Roman Heroic fantasy "Le chevalier ystherien"

Roman Heroic fantasy "Le chevalier ystherien" - Arts & Lecture - Discussions

Marsh Posté le 08-03-2005 à 16:55:07    

Bonjour à tous  
 
De la même façon que Deidril, je tiens à poster mes premières ébauches d'écriture:)
 
J'ai créé un monde heroic fantasy assez vaste pour servir de support à un cycle épique sur le long terme. Après quelques centaines de pages d'archivage... Je me suis enfin risqué à écrire un premier récit.
 
Donc, je présente ici une première partie. Laissez vos impressions (bonnes ou mauvaises) du moment que c'est assez objectif, elles m'aideront à m'améliorer  ;)  
 
 
 
 
Alenshtyr était la plus grande terre de toute la sphère de Vanaüssa, univers parmi les univers. Le Vanyr, entité unique et suprême, l’enfanta durant l’âge d’Ura, le tout premier cycle – qui fut entamé par le premier Sunor, sa première ère – et la protégea à travers les centaines de millénaires qui suivirent. Elle n’avait pas de frontières et ses monuments naturels reflétaient l’infinie inspiration de son créateur : ses océans sans fonds, ses monts sans sommets et ses plaines sans horizons.
 
 Les millénaires se chevauchèrent les uns après les autres et autant de peuples et de races parvinrent à conquérir cette infinité.
 
L’ère d’Aelma, septième de l’âge de Thava – le quatrième cycle – et vieille de 765 années, fut la période durant laquelle se joua le destin de tout ce qui fut.
 
Ouvrons donc les yeux sur cette immensité en compagnie des innombrables dieux qui contemplent les faits de leurs protégés. Ces derniers traceront le chemin vers un avenir incertain et inquiétant…

 
 
 
 
Prologue
 
 
 
 
 « L’orbe noir d’Arän avait disparu ».
 
 Sans lui, tout pouvait arriver, car ce vestige des temps passés empêcha jadis l’anéantissement de tout Alenshtyr.
 
 Que se passait-il donc sur cette terre immense ? À Ystheren, le pays de la Porte, on rapportait que les princesses Thanellas d’Esthyren, Feiín de Welyrren et Kocah de Longsleim s’étaient également volatilisées.
 
 Pour résoudre ce mystère, un des nombreux chevaliers ystheriens devra être choisi en haut lieu. La Porte d’Ystheren, c’était le pays de la paix, la contrée de l’honneur, la terre des héros et des garants d’Alerenta. Grâce à son pont immense, elle unissait les deux continents de Verlias et d’Eralgra, rivaux culturels et idéologiques depuis toujours.  
 
 Beaucoup pensaient que Taferín le preux aurait fait l’affaire pour ce genre de mission. D’autres préféraient encore miser sur Sitanill qui faisait la fierté de la Porte sur tout le continent de Verlias. À l’unanimité, on aurait demandé à Vendrelur. Son nom résonnait comme la foudre des dieux wiranytes, car il n’existait pas plus fort et plus lucide que ce surhomme. Il était le champion.
 
 Mais non. Ce n’étaient pas tous ces grands qui iraient chercher l’inconnu. Ils étaient déjà en quête pour maintenir le fragile équilibre d’Alerenta et de ses deux continents.
 
 Non, un autre ira, mais Ystheren était à présent si vide de héros. Allait-il falloir en improviser un ?
 
 À l’entrée de la demeure du seigneur Waen, un jeune homme s’avança…  

 
 
 
1-L’élu de la Porte
 
 
 
 
 Il était d’une taille raisonnable et d’une corpulence équilibrée. Son doux visage était enfantin. Il avait le sourire et l’expression bienveillante, marques d’une conscience tranquille et d’un esprit reposé. Sa belle chevelure lisse et châtaigne ajoutait à son charme naturel la saveur des mois de Cerllun. Ses yeux d’un vert profond faisaient transparaître la beauté de l’émeraude, mais également la naïveté du débutant ; il les ouvrait telle une bête curieuse. Il était vêtu de minces tissus aux couleurs claires, d’un petit ceinturon serrant ses fines braies d’un gris pâle et d’une étoffe légère au bleu ardoise servant de petite cape ; il avait l’allure d’un citoyen moyen de la Porte. Il s’agissait pourtant d’un noble. Le jeune homme franchit le seuil de l’entrée de cette vaste bâtisse de pierre : une illite-nil, un endroit réservé aux seigneurs de la Porte pour l’exercice de leurs fonctions. En pénétrant à l’intérieur, le jeune noble aperçut un homme visiblement accablé. Waen, de la maison des Orÿr, était ce personnage courbé sur sa lourde table de travail. Il semblait contempler un long parchemin qui avait encore la tension pour s’enrouler sur lui-même. La consistance parfaite du matériau et sa couleur blanc neige laissaient penser qu’il devait provenir d’un pays assez éloigné. On ne voyait pas à Ystheren de si belles textures pour les parchemins. Les mains du seigneur se replièrent et il déposa le rouleau sur une autre pile de manuscrits. Son regard se porta soudain sur le jeune homme et il s’exclama alors :
— Aenalym, par Uthâr ! Te voilà enfin.
C’était le prénom de ce garçon.
 — Vous semblez bienheureux de me voir, Seigneur Waen, répondit-il.
 Le vieux Orÿr se leva de sa chaise en bois. Un fier individu de grande taille apparut alors au jeune homme. Derrière sa petite moustache blanche, son visage sec, ridé, ses saillies faciales, témoignages d’une vie active et remplie, un petit sourire pincé exprima sa première réaction. Puis, il s’avança vers Aenalym.
 — Mon jeune ami, j’aurais aimé te donner ton titre de chevalier en d’autres circonstances, dit-il avec un soupir désinvolte.
 — Chevalier ? Vous voulez dire chevalier de la Porte ? S’étonna-t-il brusquement.
 Le seigneur ystherien tâtonna. Il se tortillait la moustache avec un air perplexe, puis il reprit en jugeant l’air désemparé de son jeune visiteur.
 — Tu le désirais depuis ton plus jeune âge, je crois ?
 — Bien sur Seigneur, mais pas si soudainement… Je ne suis pas encore prêt.
 — Je suis certain que tu feras un bon élément, répliqua-t-il. Ton père et ses amis ont fait de toi un vaillant garçon. Je le sais, car tous les prétendants à ce titre attirent mon attention dès l’instant où ils ont évoqué leur désir de devenir chevalier.
 Aenalym ne s’était pas du tout attendu à cette brusque nouvelle. Il avait tant rêvé de servir la Porte dans un ordre si important qu’il ne réalisa pas encore les propos de son interlocuteur. Il pensait avoir atteint son rêve avant l’heure, et pris de court, il s’inquiétait sur ses propres mérites.  
 Quant à Waen, il était loin d’être idiot. Il devinait la tourmente intérieure d’Aenalym. Ce dernier ignorait tout du protocole utilisé pour choisir les chevaliers. Le titre était donné à ceux qui étaient choisis par l’ordre. Pour un seigneur comme Waen, ce privilège ne se méritait pas, on se devait simplement d’en user.  
 Le silence perdurait et Aenalym voulut comprendre le pourquoi de cette décision.
 — Seigneur Waen, pourquoi moi, pourquoi si tôt ?
 Le vieux noble se retourna et tendit la main dans sa pile de parchemins à demi enroulés. Il brassait quelque peu son contenu, car visiblement, il en cherchait un de particulier. Lorsqu’enfin il le saisit :
  — Lis ceci.
 Aenalym déroula un parchemin jaunâtre et abîmé, tapissé de marbrures brunes et empreint d’une forte odeur sans nom. Ce document-là était bien différent du premier. Il aperçut des inscriptions étrangement calligraphiées. La couleur de l’encre employée n’avait rien de commun en cette contrée, car un rouge sombre se mêlait étrangement au pigment noir. Le jeune Ystherien reconnut alors les sigles de la langue de Kelodahn, le dialecte divin des anciens âges, encore utilisé dans de nombreux pays comme la Porte. Ils étaient grossièrement incurvés et leurs terminaisons étaient brouillonnes. Après avoir reconnu les caractères essentiels, il comprit approximativement ceci :
 
