Ecriture d'un roman d'amoooooour et de relations

Ecriture d'un roman d'amoooooour et de relations - Arts & Lecture - Discussions

Marsh Posté le 06-09-2006 à 15:36:59    

Bon, j'ai bien regardé les sujets mais tout le monde semble décider à écrire uniquement de l'heroic fantasy et de la science fiction (moi y compris).
Sur les conseils d'une amie très proche, je me suis dit que j'allais essayer de pondre quelque chose de différent, qui parlerait d'amour, de relations, de cul, de désir, de désillusions, de recherches, de Meetic, bref de plein de trucs qui touchent les djeunz actuels.
 
Ca, normalement, je sais faire.
Alors oui, c'est pas de la grande littérature. Oui, c'est pas la suite des aventures de Rekk ou des Couleurs. Mais c'est de l'écriture, et au fur et à mesure ça me donne de plus en plus envie de prendre mon clavier.
 
Que pensez-vous de cette (courte) introduction ?
 
 
*********************************************
 
 
 
Il paraît que c’est toujours mieux lorsqu’on dit la vérité lors d’une rupture. Que ça permet de comprendre ses défauts, de s’améliorer, de progresser, de faire plus rapidement son deuil. Je ne sais pas quel sociologue sous acide a écrit ce tissu d’âneries, mais j’aimerais pouvoir lui insérer avec amour sa thèse de doctorat dans le rectum pour lui apprendre le véritable sens du mot douleur.
Non, soyons honnêtes. Les mensonges des filles sont quand même les bienvenus.
 
- Je suis désolée, je ne me sens pas prête à construire quelque chose de sérieux en ce moment
- Non, mais tu es vraiment quelqu’un de gentil, d’adorable… je suis trop conne de partir  
- Ca n’a rien à voir avec toi, c’est moi, c’est moi qui débloque
 
C’est reposant, ça. On sait tous que c’est faux – la preuve, on utilise les mêmes lorsque c’est à notre tour de rompre. Mais ça nous met un peu de baume au cœur, un peu de sourire sur les lèvres avant d’abandonner celles qu’on embrassait. Qui veut de l’honnêteté, quand on peut avoir un peu de guimauve pour le même prix ?
 
Mais Véronique, c’est différent. Véronique, elle n’a jamais aimé mentir. Et ses paroles résonnent encore à mes oreilles plusieurs heures après son départ et la porte claquée. C’est fou ce qu’une fille peut être cruelle quand elle est en colère. En plus, elles savent frapper où ça fait mal.
 
- Je suis désolée mais franchement, au lit, c’est pas vraiment ça. A chaque fois, je m’emmerde et ça m’emmerde de m’emmerder. Alors il vaudrait peut-être mieux qu’on se sépare tout de suite plutôt que de continuer et de risquer de s’attacher, tu ne crois pas ?
 
Je ne sais pas ce que je lui ai répondu. Probablement quelque chose comme « ben c’est ça, fous le camp, connasse ! ». Ma répartie n’est pas formidable lorsque je suis pris par surprise.  
 
Six mois.
Putain, six mois !
Six putains de mois !
Je croyais que cette histoire allait durer, moi. J’étais bien parti pour me caser, ranger ma panoplie de célibataire, devenir un véritable petit couple avec machine à laver commune. C’est vrai, vous savez à quel point c’est difficile de trouver une fille bien, de nos jours ? Quand on en trouve une belle, elle est lente. Quand elle est brillante, elle est chiante. Et quand elle est gentille, elle est déjà prise.
 
La vie, c’est la jungle, et quelqu’un d’autre va maintenant profiter du régime de banane que je m’étais trouvé.
 
