[PHILO] "Ceci n'est pas de l'art", sur quoi se fonde cet avis ?

"Ceci n'est pas de l'art", sur quoi se fonde cet avis ? [PHILO] - Aide aux devoirs - Emploi & Etudes

Marsh Posté le 26-12-2009 à 10:15:12    

Bonjour,  
 
Le titre est explicite, je dois disserter sur le sujet suivant: "Ceci n'est pas de l'art", sur quoi se fonde cet avis ?
J'ai déjà entièrement rédigé mon devoir, le seul soucis, c'est que je doute d'avoir abordé toutes les pistes que suggère le sujet.  
J'ai redéfini la problématique pour répondre à "Par quels critères peut-on distinguer une oeuvre d'art d'un objet quelconque ?"  
Est-ce correct, incomplet ou totalement faux ? Y-a-t-il un risque de hors sujet ?
 
Merci d'avance  :)

Message cité 1 fois
Message édité par Aldane le 26-12-2009 à 18:22:46
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Marsh Posté le 26-12-2009 à 10:15:12   

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Marsh Posté le 27-12-2009 à 07:45:39    

Incomplet ou restrictif peut être parce qu'une prétendue oeuvre n'est pas forcément un objet .

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Marsh Posté le 27-12-2009 à 11:06:09    

Alors qu'est-ce, si ce n'est pas un objet? Peux tu me donner un exemple d'oeuvre d'art qui n'est pas un objet?  
"Objet" est défini au sens 1er par : "toute chose concrète, perceptible par la vue, le toucher."  
Merci

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Marsh Posté le 27-12-2009 à 11:21:36    

Une mélodie ou une odeur ne sont perceptibles ni par la vue, ni par le toucher :)

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Marsh Posté le 27-12-2009 à 12:50:26    

GG87 a écrit :

Une mélodie ou une odeur ne sont perceptibles ni par la vue, ni par le toucher :)


 
Oui c'est vrai que ça ne cadre pas avec la première définition, trouvée sur internet, mais totalement avec celle du Petit Robert (je suis très entété  :) )qui est la suivante : "Toute chose (y compris les êtres animés) qui affecte les sens, et spécialement la vue". La première est en fait plus proche de la définition de "chose".

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Marsh Posté le 28-12-2009 à 13:27:26    

Tu as redéfini ta problématique par la question "Par quels critères peut-on distinguer une oeuvre d'art d'un objet quelconque ?". OK mais encore faut-il effectivement connaître la définition des termes du sujet.
Art selon le Larousse:"Ensemble des procédés, des connaissances et des règles intéressant l'exercice d'une activité ou d'une action quelconque : Faire quelque chose selon les règles de l'art."
On ne parle nulle part de chose ou d'objet dans cette définition.

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Marsh Posté le 28-12-2009 à 13:31:57    

Il est clair qu'ici ça n'est pas ce sens du mot art dont il s'agit.

Reply

Marsh Posté le 28-12-2009 à 17:06:10    

Aldane a écrit :

Bonjour,  
 
Le titre est explicite, je dois disserter sur le sujet suivant: "Ceci n'est pas de l'art", sur quoi se fonde cet avis ?
J'ai déjà entièrement rédigé mon devoir, le seul soucis, c'est que je doute d'avoir abordé toutes les pistes que suggère le sujet.  
J'ai redéfini la problématique pour répondre à "Par quels critères peut-on distinguer une oeuvre d'art d'un objet quelconque ?"  
Est-ce correct, incomplet ou totalement faux ? Y-a-t-il un risque de hors sujet ?
 
Merci d'avance  :)


 
Sujet intéressant et très classique. Comme d’habitude, la problématisation du sujet (introduction) est un moment important de la dissertation ! Qu’est-ce qui est de l’art, qu’est-ce qui n’en est pas ? Existe-t-il un critère de jugement ? Pour vous mettre sur la voie, voici ce qu’on peut en dire :
 