 
 
 « Vos amis ont façonné l’humiliation des Ardaks.  
 
 Rûmme! Er’karr! Unur! Vous les savez impitoyables et ils marcheront à nouveau sur vos terres. Nous répandrons l’ancienne horreur des irkdars de Longsleim dans vos chaumières de barbares.  
 
 Insectes ! Nous anéantirons la moindre de vos tanières pour retrouver notre Kocah.
 
 Ystheriens, retrouvez-la avant nous ou vous périrez. »

 
 
 
 Aenalym y voyait évidemment la source de bien des soucis. Mais les termes lui échappèrent et il n’avait pas vraiment connaissance des évènements qui s’étaient déroulés. Waen lui prit le parchemin des mains, y jeta un dernier et bref coup d’œil de dépit pour ensuite le jeter sur l’amoncellement de rouleaux. Le jeune homme sentait sa propre présence attachée à ce message de malheur. Il comprit très vite la raison qui poussa sa décoration hâtive et du moins son rôle, si minime dut-il être dans cette affaire, semblait de toute évidence indispensable.  
 — Laisse-moi te raconter quelques histoires, rétorqua le seigneur d’Orÿr. Tu ne feras pas un bon chevalier si tu ignores les terribles évènements qui ont eu lieu. Vois-tu, une guerre séculaire semble inévitable…
 » Il est en ce monde trois immenses contrées qui exercent une puissance considérable sur les deux continents : Esthyren, Welyrren et Longsleim. Il y a quelques jours s’est produit un évènement inexplicable : à chacun de ces empires, la première princesse a disparu. Cela est arrivé en des lieux tous plus éloignés les uns que les autres, mais au même instant. Que les dieux me gardent de savoir quelle sorcellerie se cache derrière tout ça ! Nous devons les retrouver avant que de plus grosses tensions ne naissent entre les deux continents. Tu connais bien sûr l’empire d’Esthyren qui est un de nos meilleurs alliés. Ils se sont déjà affairés à fouiller les recoins de leur immense terre. C’est le territoire le plus proche et le plus sur. S’il devait arriver malheur, leurs immenses forteresses et leur puissante armée pourraient dissuader quelque peu ces Ardaks belliqueux.
 » Nous avons tout d’abord reçu les messages des Welyrs de l’orient. Nous savons l’empire de Welyrren sage et civilisé, mais aussi terriblement secret. Il est si éloigné que nous ne le connaissons que très peu. C’est néanmoins une terre au peuple noble. Ils ne nous causeront pas d’ennuis et sauront régler leurs problèmes seuls.
 » De plus dures nouvelles ne se sont pas fait attendre. Comme tu as pu le lire dans le parchemin, l’empire de Longsleim, la terre des Ardaks, a proféré de vives menaces à l’encontre de tout Eralgra. Ils sont puissants et obéissent à des valeurs martiales millénaires. Les anciennes guerres séculaires sont leur fait. En temps de guerre, ils nous massacreraient tous. Ils portent maintenant leurs regards méfiants sur les Esthyrs, leurs ennemis historiques, et pour je ne sais quelles raisons, ils les croient coupables de l’offense subie. Ils ignorent qu’Esthyren aussi a perdu sa princesse et j’ai peur que la guerre n’éclate que pour leur simple orgueil, ou même pour une effroyable méprise. Les Esthyrs sont bons, mais ils sont fiers. Ils ne se laisseront pas provoquer longtemps.
 Aenalym écoutait son conteur avec intérêt, mais il partageait l’inquiétude du vétéran ; on pouvait l’entendre résonner dans ses paroles.
 — Éviter la guerre, c’est le défi originel de la Porte. Les guerres continentales ont été les plus meurtrières ; les anciennes familles qui ont rédigé nos codes se sont jurées de les empêcher. Aujourd’hui à nouveau, nous faisons face à une situation délicate. Tu dois comprendre que la Porte n’abandonne jamais, et c’est pour cela que du royaume de Rubalan à la Cité de Halthroh, les souverains du Ventarí comptent sur nos chevaliers.
 » Tout le Ventarí nous a envoyé des messages d’alerte. Aussitôt, nos meilleurs éléments sont partis à la rencontre des souverains ventaríens. Tu pourrais imaginer que l’ordre a suffisamment de chevaliers pour contenir une guerre, mais il n’en n’est jamais assez pour calmer l’ardeur de l’Occident. Nos plus grands diplomates sont allés conseiller les alliés de la Porte alors que nos rôdeurs sont en train d’enquêter en compagnie des chevaliers. Talan, Taferín, Offis, Ecellan, Sitanill, Kurrâ, Osaxe ! Ils sont tous partis en Verlias. L’ordre a même envoyé Vendrelur chez les Ardaks. Il n’y a plus ici assez de chevaliers pour retrouver une seule princesse. Ils sont éparpillés sur de lointaines terres depuis des jours. Mes pairs comptent sur de jeunes éléments pour retrouver la princesse Kocah. Ils sont tous tellement terrifiés à l’idée de subir le courroux des Ardaks.
 » En étudiant de plus près ces disparitions soudaines, on peut facilement comprendre qu’une volonté malfaisante est à l’œuvre. Pour ma part, il ne suffit pas de chercher dans les territoires inquiétants de Verlias. Trois princesses ont disparu au même instant ; trois ont disparu et elles représentent des contrées éminemment puissantes, des contrées rivales. Ce n’est pas par hasard qu’elles ont été choisies, car Esthyren et Longsleim ont des relations très tendues depuis quelques décennies. L’ordre n’a fait quérir personne en Esthyren et tout me porte à croire que de nombreux indices y sont dissimulés. Il me faudrait un homme, là-bas, pour enquêter...  
 Aenalym commençait à deviner le reste.
 — Aurais-je un rôle à jouer dans tout cela ?
 Et quel rôle ! Waen voyait là l’occasion inespérée pour faire du jeune homme un acteur important dans ses plans. Il s’approcha d’une armoire épaisse au bois usé et vieilli par les années. Il ouvrit ses lourdes portes, solidement rivées de clous de fer noir en forme de losange et où étaient assemblés des motifs forgés dans ce même métal. Il tira de l’intérieur un petit coffret au bois verni et luisant à la faible lumière de la pièce. Il s’approcha d’Aenalym en lui tendant le coffret.