Je me laissais tomber sur mon canapé-lit, les bras derrière la nuque. Je me sentais particulièrement déprimé, mais je n’avais pas envie de pleurer. Ma tristesse, je la gardais pour moi, même lorsque j’étais seul.  
Il y avait encore des emballages de préservatifs par terre, preuve que j’avais pourtant fait de mon mieux. Mais visiblement, rien à faire. Mauvais coup un jour, mauvais coup toujours. Au plafond, le poster d’Akira me rendait mon regard, impassible. Peut-être que je devrais l’enlever. Peut-être que c’était un tue-l’amour, ce truc de manga glauque qui surplombait le lit. Je haussais les épaules. Tel que je me connaissais, ce ne serait pas demain qu’une fille viendrait dans le coin. J’avais le temps de changer toute la décoration, si je le voulais.
 
Lorsque je me suis relevé, la nuit tombait. Je n’avais pourtant pas l’impression d’être resté allongé si longtemps. J’ouvris la fenêtre et me penchai en avant pour profiter de l’air plus frais de ce crépuscule. Au loin, le soleil se couchait sur les tours de la Défense. Paris prend un autre relief quand le ciel s’embrase.
Je baissai lentement les yeux vers le pavé, trois étages plus bas. Les ombres jouaient sur mon visage. Pourquoi pas, après tout ? Qui me regretterait, si je faisais le grand plongeon ? Peu d’amis, peu de charme, peu d’argent, peu de responsabilités. Je me penchai un peu pour évaluer la distance, puis me rejetai en arrière, le cœur battant. Peu de courage aussi.
 
Non, il était hors de question de se suicider. Ce serait trop facile, et puis ça avait l’air douloureux. Non merci, j’étais douillet.
Restait la seconde option : trouver des amis compatissants et me bourrer la gueule en leur compagnie. C’est sympa, des amis. Dans des moments comme ça, ils ne jugent pas, ne critiquent pas, et se contentent de secouer la tête en crachant sur les filles en général et sur la persécutrice du soir en particulier. Je me sentais une envie irrépressible d’une soirée misogyne.
- Ce soir…. Murmurai-je.
 
Je fouillai le répertoire de mon portable, mon enthousiasme retrouvé. Puis je le refermai avec un claquement sec. Nous étions mercredi. En pleine semaine, qui allait vouloir se déplacer pour boire avec moi ? Un verre, peut-être, mais vraiment jusqu’à l’oubli ? Personne ! Ils tenaient tous à leur travail, et je les comprenais tout à fait. Salauds d’égoïstes.
 
Je regardai machinalement les noms qui défilaient sur l’écran. Pas beaucoup de filles, évidemment. Plutôt des collègues de travail, des gens de ma famille, des relations d’enfance. Et puis… et puis Bernard.
 
Je restai un instant immobile, le doigt sur son numéro. En temps normal, c’était quelqu’un d’épuisant. Il était toujours de bonne humeur, toujours actif, toujours énergique. Il coupait la parole à tout le monde, parlait fort, riait beaucoup. Les gens le regardaient avec un mélange d’amusement et d’exaspération ; moi aussi. Exactement ce dont j’avais besoin ce soir. Tout, sauf ce silence désagréable qui me vrillait les oreilles. Et puis lui ne rechignait jamais devant l’alcool, même au milieu de la semaine.  
 
Je composai son numéro d’un index décidé. Tonalité, sonnerie, puis une voix joyeuse dans mes oreilles.
- Salut Fred ! Ben alors, ça va pauvre loque depuis le temps ? T’es pas en train de troncher ta Véro ?
 