Pour distinguer l’art de ce qui n’en est pas, le plaisir est sans doute le critère le plus souvent utilisé. C’est ce que nous ressentons lorsque nous sommes en présence d’une oeuvre d'art qui va nous servir à l’évaluer. Le plaisir est l’élément majeur de notre jugement, élément sans lequel on peut à bon droit supposer que l’oeuvre ne serait pas vécue ou perçue de la même façon : le caractère utile d’un ouvrage est au contraire ce qui nous intéresse dans le domaine de l’artisanat. On aura alors tendance à dire face à un objet qui ne nous plaît pas qu’il "n’est pas de l’art". Or, comme nous avons l’habitude de définir l’art par la beauté des oeuvres, c’est la nature du beau qui est mise en question ici : si le beau est la qualité d’un objet, cette qualité signifie, non quelque chose que nous reconnaîtrions en l’objet, et dont nous aurions quelque notion en nous, mais la présence en l’oeuvre de la cause d’une émotion particulière en nous. Est reconnu comme art ce qui est beau, mais la pure saisie de la beauté, plutôt que de dépendre d’un jugement, d’un acte intellectuel qu’il faudrait purifier de toute intervention de la sensibilité, serait au contraire une expérience purement émotive, dégagée de toute implication intellectuelle, et causée par l’action d’une oeuvre investie d’un pouvoir spécial sur la sensibilité humaine. Ainsi, face à une oeuvre qui ne nous plaît pas, c’est-à-dire que nous ne trouvons pas belle parce qu’elle ne provoque aucune émotion en nous, nous aurons tendance à dire que "ce n’est pas de l’art".
 
Mais comment reconnaître le beau ? Comment savoir que le plaisir, naît de la rencontre avec une oeuvre d’art, est bien un plaisir lié au beau, un plaisir véritablement esthétique, et non un plaisir lié au joli, au sublime ou à l’agréable (le joli et plus aimable, plus séduisant, plus coquet, plus menu que le beau, plus noble, plus sévère, plus grandiose. Le beau se distingue aussi du sublime, qui évoque une certaine démesure, un déséquilibre de forces. Le beau s’oppose enfin à l’agréable, qui ne concerne que le plaisir des sens. On qualifiera ainsi plus proprement une robe de jolie, une mer déchaînée de sublime, une couleur ou un parfum d’agréable, même si une robe peut être dite sublime ou une couleur jolie) ou encore un plaisir qui ne serait qu’une satisfaction d’ordre intellectuelle (connaissance du vrai) ou morale (respect d’une valeur) ?
 
Or, ce qui plaît d’abord dans l’art (en dehors d’une éducation respectueuse de sa spécificité), ce n’est pas le beau, mais ce qui flatte la sensibilité, que celle-ci soit naturelle ou acquise par la culture. Ce qui permet de fonder une critique de l'art par rapport au plaisir éprouvé, c'est la nature même de ce plaisir !
 
L’art est d’abord un problème de sensibilité individuelle : le goût.
 
En effet, je ne suis pas toujours d’accord avec les autres quand il s’agit de juger de la beauté, qu’il s’agisse d’ailleurs d’un être humain, d’un paysage ou d’une oeuvre d’art. On peut même dire sans doute que je ne partage jamais complètement les goûts de quelqu’un : le goût est une marque de ma singularité. C’est que juger de ce qui est de l’art fait appel à ma subjectivité, au domaine intime de mes sentiments. Ne dit-on pas couramment "aimer" pour dire : "trouver beau" ? On pourra bien me donner l’ordre de trouver beau ce que je n’aime pas, jamais on ne m’en convaincra intimement. Seul je puis savoir ce que je ressens.
 
Le jugement de goût est donc subjectif et strictement individuel. Sera juger comme appartenant au domaine de l’art, les objets susceptibles de nous procurer un plaisir des sens, lié à l’agréable. En ce qui concerne l’agréable, en effet, le principe "à chacun son goût" fait loi. C’est pourquoi l’artiste, qui veut être reconnu dans son statut, cherche souvent à plaire : il doit (au sens où il subit une contrainte) adopter une conduite de séduction afin de créer la dépendance à l'objet chez quiconque y cèdera. Mais si l’artiste doit se vulgariser pour plaire, s’adapter à la sensibilité de ses contemporains pour susciter une appréciation positive de l’amateur, c’est parce que celui-ci juge moins de la beauté de l’oeuvre que de ses agréments : l’artiste doit se plier à la loi du goût qui fait que le jugement de l’amateur n’est jamais pur, mais toujours dominé par l’intérêt sensuel, tout à fait personnel, qu’il porte à l’objet. Son oeuvre n'est pas alors une oeuvre d'art.
 
