d’histoire raconte que Thibault retrouva momentanément son âme et décida de stopper la furie du golem monstrueux qu’était devenu Lysandre, corrigea Ranka.
- Le combat brisa la falaise sur laquelle la cité était construite, la précipitant en grande partie sous les flots, tuant des dizaines de milliers d’habitants. Le Landsraad attribua la cause de cette tragédie à l’église, et plus exactement à Thibault sans qui rien ne serait advenu. Suite à cela, le culte de Valarian fut de nouveau interdit dans le Landsraad. C’est dans ces flots que se trouve le seul et unique temple de Valarian qui fut jamais construit sur cette partie du continent. On raconte que loin sous les flots, le laboratoire caché de Lysandre existe toujours et que le secret de son élixir d’immortalité repose sur une table de travail.
- Puisse-t-il y demeurer jusqu’à la fin des temps. »
 
Korigwene hocha la tête. Pour la première fois depuis le début du récit, elle était vraiment d’accord avec les dires de la prêtresse.  
Valderena s’approcha dans leur dos.
 
« La marée a suffisamment monté pour nous permettre d’emprunter la Route des Sirènes.
- Je connais ce nom ! s’exclama Korigwene. C’est ainsi que les marins renommèrent l’ancienne avenue d’Yfor. Aujourd’hui c’est un passage qui permet aux navires de traverser les ruines sans se fracasser sur les pierres. »
 
Valderena acquiesça.
 
« Je vois que vous êtes digne du covenant de Karador, dame Korigwene. Si vous le désirez, je vais vous montrer durant la traversée de la Route les ruines des édifices les plus intéressant…
 
Deux heures plus tard, La Vierge à l’Epée s’amarrait au port de Yfor. Korigwene, Ranka et Siegnar prirent pied sur une jetée de pierre. Une longue route montait du port en serpentant le long de la cassure de la falaise vers le plateau surplombant la mer où fut reconstruite la cité. A l’écart de celle-ci, sur un promontoire surplombant la mer, Korigwene remarqua une vieille forteresse en ruines.  
 
La forteresse des templiers de Valarian !
 
Ranka héla un attelage.  
 
« Vous ne comptiez quand même pas monter à la cité à pied ? » fit Ranka pour inviter Korigwene à la rejoindre dans la voiture.
 
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Et voilà ! Avec ce chapitre, l'intégralité du roman dépasse les 100,000 signes ce qui correspond à une soixantaine de pages.


Message édité par deidril le 12-07-2004 à 13:42:53
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