C’est le souci de la présentation de numéro, on sait qui c’est donc on répond tout de suite, sans avoir eu le temps de jauger de l’humeur de la personne qui appelle. Il faudrait que je pense à donner mon opinion aux sociétés de téléphonie mobile. Je suis sûr que ça  les aiderait dans leurs plans marketings.
- Salut, grommelai-je
- Oh, ça n’a pas l’air d’aller, mon gars. C’est encore Véronique là-dessous ? Tu as loosé et tu l’as mise enceinte ? Ou elle t’a refilé une merde quelconque ? Si c’est le cas, je préfère pas savoir
 
Bernard était gentil, mais il ne faisait jamais dans la dentelle. C’est pour ça que je l’avais appelé. Pas le genre de gars à se lamenter avec moi et à trouver plein d’excuses pour expliquer ce qu’il s’était passé. Il irait droit au but
- Non, non. En fait…
J’hésitais.
- Crache le morceau, gars, je suis sur le périph’ et je n’ai pas de kit mains libres. Un flic et je me prends l’amende.
Comment résister à des arguments aussi convaincants ?
- Elle m’a plaqué. Véronique m’a plaqué
Silence au bout du fil. Il lui faut le temps d’assimiler la nouvelle, probablement. Sous ses dehors bourrus, c’est quand même un chic type. Puis j’entends sa voix grésiller de nouveau.
- Désolé pour le délai, une bagnole avec un gyrophare, mais c’était juste un truc de dépannage. J’ai flippé pour le téléphone. Ouais, tu disais ?
Au temps pour la compassion.
- Véronique m’a plaqué
- Oh.
- Eh.
De nouveau un silence, mais cette fois-ci il réfléchit. Ca lui arrive, parfois.
- Bah, je ne l’avais jamais aimée de toute façon. Un peu trop prétentieuse, et puis pas si belle que ça, quand on y pense. Bon. J’ai quelques bouteilles dans le coffre, j’allais à une soirée mais je peux annuler. Je suis chez toi dans vingt minutes.
- Attends, je ne veux pas que tu foires ta soirée pour….
- Se bourrer la gueule, j’appelle pas ça foirer une soirée. J’arrive, je te dis. Il y a jamais de place dans ton quartier pourri mais je vais faire de mon mieux.
Il raccrocha.
Le silence a une certaine qualité, après le débit haché de Bernard. Ce mec est un enfoiré de première dans de nombreux domaines, mais il laisse rarement tomber ses amis. C’est déjà beaucoup.
Je me laissai retomber sur mon canapé, la tête dans les mains. Ce soir, j’allais tout oublier à la vodka et au mauvais whisky.  
 
Mais demain ? Et les autres jours ? Pour la première fois, l’absence de Véronique se fit réellement sentir. J’avais comme une boule dans la gorge, et mes mâchoires se contractaient étrangement. Je me rappelais la chanson de The Cure, et je grimaçais étrangement. Boys don’t cry, les garçons ne pleurent pas.
 
Les garçons, non, mais les hommes ?
Quelque chose coulait sur ma joue. Je le récupérai de la langue. C’était salé.


Message édité par Grenouille Bleue le 07-09-2006 à 15:22:13

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Ma chaîne YouTube d'écrivain qui déchire son père en pointillés - Ma page d'écrivain qui déchire sa mère en diagonale
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Marsh Posté le 06-09-2006 à 15:36:59   

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Marsh Posté le 06-09-2006 à 16:24:39    

Toi, Anna Gavalda, ça te fait de l'effet...
 
Opinion rapide:
1) Pas mal, ça ressemble furieusement à ton blog
2) Un jour, à l'occasion, il faudrait que tu finisses un roman avant d'en commencer un autre.
3) De mémoire, c'est pas Kill Bill le poster sur ton mur?


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DaViSo http://daviso.free.fr
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Marsh Posté le 06-09-2006 à 16:45:12    

pour un truc posté sur un forum, c'est vachement bien.
pour de la lecture comme quand on a envie de lire un truc, c'est pas mal: pas forcément accrocheur (mais bon au bout d'une page c'est un peu normal) mais pas désagréable à lire non plus.
 
ptite remarque, il me semble qu'on ne doit jamais critiquer les ex de potes, pour ce genre de choses:
- oui, bah t'en fais pas, c'était une grognasse, elle te mérite pas.
- (sick) peut etre, merci
(deux semaines plus tard)
- ca va mieux?
- ouais, on est a nouveau ensemble, c'est toi le connard qui disait du mal d'elle? c'est à cause de gars comme toi qu'on s'est séparés :fou:
 