 Aenalym le saisit avec un regard interrogateur et le posa sur la table en chêne de Waen. Il ouvrit le couvercle semi-cylindrique et aperçut une lueur métallique éclatante sur un fond tissulaire au bleu céleste impérial. Aenalym s’écria « Un diadème de chevalier ! Par Erla ! » Il n’osait pas le toucher. Son chrome homogène laissait penser qu’il était neuf et personne n’avait dû le voir auparavant. Quatre branches flamboyantes de métal s’entrelaçaient entre elles et formaient par paires la courbe qui se moulait sur les parties latérales du crâne. La gravure décorative avait donné aux tresses de métal leur aspect de plumes métalliques, dont la pointe dynamique se fondait dans un anneau central elliptique. Aenalym le prit soigneusement avec ses doigts et aperçut dans la lumière jaune du feu de cheminée une magnifique gemme ovale sertie dans la mince ellipse frontale ;le joyau vert de Kuzâr, la pierre de raison, qu’on ne trouvait que dans les monts d’Arhim de l’Ouest ystherien, resplendissait sur cette couronne de noblesse. Le regard d’Aenalym se perdait dans cet océan de sinople dont l’abîme ténébreux suggérait la profondeur de ses propres yeux émeraude.  
 Le jeune homme se retourna vers son ancien alors qu’il reprit le contrôle de ses émotions. Waen le dévisageait, toujours prêt à pénétrer ses pensées.
 — Si tu portes ce diadème, c’est toi qui devras aller à Esthyren.
 — Esthyren… murmura doucement Aenalym.
 Il ne dérogeait pas au caractère culturel de la Porte, il souhaitait depuis longtemps parcourir le Ventarí et au-delà ; mais il hésitait. Esthyren était une contrée très éloignée de l’orient eralgranite. Il devait bien falloir des mois pour parcourir les trois à quatre mille sits qui séparaient la Porte d’Ystheren de la frontière esthyr la plus proche. Il fallait passer les hauts pics de la chaîne du Can-amhran pour enfin s’enfoncer dans les vallées gyllàriennes ; des gouffres où s’affrontaient d’impitoyables guerriers et autres barbares pour la victoire de multiples guerres intestines.  
 — Esthyren, répétait-il, mais avec un élan d’héroïsme qui lui pinçait le cœur.  
 Waen vit ses yeux briller.
 — C’est une nouvelle vie que tu devras mener. Le monde extérieur et les mystères auxquels tu feras face bouleverseront tes habitudes d’Ystherien. Tu seras constamment amené à te remettre en question, à t’adapter. Tu vas avoir l’occasion de voir du pays mon garçon... Je sais que tu es un homme curieux, avide de savoir et de découvertes alors tout cela te plaira !
 Aenalym se sentit rassuré un instant. Envisager une telle entreprise sans un brin d’optimisme lui aurait été sans doute fatal.  
 — Acceptes-tu ce diadème de chevalier de la Porte, le titre et la mission qui l’accompagnent ? reprit Waen.
 — Ce diadème que vous m’offrez Seigneur, je l’accepte.
 Le grand Ystherien fut ravi de voir avec quelle célérité Aenalym accepta son fardeau. Le jeune garçon était naturellement vif d’esprit et son bon sens lui fit comprendre qu’en ces jours d’infortune, les intérêts de tous étaient en jeu.
 Waen prit le diadème des mains de l’adolescent en lui demandant de baisser légèrement la tête. Il l’enserra dans ses cheveux châtains et le fixa autour de son crâne, la pierre de Kuzâr au milieu du front. Aenalym releva ensuite les yeux vers son doyen. Celui-ci fixait maintenant le jeune chevalier avec un large sourire plein de confiance. Il lui tapota l’épaule comme pour lui transmettre une once de son expérience de vieux cheval de bataille.
 — Je dois annoncer la nouvelle à ma famille, balbutia Aenalym, encore sous le coup de l’émotion.
 — Ne t’inquiète pas. Tu prendras le temps de faire tes adieux à tous tes proches, du moins, avant demain, jour de ton départ. De plus, il faudra préparer ton voyage. Je vais de ce pas m’occuper de te trouver tout ce dont peut avoir besoin un chevalier dans l’accomplissement de son devoir : une épée, un cheval, bien sûr de l’or et de la cill. Waen se tourna vers une large porte qui se trouvait dans le fond de la pièce et appela quelqu’un : « Ahón ! »
 Un jeune homme ne tarda pas à ouvrir cette porte et les rejoignit alors. Il était très fin, à la limite de la chétivité. Son visage pâle semblait façonné à même l’ossature et ses grands yeux bleu clair, presque exorbités, nous faisaient oublier ce long nez fin et vertical qui l’étirait dans sa hauteur. Ses cheveux avaient le spectre brun clair et de longs reflets blonds s’estompaient vers leurs pointes. Il était relativement bien accoutré pour un simple écuyer et pas assez pour un servant de seigneur ystherien ; ses étoffes blanches ornées de motifs tressés dans du fil doré étaient au moins plus onéreuses que les vêtements communs d’Aenalym. Tandis que ce dernier le regardait, sa voix gracieuse se fit entendre.
 — Vous m’avez appelé Seigneur.
  — En effet mon bon ami, je veux que tu me fasses quérir de suite un messager de l’ordre Asthar ainsi que ce gros paresseux de Barlion.
 — Je m’en charge de ce pas mon Seigneur.
 Puis se tournant vers Aenalym, Waen ajouta :
 — J’ai besoin d’un tout petit peu de temps pour annoncer cette décoration à l’ordre des chevaliers. Tu agiras ainsi selon le Code de chevalerie sans aucune contrainte et tu pourras faire valoir tes droits dans les nombreux territoires alliés. Tu pourras même compter sur l’aide de l’alliance de la Porte.
 — L’alliance de la Porte ?  
 — Oui, un ordre puissant composé d’étrangers ayant prêtés allégeance à la Porte d’Ystheren. Il est influent dans tout le Ventarí et les connaissances locales de ses membres sont infiniment utiles. Ils ne sont ni chevaliers, ni nobles. Ce sont simplement des hommes libres las des tourmentes de la guerre et prêts à aider leur peuple à l’aide de nos codes.
 — Oh, je ne serais donc point seul en terre étrangère ? Je rencontrerai alors quelques amis propices à m’orienter.
 — Cela dépendra de ton itinéraire, mais je me chargerai de te tracer un chemin afin de favoriser ces rencontres. Je préfère te savoir en compagnie d’alliés plutôt qu’entre les mains d’un quelconque geôlier.
 — Je préfère cela également, répliqua le chevalier en riant.
 Waen sourit à l’écoute de l’insouciance et de la bonne humeur de son jeune protégé. Il se gardait bien de lui parler des innombrables dangers de l’extérieur. Les siècles traversés par l’ordre des chevaliers ont prouvé que ces derniers ne s’accomplissaient qu’à l’encontre de l’adversité, la peur ou même la mort… Aenalym devra passer par de terribles épreuves, il le savait. Le vieil Ystherien restait cependant confiant en voyant son jeune compagnon. Sa bonté et sa pureté lui feraient s’entourer d’âmes du même bord. Un visage aussi bien dessiné et un regard aussi profond lui apporteraient indiscutablement amitié et amour – sans nul doute le succès auprès de la gent féminine. De sa propre expérience, il savait ô combien les femmes étaient indispensables aux hommes pour les aider à se parfaire. En temps voulu, Aenalym aurait besoin d’alliés.  
 