Le public en effet confond facilement le beau et l’intérêt, le beau et ce qui plaît. Or, au début de la Critique de la faculté de juger Kant découple le beau de l’intérêt : si ce que j’appelle "beau" est ce qui a un intérêt pour moi, alors je confonds le beau et l’agréable. Or, "il ne faut pas se soucier le moins du monde de l’existence de la chose, mais y être totalement indifférent pour jouer le rôle de juge en matière de goût" (cf. § 2). Le goût est donc indépendant de l’intérêt. Quand nous voulons savoir si une chose est belle, nous ne voulons pas savoir comment nous en servir ou quelle importance elle peut avoir pour nous (pour, comme on dit, notre petite personne) mais il s’agit de se contenter de la considérer. Quand je suis capable de dire qu’une chose est belle sans y mêler l’intérêt, alors je fais preuve que j’ai du goût (cf. § 2), pour reprendre l’expression kantienne, et même que moi-même je suis de bon goût. Le mauvais goût, justement, consiste à mêler, dans l’interrogation pour savoir si une chose est belle, un intérêt personnel. Tel est le sens de l’exemple du palais au § 2 de la Critique de la faculté de juger. Si on me demande si j’aime un palais et que je réponds qu’il est fait pour les touristes ou que je préfère ma cabane, j’énonce un jugement qui relève du mauvais goût, c’est-à-dire du goût vicié : je ne cherche pas à dire si telle chose est belle mais je dis en quoi elle ne me plaît pas. En d’autres termes, quand je mêle de l’agréable à mon jugement, je ne cherche pas à universaliser mon propos (trouver "le" beau) mais j’expose ce qui me plaît ou me déplaît, j’expose mon avis ou mon opinion. Ainsi, quand on dit d’un critique d’art qu’il a mauvais goût, on peut vouloir dire que l’on n’est pas d’accord avec lui : une opinion se confronte à une autre opinion. Plus profondément, je peux vouloir dire qu’il ne fait qu’exposer son avis, son opinion, ce qui lui plaît. Or, est-ce ce qu’on lui demande ? Nous lui demandons plutôt une démonstration étayée, c’est-à-dire un travail qui vise à l’objectivité sans toutefois jamais l’atteindre même si ce travail vaut mieux que le simple fait de dire ce que subjectivement nous aimons. C’est l’idée de Léautaud dans ses Carnets quand il écrit : "Le critique doit-il donner son avis ? Non, il doit dire la vérité". L’ambition est certes grande mais le travail est passionnant : ne pas tomber dans le mauvais goût, c’est-à-dire dans l’exposition plate de mes goûts personnels, mais être dans la recherche de la vérité, ce que Kant appelle la satisfaction pure désintéressée (cf. seconde partie de la dissertation). Le mauvais goût est mauvais au sens de nuisible : il me coupe de l’oeuvre parce que je fais passer mes intérêts avant l’oeuvre que je dois juger pour elle-même.
 
Qu’est-ce que l’art pour le jugement de goût ? Il se ramène à l’expérience subjective, au jugement de sensibilité, à l’agréable, mais aussi aux conventions d’époque et aux modes socio-culturelles. Il est arbitraire et / ou d’éducation. L’art est donc aussi un problème de culture :
 
Je juge en effet une oeuvre d’art à la lumière de mon expérience personnelle, qui n’est jamais la même que celle des autres. Ce que j’ai vu et entendu modèle ce que j’apprécie. Mes souvenirs m’appartiennent et individualisent mon jugement de goût par le prisme de ma culture. Chacun a donc sa culture propre. Mais la culture d’un individu se trouve à l’intersection de différents groupes en lesquels il se reconnaît. Ainsi, j’appartiens à la fois à une époque, un pays, une génération, un milieu social, qui se caractérisent par l’uniformité de leurs canons. L’appartenance à chacun de ces groupes sociaux détermine dans un sens le goût d’un individu. Mais la multiplicité de ces groupes empêche chacun d’entre eux de le déterminer entièrement, et garantit à l’individu à la fois la singularité de sa personnalité et l’unicité de son jugement de goût. C’est donc par la socialisation que l’individu acquiert, avec d’autres individus, une communauté de goût. Sous son influence, le goût s’universalise, par l’effet d’une culture du goût : on parle alors de civilisation (Kultur).
 