:crazy:

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Marsh Posté le 06-09-2006 à 17:17:30    

fing fang fung a écrit :

pour un truc posté sur un forum, c'est vachement bien.
pour de la lecture comme quand on a envie de lire un truc, c'est pas mal: pas forcément accrocheur (mais bon au bout d'une page c'est un peu normal) mais pas désagréable à lire non plus.
 
ptite remarque, il me semble qu'on ne doit jamais critiquer les ex de potes, pour ce genre de choses:
- oui, bah t'en fais pas, c'était une grognasse, elle te mérite pas.
- (sick) peut etre, merci
(deux semaines plus tard)
- ca va mieux?
- ouais, on est a nouveau ensemble, c'est toi le connard qui disait du mal d'elle? c'est à cause de gars comme toi qu'on s'est séparés :fou:
 
:crazy:


Ou mieux encore, comme ce dialogue dans "Quatre mariages et un enterrement" (de mémoire, donc en gros) :
 
- Ah, ta copine est là !
- Ce n'est plus ma copine !
- Ah, ben tant mieux, parce que franchement, celle-là... on se l'est tous faite, hein, et c'était pas difficile !
- ... Maintenant c'est ma femme !  :heink: :fou:  
- Gnnn ? :ouch:  :sweat:  
 
Pour revenir au sujet, je trouve ce début très intéressant, et pourtant je n'aime pas ce genre de littérature : je fais partie des nombreux lecteurs qui n'aiment (presque) que la SF, le fantastique, l'étrange, etc.  ;) Mais là ça a l'air sympa, ça me donne envie de continuer !


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La Petite Librairie : critiques de romans
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Marsh Posté le 06-09-2006 à 22:38:06    

Bon pour ma part se n'est pas le genre d'histoire que j'apréci, en fait, soyons honête, les histoires d'amours sont le seul genre d'histoire que je n'aime pas. Donc c'est plutôt mal tombé pour ma première critique sur ce forum...
Je ne vais donc m'attacher qu'au style.
Et bien tu as une façon d'écrire très agréable. Tu sais faire parraitre tes personnages attanchant, sans leur imposé aucun cliché.
D'habitude je n'aime pas la narration à la permière personne, mais pour une fois je ne la trouve absolument pas peusante.
Ton texte est fluide,et l'humour bien venu et bien maitrisé.  
 
 
En fait je n'ai relevé qu'un tout petit problème:
 

Citation :

Je fouillai le répertoire de mon portable, mon enthousiasme retrouvé. Puis je le refermai avec un claquement sec. Nous étions mercredi. En pleine semaine, qui allait vouloir se déplacer pour boire avec moi ? Un verre, peut-être, mais vraiment jusqu’à l’oubli ? Personne ! Ils tenaient tous à leur travail, et je les comprenais tout à fait. Salauds d’égoïstes.  
 
Je regardai machinalement les noms qui défilaient sur l’écran.


 
 
s'il a refemé son portable, comment peut-il lire les noms qui défilent? :??:  

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Marsh Posté le 07-09-2006 à 11:19:29    

Bah c'est Grenouille Bleue...il peut pas s'empêcher de faire de la SF :)
 
J'ai trouvé ça assez sympa...jsuis pas sûr de ce que ca donnerait si c'était plus long mais comme ça c'est bien.
 
@+


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One day I'll be dead and THEN you'll all be sorry.
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Marsh Posté le 07-09-2006 à 15:44:04    

Un peu de lumière.
Un bruit de tonnerre.
Un parfum dans l’air.
Je me réveille, ouvre un œil, tourne sur le côté. J’ai désespérément mal au crâne, et du mal à rassembler mes pensées. A mes pieds, une bouteille de vodka vide. Sur la table, de la manzana glacée. Vide aussi. Je n’essaie même pas de compter les canettes de bière sur le sol. Ca ne m’a jamais réussi. Je me lève péniblement – tout tourne, j’ai vaguement envie de vomir.
- Ca va mieux ? Fini de ronfler ?
 