 
 
 
 
Voila voila
 
Pour ceux qui auraient apprécié, la suite est prête
Il manque certes quelques coups d'épées et 2 ou 3 fracas de projectiles à onagres, mais le ton épique ne saurait tarder. Le cycle est long...  
 
J'attends vos réactions


Message édité par varcanthy le 10-03-2005 à 11:28:19

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\\\\\\\\\\\\\\\"Sache ô mon enfant que même le vieux chêne fut jadis un gland comme toi\\\\\\\\\\\\\\\"
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Marsh Posté le 08-03-2005 à 16:55:07   

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Marsh Posté le 08-03-2005 à 17:40:54    

+1 pour lire quand j'aurais le temps.
 
PS: La paternité revient à Grenouille, dont le premier roman est - hélas - enfoui dans les tréfonds de la page 5 ou 6 de la liste des threads.  
 
PSS: J'ai lu vite fait le premier paragraphe, une premiere remarque est que il m'est difficile de se plonger directement dans un roman qui débute avec un vocabulaire completement étranger. Je préfère quand on amene les noms propres petit à petit...


Message édité par deidril le 08-03-2005 à 17:42:23
Reply

Marsh Posté le 08-03-2005 à 17:56:23    

ouaip, je comprends, mais cette ouverture rapide n'a pas vraiment pour but de destabiliser (et je peux le concevoir). Elle présente le monde tel qu'il est.  
Toutefois, le recit peut etre entamé sans lire ce paragraphe qui est completement facultatif. Je t'invite même à le sauter si ça t'arranges :)


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\\\\\\\\\\\\\\\"Sache ô mon enfant que même le vieux chêne fut jadis un gland comme toi\\\\\\\\\\\\\\\"
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Marsh Posté le 08-03-2005 à 21:11:37    

Voila mon lot de remarques, paragraphe par paragraphe.
 
Prologue:
 

Citation :


Pour résoudre ce mystère, on choisira en haut lieu un des nombreux chevaliers ystheriens.  


on choisira : le temps ne colle pas avec le reste de la narration.
Peut être : Poure résoudre ce mystère, un des nombreux chevaliers ysthériens devra être choisit en haut lieu, ce qui permet d'éliminier le 'on' anonyme.
 

Citation :


Elle unissait les deux continents de Verlias et d’Eralgra, rivaux historiques et éternels.  


unissait signifie quoi ? Que c'est une frontière commune ? un point de passage ?  
rivaux historiques : c'est quoi un rival historique ?
 

Citation :


Ce n’étaient pas tous ces grands qui allaient chercher l’inconnu.  


qui allaient -> qui iraient
 
Le prologue: J'aime bien le style, ca donne envie de lire la suite ( ce que je vais faire ).  
 
 
1-L’élu de la Porte
 

Citation :


Sa belle tignasse lisse et châtaigne


Tignasse: Terme familier pour désigner la chevelure touffue et mal peignée.  
 

Citation :


... d’une étoffe légère au bleu âgé servant de petite cape,


C'est quoi un bleu agé ?
 

Citation :


C’était une illite-nil, un endroit réservé aux seigneurs de la Porte pour l’exercice de leurs fonctions. Elles étaient bâties à l’extérieur des forts et les messagers de la Porte y délivraient leurs rapports spontanément.  


Peut-être un peu trop définition de jeux de rôle ?
 

Citation :


Il semblait contemplé un long parchemin ...


-> contempler
 

Citation :


 il déposa le rouleau sur une autre pile de manuscrits.  


donc il va rouler et aller se perdre sous le bureau ? Je pinaille, mais un parchemin de belle texture, on le range dans un étui à parchemin :)
 

Citation :


Waen avait de l’expérience et il connaissait parfaitement le devoir d’un chevalier. Il conféra ce titre à maints prétendants par le passé et le fit toujours après une mûre réflexion. Son jugement ne fut pas toujours sans faille mais ses élus apportèrent beaucoup à la Porte. Il était résolu à faire d’Aenalym un digne représentant de l’ordre des chevaliers d’Ystheren.  