Mais cette culture elle-même consiste en un compromis du plus petit dénominateur commun, bien plus qu’une connaissance universelle. L’artiste doit donc, pour survivre, plaire, c’est-à-dire habiller le beau des conventions et au sein des conventions : l’art doit s’imposer comme une évidence et susciter l’admiration ou éveiller le désir de la possession ou de l’imitation en respectant et flattant la sensibilité de l’amateur, elle-même formée par l’état de la culture à un moment donné de son développement. L’art est certes le plus souvent de rencontre, et peut donc surprendre. Il peut même intimider, voire inquiéter. Mais il est ordinairement vécu comme indiscutable : il s’impose parce qu’il est l’expression d’un état de la culture des peuples. Est-ce encore de l'art en l'absence de génie et d'originalité ?
 
Mais l’art est aussi le problème de l’objet lui-même :
 
si l’art doit plaire, apporter un plaisir sensible, c’est que, à l’opposé de la théorie du plaisir subjectif qui déniait toute objectivité au beau, la théorie du beau objectif, dont nous avons avec Diderot (cf. Lettre sur les sourds et muets) un bon représentant, affirme que le goût en général consiste dans la perception des rapports, c’est-à-dire des relations d’harmonie, d’ordre et d’équilibre que l’esprit humain perçoit dans les productions de la nature ou, justement, dans les oeuvres de l’art. Cournot (cf. Essai sur l’enchaînement des idées fondamentales) reprendra cette thèse. Si l’art peut plaire, c’est parce que le beau est une propriété de l’objet beau qui s’imposerait de lui-même à chacun et à tous en vertu d’une conformité universelle de la sensibilité humaine. Plus encore qu’un critère, le beau comme propriété de l’objet n’a plus besoin qu’on en juge pour produire ses effets : la beauté, comme le dit Burke, "est le plus souvent une qualité des corps qui agit mécaniquement sur l’esprit humain par l’intervention des sens". Par l’effet véritablement automatique d’une détermination, le beau s’impose à l’individu, qui n’a pas le choix. Bref, ici, l’art de la séduction est de produire une parfaite imitation de la nature.
 
Il est facile de montrer que la séduction dans l’art relève aussi d’une satisfaction intellectuelle ou morale qui impose à l’artiste de se soucier de son public en lui délivrant un message (thèse scientifique, moralisatrice, philanthropique, édifiante, de type religieux ou politique).
 
Or, le véritable artiste crée son oeuvre sans se soucier du public à qui il n’a aucun compte à rendre. Il la lui propose. Il l’impose. En cas d’échec et d’incompréhension, la rencontre ne s’effectuant pas, il la retire ou se retire. Vouloir plaire est une conduite naïve, adolescente, mais il est ici encore plus sûrement un comportement de pure démagogie. Vouloir plaire, c’est se mettre au niveau de… Or, à qui plaît-on ? Quelle est la qualité de celui qui prétend juger d’une œuvre ? Que vaut l’appréciation de l’amateur ?
 
L’originalité est le propre de l’artiste authentique. Son talent est singulier, sa vision est inédite. Ainsi, le génie créateur est à l’art ce que le conquérant est à la guerre : les oeuvres sont autant de batailles ou de campagnes dont l’initiative ne se discute pas. Réussites ou échecs se situent "par delà le bien et le mal". Quand l’accord de l’oeuvre et de son public se réalise, c’est que ce public s’est soumis à l’oeuvre (et non l’inverse). Un goût se forme, une école naît avec son cortège de disciples, d’imitateurs, d’élèves, de professeurs et de critiques. Les oeuvres du génie deviennent des modèles. Sa vision fait autorité et s’impose, malgré elle, à la manière d’une loi, mais toujours au-dessus des lois, des règles et des canons communément admis...
 
Seconde partie : analyse du plaisir esthétique : Kant...


Message édité par l'Antichrist le 28-12-2009 à 17:30:49
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