Je me retourne brutalement. La pièce tourne sur elle-même et je m’affale sur le canapé-lit. Je n’ai même pas pris la peine de le défaire la nuit dernière. En face de moi, Bernard est en train de préparer un café serré. Il a l’air désespérément en forme - je l’entends siffloter quelques mesures de Men in Black. Ce gars-là n’est pas humain. Il a bu trois fois plus que moi, et il n’en garde pas la moindre trace. Pendant que j’essaie de rassembler mes pensées, il surveille tranquillement l’eau en train de bouillir. Et puis la question, innocente.
- Bon, tu veux faire quoi au sujet de Véro ?
- Ben…
 
Bernard revient avec son café. Il n’en a pas fait pour moi, le salaud. Je me traîne péniblement dans la cuisine pour m’occuper de ma propre tasse. Il s’assied confortablement à la place que je viens de libérer.
- Hier tu t’es effondré tellement vite qu’on n’a pas eu le temps d’en parler. Mais maintenant que ça va mieux, on va peut-être en discuter, non ? Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
Maintenant que ça va mieux ?  Il en a de belles, le Bernard, je me sens au bord de la syncope. Je jette un œil au réveil. Les chiffres rouges clignotants me ramènent à la réalité : 8h du matin.
- On en parlera une autre fois, là faut que j’aille au boulot.
- Dans cet état ? (Bernard ricane). Tu te ferais virer dans la minute. T’es pas en état de tenir un costard-cravate là. Et puis j’ai pris la liberté de les appeler et de leur dire que tu étais malade. Ils ont été super compréhensifs.
Je me tourne machinalement vers le téléphone.
- Tu les as appelés ? Tu n’avais pas le numéro
- Trouvé sur les Pages Jaunes
- Mais je n’ai rien entendu…
- Tu ronflais comme une vieille loque
 
C’est difficile de discuter avec Bernard. Il a réponse à tout, il se mêle de tout, et il semble toujours penser qu’on lui doit des remerciements. Ou alors c’est un gars formidable, et j’ai de la chance d’être son ami. J’ai du mal à me décider ce matin. Rapport au mal de crâne.
- Et ils n’ont pas fait de commentaires, alors ?
Il éclate de rire.
- Je pense qu’ils croient que tu es homo, maintenant. Ca va vite, les rumeurs dans les petites boîtes. Mais bon, au moins tu vas pouvoir te reposer aujourd’hui.
- Super, marmonné-je.
Mon café a assez refroidi pour que j’y trempe mes lèvres. Comme d’habitude, le liquide me donne un coup de fouet immédiat. Paraît que ce n’est pas possible, que ça n’agit pas instantanément, que c’est un effet placebo. Ouais. En attendant, ça me fait du bien et c’est l’essentiel. Les brumes s’effilochent peu à peu dans mon cerveau. J’ai la gueule de bois, je suis nouvellement célibataire, et j’ai une journée de repos.
- Je pense que je vais me recoucher
- Et moi je pense que tu vas me parler un peu. C’est vrai, quoi, je sacrifie mes stocks d’alcool pour toi, je te materne, mais j’aimerais quand même savoir le fin mot de l’histoire. Pourquoi elle s’est barrée, la Véro ? Il me semblait qu’elle tenait pas mal à toi, non ?
- Non…
 
Est-ce que c’est une bonne idée de tout raconter à Bernard ? Il est journaliste, enfin, apprenti journaliste, et il fait feu de tout bois. Mon histoire, pour lui, ce serait du pain-bénit. J’imagine déjà les gros titres dans les journaux, la première page avec une photo d’un gars en train de ronfler, la bave aux lèvres : « Abandonné pour ses performances sexuelles ! », sous-titre : « Une enquête au cœur de l’absence de stupre et de luxure ! », sous-sous titre : « Un voisin témoigne : d’après lui, il n’entendait jamais rien malgré la minceur des murs ! ».
 