On dirait un background de personnage, l'encadré qui va avec une fiche de NPC  :??:  
 
 
- Je suis certain que tu feras un bon élément, répliqua-t-il. Ton père et ses amis ont fait de toi un vaillant garçon. Je le sais car tous les prétendants à ce titre attirent mon attention dès l’instant où ils ont évoqués leur désir de devenir chevalier.  
 

Citation :


Ce dernier ignorait tout du protocole usé pour choisir les chevaliers.


usé -> utilisé
 

Citation :


 Le titre était donné à ceux qui étaient choisis par l’ordre. Pour un seigneur comme Waen, ce privilège ne se méritait pas, on se devait simplement d’en user. Il connaissait les Welenma depuis fort longtemps et savait qu’au sein des membres de cette lignée, l’honneur et le respect des codes étaient des valeurs primordiales. Il savait que cette petite famille peu connue de la Porte se rendait utile à sa façon et qu’elle n’avait jamais eu son chevalier. Il connaissait également les nombreuses vertus et traditions de la maison – maison qui avait sa propre école d’épéisme.  


La encore j'ai l'impression de lire un extrait de supplément de jdr. C'est trop descriptif.  
 
 
Le silence perdurait et Aenalym se sentait comme un fruit vert qu’on avait arraché à sa plante nourricière. Il effaça de suite cette sensation désagréable et se ressaisit. Il cherchait tout simplement à comprendre le pourquoi de cette décision.  
 

Citation :


Il aperçut des inscriptions dessinées d’une façon qui lui était inconnue


S'il s'agit d'un langage, 'calligraphiées' est peut être plus juste.
De plus 'd'une façon qui lui était inconnue'  c'est pas beau.
 

Citation :


Tu ne ferais pas un bon chevalier si tu ignorais les terribles évènements..


ferais -> fera , ignorais -> ignore
'ferais' signifie qu'il est déja chevalier , hors il vient juste de recevoir son titre, n'est ce pas ?
 

Citation :


» Nous recevions alors les messages des Welyrs de l’orient.  


'alors' par rapport à quoi ? On saute du coq à l'âne et ce paragraphe ne me semble pas coller au précédent.
 

Citation :


Ils écraseraient quand bien même tous leurs voisins pour enfin voir les peuples d’Eralgra se faire massacrer.  


S'il écrasent leurs voisins, c'est eux qui 'massacrent', non ? La phrase me semble mal tournée ou alors j'ai raté une info.
 

Citation :


Ils ignorent qu’Esthyren même a perdu sa princesse.


'même' -> 'elle-même' ?
 

Citation :


Nous redoutons que les hostilités ne deviennent que tangentes à la cause première,


Ca veut dire quoi ?  :pt1cable:  
 

Citation :


les anciennes familles qui avaient rédigé nos codes s’étaient jurer de les empêcher.  


jurer-> jurés.
 

Citation :


Des causes mystérieuses obscurcissent nos idées.


Pareil, ca veut dire quoi ?
 
Bon, j'arrête la les commentaires pour l'instant.
 
Mes remarques :
 
Très descriptifs, parfois trop. Personnellement j'ai tendance à zapper les descriptions dans les gros pavés ou autre, comme au moment ou le vieux met 5 lignes pour reposer un parchemin.. Du moment qu'on peut retomber sur ses pieds, je pense que il n'y a pas de problème. Il y a des accrocs du détail, je n'en fais pas partie - mais c'est juste un goût personnel.
 
Beaucoup de noms propres. C'est très dur pour commencer un récit. Si j'avais une carte pour situer qui est ou et qui fait quoi, cela pourrait aller, mais la c'est très dur d'emmagasinner tout les noms d'un coup. C'est tout juste s'il ne faut pas prendre des notes...
 
Certaines descriptions sont très encyclopédique, ou semblent sorties d'un manuel de jdr. Ca casse pas mal la narration, comme si au milieu d'un film, l'action s'arrêtait et qu'un prof apparaissait pour donner un cours. Je pense qu'il faut faire un effort pour mieux intégrer les informations sur le monde dans l'action, quitte à couper dans ce que l'on transmet, ou à écrire un chapitre orienté découverte.  
 
On a parfois l'impression que y'a des bouts de descriptions qui ne sont la que pour grossir la taille de ton texte, comme au début dans 'ses dix neuf ans de jeune adulte'. ( Quand on a 19 ans, on est pas un pépé ... )  
 
Mais, ça se lit bien et donne envie d'en savoir plus :) Si le texte avait été plus fluide, moins descriptif et moins complexe dans les explications et les références à ton monde, je l'aurais surement lu d'une traite plutot que de couper au milieu. Voilà, tu as mon avis :)
 

Reply

Marsh Posté le 08-03-2005 à 22:59:07    

Eh bien au moins, tu es honnête, et grâce à ça, je vais pouvoir corriger quelques trucs genants.
 
 Merci pour avoir fait l'effort de lire le texte. Lancé dans l'écriture, on n'aperçoit pas toujours les erreurs et les multiples incohérences.
 
Je m'inquietais pour la description. Je commence à me rendre compte que certains passages sont vraiment en trop. Je passe mon filtre afin de rendre le texte plus fluide ( même pour moi la relecture est lourde lol)
 
Trop de noms propres/inhabituels, je te l'accorde. D'ailleurs, j'en avais à peu près conscience au moment de l'écriture. Etant très familiarisé avec mon propre dico, j'en oublie que le lecteur n'est pas aussi bien informé que moi lol.
 
Je vais passer mon filtre et revoir tout ça :)
 
Je suis bien sur à l'écoute de toutes nouvelles observations.


Message édité par varcanthy le 08-03-2005 à 23:37:22

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\\\\\\\\\\\\\\\"Sache ô mon enfant que même le vieux chêne fut jadis un gland comme toi\\\\\\\\\\\\\\\"
Reply

Marsh Posté le 10-03-2005 à 05:27:51    

J'poste le chapitre 2, même si il doit pas y avoir bcp de lecteurs lol
 
 
 
2-Le départ du chevalier
 
 
 
 
 Waen et Aenalym sortirent de la haute baraque de pierre pour profiter de la journée ensoleillée. Ura, la grande étoile, diffusait sa lumière intense à travers l’azur uni d’un ciel sans nuages. Une journée magnifique pour un mois de Kaelun, habituellement nuageux et humide. La température se faisait douce, mais ce n’était qu’un faste moment avant d’endurer la rigueur des saisons prochaines. Quelques jours de plus et la saison de Meleäs aurait apporté ses vents frais du nord. Le mois de Tearnas aurait à peine débuté que les déités des grands froids s’en seraient données à cœur joie, usant de leur sorcellerie et de leurs artifices – pouvoirs insondables – afin de saisir les plus démunis pour les jeter dans leurs limbes glacials. Mais le temps était aujourd’hui à la reine des déesses célestes ; et sa chaleur bienfaitrice, quoiqu’estompée par maintes volontés divines, se répandait encore dans l’air calme d’Anghariil’adh, la citadelle orientale de la Porte.  
 