Heureusement, Bernard n’écrit que pour un magazine de la Nuit Parisienne, qui n’a pas grand-chose à faire de ce genre de scandale. Mais ça ne me donne pas plus envie de parler. Raconter l’épisode d’hier, c’est revivre l’humiliation en direct – et puis c’est admettre que les choses se sont réellement passées et que je suis désormais seul.
- Bon, t’as quelque chose à bouffer dans ton frigo pendant que je t’écoute ?
Pire qu’une nuée de sauterelles, le Bernard. Il a déjà attrapé mes restes de poulet, un vieux tube de mayonnaise, de la haarissa, et il se prépare à faire frire un cordon bleu. Ne riez pas, je sais que je ne mange pas équilibré. Mais se faire un mélange comme ça… je me sens pris de nausée, et je doute que c’est l’alcool. Pour faire diversion, je commence à parler.
- Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? C’est fini, c’est fini. Elle m’a largué comme une merde.
Il m’observe, impavide, le morceau de poulet à la main.  
- Il devait bien y avoir une raison, non ? Connaissant les filles, un truc ridicule. Tu avais oublié son anniversaire ? Sa fête ? Le bichonnage de son chat ?
Je hausse les épaules.
- D’une certaine manière, ça s’approche plutôt de ta dernière proposition
- D’une certaine manière… tu es pédant, mon gars, et ça ne te réussit pas. C’est une question de chat, alors ?
- Plutôt de chatte…
 
Il rigole. Je lui parle du drame de ma vie, je lui avoue à demi-mots mes insuffisances, et il rigole. Le pilon de poulet tremblote dans ses mains alors qu’il se marre.
- Bah alors, qu’est-ce que tu as fait ? Enfin qu’est-ce que tu n’as pas fait ?
- Ca va, ça va…
Je suis embarassé, et il le comprend. Ca fait plaisir, parfois, de réaliser qu’il peut avoir du tact.
- Bon. On s’en fout. Toute fille qui se barre pour quelque chose comme ça est stupide et ne te mérite pas. Prochain objectif : te trouver quelqu’un de bien
- C’est un peu important, en même temps, non ?
J’ai un besoin désespéré d’être rassuré. Il le fait à sa manière.
- Bien sûr que c’est important mais on s’en fout, c’est comme tout, ça s’apprend. La fille bien qu’on te trouvera, elle t’apprendra. Si elle tient à toi, elle te le montrera
- Oh
- Eh ouais, c’est ça la vie. Bon, tu t’habilles et on va t’en trouver une ?
Je reste les bras ballants. Lui ne se laisse pas démonter et termine la mayonnaise avec appétit.
- Quoi, maintenant ?
- Il n’y a pas de meilleur moment. Les filles se rendent au bureau, tu vas adorer
- Mais…
- Prends une douche quand même, tu n’as pas l’air très frais.
 


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Marsh Posté le 08-09-2006 à 10:36:31    

Ah bah comme ça aussi c'est bien...jsuis pas sûr de ce que ça donnerait si c'était plus long  ;)  (jvais finir par avoir le bouquin !)
 
J'espère que vous avez tous au moins un pote comme Bernard sur qui on peut vraiment compter, même s'il est un peu 'brut de décoffrage', parce que ça vaut son pesant d'or. Bon j'espère que dans la suite de l'histoire, son enthousiasme créera des problèmes à Fred...
 

Citation :

Un peu de lumière.
Un bruit de tonnerre.
Un parfum dans l’air.


 
Ca me dit quelque chose mais j'arrive pas à mettre la main dessus...Cela dit le 'parfum' dans l'air en l'occurence doit plutôt s'approcher de l'odeur nauséabonde d'une soirée un peu trop alcoolisée...sans parler de la bouche pâteuse (que tu n'abordes pas non plus d'ailleurs...)
 
Je perçois mal comment on peut tenir une narration comme celle-ci sur un bouquin ou même sur une nouvelle. C'est très marrant et sympa comme ça mais ça doit être très lourd (pas chiant...lourd) sur la durée. De plus, cela doit vraiment brider l'histoire d'être si proche d'un unique personnage, si centré sur celui-ci. (Ca me fait penser un peu à A Year in the Merde...qui est marrant au début et qui devient rapidement très chiant...cela dit si t'arrive à te faire autant de fric que Clarke avec son livre miteux, tu peux être content !).
 
Il doit sûrement exister une plétore de bons livres écrits sous cet angle...si vous pouvez m'en citer un ou deux, j'aimerais vraiment voir comment une telle narration peut être mise à profit.
 
Je suis très content que tu aies lancé ce topic car même si j'aime beaucoup la SF et la Fantasy, il n'y a vraiment pas que ça dans la vie !


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Marsh Posté le 14-09-2006 à 10:33:33    

Décidément, moins de lecteurs que lorsque je faisais du medfan... comme quoi ;)
 
 
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Comme d’habitude, le métro est bondé. Le transport, c’est vraiment une des choses auxquelles je ne me ferai jamais dans la capitale. On a tout à proximité, mais c’est un véritable calvaire de s’y rendre – du coup, chacun reste chez soi.
 
S’il n’y avait pas eu Bernard, je serais en ce moment tranquillement installé devant la télévision à regarder quelque chose de stupide, la larme à l’œil et la bière à la main. Ou bien j’aurais l’ordinateur allumé et je parlerais à mes contacts MSN en leur racontant mes malheurs pour recueillir la compassion habituelle.
 
 
 
 
 
Certes, ce n’était pas un tableau très réjouissant. Mais aller sur les Champs-Elysées pour regarder des filles ne me paraissait pas reluisant non plus. En temps normal, je n’aurais jamais accepté de suivre Bernard. Il a beau se comporter comme un véritable buldozer, je sais que j’aurais pu le décourager. Mais là, sans la moindre volonté, je me laissais emporter par les événements. On verrait bien. De toute manière, cela me donnerait matière à des histoires plus étoffées lorsque j’aurai l’occasion de les raconter.
 
 
 
 
 
Devant moi, il y avait un gamin d’une dizaine d’années qui tenait la main de sa mère. Il dévorait des yeux une petite fille de l’autre côté du wagon, elle aussi flanquée de sa génitrice. Il y en a vraiment qui commencent tôt. Quand je pense qu’à cet âge, je collectionnais les images des Crados et je jouais aux billes dans la cour. Les mœurs évoluent.
 
 
 
 
 
- C’est la prochaine, me lance Bernard, et je me redresse inconsciemment.
 
 
 
 
 
Mes yeux parcourent le plan de métro au plafond. Ligne 1, arrêt George V. Nous sommes en plein milieu des Champs-Elysées. Le parfait endroit pour ce qu’il a en tête, évidemment. Je le préviens une nouvelle fois.
 
 
 
 
 
- Je te préviens, je n’aborderai personne
 
 
 
 
 
Il hausse les épaules et sourit. Il est convaincu qu’il parviendra à me faire changer d’avis. Je suis sûr du contraire. Bon, d’habitude c’est toujours lui qui gagne ses paris mais là ça me concerne, j’ai mon mot à dire, non ?
 
 
 
 
 
Les portes du métro s’ouvrent. La foule se presse autour de moi. Ils me poussent et me malmènent alors que j’essaie de descendre. Il y a le temps, bordel. Il est onze heures du mat, donc n’essayez pas de me faire croire que vous allez au boulot. Non, vous êtes des paumés comme moi. Ca serait sympa de me laisser descendre, du coup.
 