 Au milieu de la place pavée de cette sublime cité, joyau de civilisation dans le Ventarí, Aenalym pouvait apercevoir au loin l’immense portail d’orient, forteresse engendrée d’un art unique des âges anciens et restaurée par des architectes ventaríens prodigieux. Avait-on déjà vu une porte de plus de trente socls de haut dans tout Alerenta ? Les Ystheriens n’en étaient pas convaincus. Des voyageurs venant de contrées anonymes, des commerçants ou des caravanes provenant d’horizons infinis du Sud s’émerveillaient devant la beauté de ce spectacle d’architecture. Ils ne furent pas au bout de leur surprise, car passé cette immense structure, il y avait pour unique chemin un pont de quarante sits de long ; il surplombait le détroit d’Anfkïr à plus de cinquante socls de haut. C’était une création unique liée à la Porte. Il rejoignait la côte verliasienne d’Ystheren, la péninsule occidentale qui arborait fièrement la citadelle jumelle d’Aliryunh-dôm. Entre ces deux points de jonction, les usagers du pont se comptaient par milliers et occupaient le large pavement régulier. Des marbres esuliens et faroniens furent taillés en dalles parallélépipèdes ; elles émulaient ce teint calcaire strié de nuées noirâtres. Aux éclaircies d’Ura, cette gigantesque passerelle renvoyait la lumière sur une mer souvent agitée et apparaissait aux marins comme un long chemin de blancheur éclatante que les dieux auraient tracé dans les tourbillons de l’impiété. Les navires pouvaient alors reconnaître la passe continentale, décorée d’arcades sublimes d’une hauteur inégalée,  pour enfin franchir leur seuil et rejoindre les océans lointains.
 
 La matinée vibrait de monde entre les demeures de pierres d’Anghariil’adh. De nombreux marchands passaient par Ystheren pour rejoindre l’une ou l’autre part d’Alerenta. Dans cette foule dispersée, les deux nobles ystheriens finissaient de discourir sur quelques détails. Ils virent alors une ombre de grande taille produire l’éclipse d’Ura. Cette dernière s’agitant provoquait de sourds battements d’ailes, levant des masses de poussières qui se tamisaient dans l’air perturbé. Aenalym recula par précaution et ferma les yeux. Il les rouvrit à demi lorsque cette turbulence s’adoucit enfin ; il vit un magnifique oiseau d’une envergure titanesque. Il devait bien faire trois ou trois et demi socls de long. Toutes ailes déployées devaient lui en attribuer le double dans sa largeur. Son plumage compact et lisse frissonnait encore du récent effort enduré. Un reflet bleu se révélait à cette surface gris clair tachetée d’une carnation plus sombre. De larges et longues plumes d’un blanc aux diverses nuances ornaient une tête longiligne ; un petit bec ocre et pointu ajoutait une valeur noble à son regard innocent d’animal. C’était un ahpaarín, un grand oiseau migrateur des côtes. Il était solidement harnaché par les divers éléments de la selle. Des cordages et de longues ceintures de cuir faisaient pression sur plusieurs parties du volatile. De minces sacs confectionnés dans des tissus variés étaient attachés aux nombreuses courroies du harnais. Un fier individu chevauchait hargneusement sa bête, lui soumettant son implacable autorité. Le brave homme portait une fine cuirasse rivée de petites écailles argentées à l’arête curviligne. Sa mince et longue cape noire était sertie de coutures aux froids pigments ; il y avait pour effigie centrale l’emblème de l’ordre Asthar, le corps des messagers continentaux, serviteurs des codes de diplomatie et fils de Fearhlí, leur dieu protecteur. Ce cavalier céleste était physiquement puissant. On pouvait entrevoir la musculature rigide de ses bras tapis de poils blonds. Une épaisse barbe ambre foncé dépassait de son heaume astharien, dont l’ouverture béante ne laissait qu’à découvert la mâchoire de ceux qui le portaient. Une paire d’ailes blanches, provenant sans doute d’un roffil bleu ou bien d’un passereau du nord, ornait le haut du casque. Le messager des cieux fit résonner une voix grave et haute en s’adressant à Waen.
 — Waen d’Orÿr ! Il n’y avait que toi pour me déranger, dit-il en ironisant amicalement.
 Le seigneur ystherien répondit d’un ton fraternel :
 — Atorám la fourrure d’or ! Je t’aurais cru loin d’ici, vieux brigand, si je n’avais point vu ton visage. Tu n’as donc pas su te rendre utile avant aujourd’hui.
 — Pourquoi vous appelle-t-on la fourrure d’or ? demanda Aenalym au cavalier qui enlevait son casque.
 — Regarde bien ma barbe, comme je suis beau ! lui répondit Atorám avec son large sourire, le pouce pointé vers sa toison. N’ai-je pas l’air d’un magnifique trabharnël de Fearhlí ? ajouta-t-il en s’esclaffant.
 La bonne humeur de fourrure d’or était contagieuse et Aenalym, naturellement enclin à la gaieté, partageait ses gloussements.
 — Tu perturbes un futur héros d’Ystheren Atóram, dit Waen.
 — Oh ! Mais, tu as raison ! Ce jeune homme est un chevalier à en croire ce beau diadème !
 Aenalym était un peu gêné par les louanges. La modestie était chez lui le fruit d’une éducation paternelle tempérante.
 — Je n’ai encore aucun prestige à louer, dit-il promptement.    
 — Ça viendra, fils, répliqua le messager en raillant. Il se tourna ensuite vers Waen qui était en train de caresser son ahpaarín. Bon bon bon… Tu ne m’as pas fait appeler pour admirer ma volaille j’espère ?
 — Je veux juste que tu fasses passer un message aux illite-nils de la voie orientale. Je veux que tous les alliés s’apprêtent à aider Aenalym dès qu’il se présentera à eux. L’arrière-pays est trop dan… (Il reprit subitement) trop imprévisible, pour laisser ce garçon sans appui.
 — J’irai jusqu’à Althenor. Ils se relaieront sans doute avec leurs coursiers ou leurs armuyrins. Je ferai mon possible pour qu’il puisse au moins obtenir du soutien jusqu’à Tranthir. Il y a de nombreux paladins là-bas.
 — Alors, tu peux partir dès maintenant. Aenalym quitte Anghariil’adh demain.
 Atóram remit son heaume ailé, secoua la chevelure du jeune chevalier – geste amical et chaleureux – et enfourcha sa monture céleste.
 — Je vais leur dire à tous que la Porte envoie un grand héros, un dieu ! s’esclaffa-t-il énergiquement. Puis il prit son envol, perçant la brise qui portait ses derniers gloussements jusqu’aux oreilles des deux Ystheriens.
 
 Barlion était venu jusqu’à la demeure de Waen, accompagné d’Ahón – l’Ystherien le plus chétif de la Porte. Il s’imposait dans le décor. L’homme était trapu et de petite taille ; son ventre arrondi le précédait et son visage rubicond masquait l’expression nonchalante d’un vieillard affalé par la fatigue et les efforts répétés.
 — Waen, je suis las de venir jusqu’ici… Que vas-tu me faire subir encore ?
 — Bien, tu m’équipes ce jeune homme. Tu lui donnes ta meilleure lame et la plus belle cuirasse de ton armurerie.
 — Ce sera tout ?
 — Un cheval aussi, une selle, des vivres, des jambières, des spallières, un casque…. Demain, je veux voir un chevalier digne de ce nom quitter la Porte.
 — C’est du travail tout ça… Je vais être épuisé.
 — Je te condamnerai à une vie de forçat par Erla, si jamais demain il manquera ne serait-ce qu’une pièce d’équipement !
 — Holà holà ! Non ! fit Barlion tout affolé.
 — Et tu bredouilles, et tu perds du temps ! aboya Waen. Cours donc à ton atelier te mettre au travail si tu veux mériter ma clémence.
    Aenalym eut un peu de peine pour ce vieil homme qui s’éloignait en courant malaisément.
 
 — Vous étiez un peu dur Seigneur, dit-il.
 — On ne l’est jamais assez quand il s’agit de la vie d’une personne… hum.
 La colère l’avait embrouillé.
 — Ne vous tourmentez pas trop pour moi. Depuis le début, je sais bien que vous vous faites du souci. Vous cherchez à me rassurer malgré toutes les inquiétudes qui vous taraudent. Il y aura du danger, cela, je le sais.
 — La perspicacité est aussi une vertu de chevalier, dit-il en riant.
 — Je ferais en sorte d’être digne de mon titre, malgré tous les obstacles qui se dresseront sur ma route, dussé-je y laisser la vie.
 — Ah non ! fit Waen. Un chevalier doit aussi savoir préserver sa vie. La mort, c’est l’échec. Qui voudrait d’un cadavre comme héros ?
 — Personne, en effet.
 — Bien, ce n’est pas grave, tout se passera bien, dit-il franchement.
 Et à ces paroles, Aenalym sourit.
 
 La soirée était tombée et les étoiles commençaient à illuminer un ciel indigo. La citadelle demeurait animée et ses rues étaient bondées. Peu après avoir laissé Waen à ses occupations, Aenalym avait annoncé la nouvelle à sa famille. Celle-ci avait réuni la plupart de ses membres autour de lui. Ces derniers étaient venus conseiller le nouveau chevalier. Ils firent également don de certaines de leurs possessions – richesses et objets de valeurs – pouvant être utiles à sa quête. La nuit fut agréable pour les Welenma, la lignée dont était issu le jeune Ystherien, car un grand repas fut improvisé pour célébrer cette décoration.
 
 La journée du 17 Kaelun commença par une matinée un peu fraîche. Aenalym était chez Barlion depuis l’aube pour les derniers ajustements de son équipement. Celui-ci avait confié au jeune homme une magnifique épée, quoiqu’un peu lourde. Il lui fit également don d’une lourde cuirasse. Mais le chevalier la refusa. Par préférence, il opta pour une armure plus légère, constituée d’un plastron, de deux courtes spallières et de tassettes arrondis. Celle-ci était en kwèn pur et donc un peu plus légère, quoique moins résistante. Il refusa également les jambières et les brassards en métal. Il convainquit Barlion que de simples protections en cuir et de bonnes bottes lui seraient bien plus agréables à porter. De même, il déclina le magnifique casque qu’il lui avait offert. Aenalym voyait bien que l’armurier prêtait beaucoup d’attention aux préparatifs, mais il ignorait si c’était plus par solidarité pour sa quête que par crainte de Waen.
 
 Serrant son baudrier et rangeant sa lame dans le fourreau, Aenalym se sentit prêt. Il enfourcha son cheval, monture brune à la crinière blanche, destrier issu d’une race célèbre du Ventarí. Il salua Barlion et le remercia pour ses services. Celui-ci bâilla, salua brièvement son visiteur et retourna très vite se coucher. Le chevalier partit au trot pour rejoindre Waen dans son illite-nil.
 
 Ahón se trouvait devant la bâtisse du seigneur et accueillit Aenalym. Il le fit entrer à l’intérieur et lui proposa un peu de bouillon en attendant son suzerain.
 — Cela doit être très excitant de partir seul, dit-il en le servant.
 — Je n’ai jamais dépassé les frontières de la Porte. J’ai un peu peur, je dois dire.
 Ahón le regardait dans les yeux.
 — Il existe des hommes qui le désirent, mais ils ne seront jamais chevaliers. Moi-même, je ne pourrais jamais caresser cette chance.
 Aenalym restait silencieux et pensif. Pendant un instant, il considéra davantage sa position dans la Porte.
 — Vous allez devenir un héros, Seigneur Aenalym.
 — Les chevaliers sont nombreux, mais les héros sont rares. Je ne serai jamais comme Vendrelur par exemple.
 — Ses faits sont exceptionnels, certes, mais vous aussi allez bientôt montrer à la Porte toutes vos qualités.
 — Je ne sais pas, je… C’est ce que je souhaite de tout mon cœur.
 — En tout cas, mon seigneur vous apprécie et il croit en vous. Il m’a beaucoup parlé de votre personne.
 — Ah oui ? Que peut-il bien dire ?
 — Oh, il disait souvent que vous seul pouviez devenir chevalier. Il n’a confiance qu’en vous et…
 Waen parut à ce moment et coupa dans le récit de son sujet :
 — Ahón ! encore à bavarder pour ne rien dire, fit Waen un peu gêné.
 — Désolé mon seigneur, répondit timidement le serviteur, j’essayais seulement d’encourager le seigneur Aenalym.
 — Trêve de palabres, comment va notre chevalier ?
 — Inquiet, mais serein, répondit Aenalym en raillant.
 — Bien, bien, c’est tout naturel. Et je vois que notre Barlion n’a pas fermé l’œil de la nuit à en croire ton équipement. Cela te suffira-t-il ?
 — Oui, j’ai pris ce qui me convenait le mieux. Il m’a également préparé un beau destrier avec assez de vivres dans les fontes pour tenir plusieurs jours.
 Waen sortit un étui d’une sacoche attachée à sa ceinture.  
 — Bon alors voilà un itinéraire que j’ai dessiné sur cette carte. Tu n’as qu’à suivre la voie orientale et tu pourras te ravitailler dans ces quelques bourgades ; des amis s’y trouvent. (Il détacha une bourse de sa ceinture.) Voilà de l’or et de la cill.
 — Merci mon seigneur, mais j’ai déjà ce qu’il faut en matière de richesse, répondit Aenalym.
 — Foutaises ! grommela Waen. On n’est jamais assez riche lors d’un voyage alors prends ça veux-tu !  
 Et il lui mit une bourse bien garnie dans les mains.
 — On peut dire que je ne pars pas les mains vides, dit le chevalier amusé.
 — Non, mais on ne les garde jamais pleines bien longtemps, rétorqua Waen en ricanant.
 Aenalym soupira et regarda l’homme qui lui avait donné son diadème de chevalier.
 — Je vais donc devoir vous faire mes adieux, fit-il.
 — Mon jeune ami, je te souhaite le meilleur des voyages. Que les dieux te protègent durant ta course et n’oublie jamais que la Porte compte sur toi.
 
 Aenalym sortit de la pièce avec Waen. Ahón fit de même. Le chevalier grimpa sur sa selle ; ils se saluèrent une dernière fois et le jeune homme donna un coup d’éperon à son destrier. Il disparut derrière les bâtiments et les domaines anghariiliens, passa les grand-rues et rejoignit la place centrale de la citadelle. De cet endroit, il pouvait emprunter la grande voie pavée du Ventarí oriental et se diriger vers l’est.
 
 Quelques heures de trajets s’étaient déjà écoulées et l’après-midi commença. Aenalym finissait de déjeuner. Il était au bord de la voie, à proximité de bosquets, et s’était installé sur un tronc d’arbre qui avait été renversé. Il avait attaché son cheval non loin d’un herbage pour qu’il puisse également profiter de cette halte. La fraîcheur faisait place à une douceur galvanisée par Ura la divine. Alors qu’il reprit son chemin, Aenalym croisait les nombreux voyageurs et marchands provenant des deux directions. La voie ventaríenne étant le seul circuit assez sûr pour traverser la région, tous les honnêtes gens l’employaient sans la peur de risquer leur vie ou le pillage de leur convoi ; du moins, à l’intérieur du territoire ystherien, il n’y avait aucun danger : les milices de la Porte la parcouraient régulièrement.
 
 La route devint longue et monotone mais Aenalym parvint à franchir les collines d’Ensselèv. Le pavement était devenu moins fréquenté qu’à proximité d’Anghariil-adh ; les espaces entre les différents usagers se faisaient de plus en plus grands. Il ne pouvait plus distinguer sa cité natale qui était maintenant bien trop éloignée et masquée par de nombreux reliefs tapissés de verdure. Son regard se portait sur un groupement de cavaliers, une demi-douzaine environ, qui se trouvaient un peu plus loin derrière lui. Ils étaient vêtus de capes sombres et donnaient l’impression d’être lourdement cuirassés, ce qui n’était pas dans les habitudes vestimentaires des gardes ystheriens. Il se demandait de quelle contrée ils pouvaient provenir. Un doute lui traversa l’esprit lorsqu’il se remémora son départ : le souvenir de les avoir déjà croisés, non loin de l’entrée de la citadelle ystherienne, lui revint subitement. Il se sentit un instant rassuré, car il allait bientôt plonger dans la profonde campagne ystherienne, et l’idée de voyager entièrement seul lui était devenue presque insupportable. Il poursuivit son chemin et se glissa dans les nombreux coteaux verdoyants pour enfin disparaître parmi les arbres.
 
 La nuit venue, Aenalym se rendit compte qu’il avait mal calculé son trajet. Il ne put atteindre le village prévu pour passer la nuit et s’arrêta dans un endroit qui lui parut très charmant. La voie s’enfonçait dans un petit vallon aux pentes rudes. Les étroites bordures du chemin étaient couvertes d’arbustes et de bouleaux. Plus bas, une rivière ruisselait dans son lit de galets étouffés par la menthe et les orties. Le chevalier s’assit sur un rebord où poussait en abondance une herbe humide et fraîche. Il porta soudain son attention vers le virage que dessinait la voie et d’où provenaient des cliquetis métalliques. Une chaîne ou des éperons pourraient produire de tels sons, pensa-t-il ; Aenalym comprit qu’il n’était pas seul en ce lieu. Les bruits s’étaient instantanément interrompus alors que lui restait toujours attentif. Il se souvint des cavaliers capés qui étaient restés derrière lui avant de s’enfouir dans les vallons. Ses soupçons se justifièrent lorsqu’il vit des montures chevauchées d’ombres émerger de derrière la colline. L’une d’elles s’arrêta, tira brusquement l’épée de son fourreau et la fit irradier à la lueur de Varma, la lune des sables. Il cria à ses compagnons :
 — Il est là-bas ! Tuez-moi ça !
 Alors que les cavaliers chargèrent, l’Ystherien sursauta et la peur s’empara de lui. Il ne perdit pas un instant et, pris de panique, bondit sur sa monture, avec la ferme conviction de prendre la fuite. Il ne comprenait rien à cette agression soudaine et traversa le vallon aussi vite qu’il le pût. Son cheval s’activa aussi prestement que ses forces le permettaient et à chaque coup d’éperon, une brève accélération s’ensuivit. Aenalym était affolé. Il dépassa plusieurs collines au galop et regardait derrière s’il était toujours suivi. Mais il n’y avait personne, ce qui ne l’empêcha pas de continuer sa course folle jusqu’à ce qu’il fût complètement sorti d’Ensellèv. Quelques sits plus loin, il parvint à se ressaisir, et, observant le long chemin qu’il venait de parcourir, il n’aperçut plus âme qui vive. Il trempait encore dans les sueurs d’une frayeur qui jusque-là lui était inconnue. Il réalisa qu’il n’y avait plus de repos possible pour lui et il tenta de rejoindre directement sa prochaine étape pour y trouver plus de sécurité.


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\\\\\\\\\\\\\\\"Sache ô mon enfant que même le vieux chêne fut jadis un gland comme toi\\\\\\\\\\\\\\\"
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