 
 
 
 
Avec un soupir d’exaspération, Bernard s’engouffre dans une brèche. Les gens s’écartent et je le suis. Forcément, si j’avais ses épaules, j’y arriverais aussi… L’escalier roulant se déploie devant  nous ; nous émergeons enfin à l’air libre. Je reprends péniblement mon souffle.
 
 
 
 
 
-         Bon, tu regardes comment je fais, puis tu te lances, d’accord ? Il sourit de toutes ses dents. Tu vois, je fais d’une pierre deux coups. Je me change les idées et, avec un peu de chance, je me trouve quelqu’un pour la soirée.
 
 
 
 
 
Je le regarde avec un mélange de commisération et de mépris. Voilà pourquoi je n’aime pas Bernard. Il n’a pas conscience de ce qu’est réellement l’amour. Il se contente de voir comment les choses tournent. C’est une philosophie que je trouve trop simpliste. Ou alors je me prends la tête. C’est possible, il n’est pas le seul à me le dire. Véronique aussi me trouvait un peu chiant. Mais bon, il y a un juste milieu.
 
-         Je t’ai dit que je ne voulais pas me lancer
 
-         Attends avant d’être aussi définitif, regarde-moi faire !
 
 
 
 
 
Je hoche la tête, vaincu. Après tout, il était là hier quand tout allait mal. Je peux bien lui faire ce plaisir et le regarder faire. Il y a une certaine curiosité derrière tout ça, j’avoue. Comme un ethnologue, je vais l’observer à l’affût. Le beauf dans toute sa splendeur. Pathétique. Et pourtant, je l’envie un peu. C’est moi qu’on a plaqué, pas lui.
 
 
 
 
 
Je le vois suivre du regard plusieurs personnes, sans jamais qu’il ne bouge. Le regard aux aguets, le sourire figé, il a l’air d’un félin au repos. Je ne pousserai pas la comparaison plus loin, rapport à la queue qui pendouille.
 
 
 
 
 
Soudain, je le vois frémir. Il a repéré une proie. Ses yeux s’étrécissent, deviennent de simples fentes. D’un pas souple, il se dirige vers une jeune fille qui marche seule, un sac de courses Sephora à la main.
 
 
 
 
 
-         Bonjour ! lance-t-il, son sourire plus animé. J’espère que je ne vous dérange pas ?
 
 
 
 
 
La fille ralentit, le regarde froidement.
 
 
 
 
 
-         Un peu, si. Je suis désolée, je suis pressée
 
 
 
 
 
Il hoche la tête.
 
-         Je comprends. Est-ce qu’il serait possible de continuer cette discussion un peu plus tard, du coup ? Ce soir, autour d’un verre ?
 
Elle hausse un sourcil. Le sourire de Bernard est communicatif. Je me prends à la regarder, fasciné. Va-t-elle dire oui ? Si c’est le cas, toute ma cosmologie s’effondrerait. Détrôné, les Zeus et les Jehovah. Premier au panthéon, le Bernard. « Prenez et mangez-en tous » prendrait un nouveau sens.
 
 
 
 
 
Je la vois hésiter. C’est plus que ce que j’aurais imaginé. Pourtant, sa résolution se raffermit et elle secoue la tête. Ses longs cheveux ondulent dans le vent. Elle est belle – Bernard a bien choisi.
 
-         Non, vraiment. Mais c’est gentil de proposer.
 
-         Tant pis ! Bonne journée !
 
 
 
 
 
Ils échangent de nouveaux sourires et elle disparaît dans la foule. Lui revient, les mains dans les poches, fier comme un bar-tabac.
 
-         Tu vois, c’est facile !
 
 
 
 
 
J’ai du mal à comprendre comment il peut afficher tant de sérénité. Je hausse les épaules.
 
-         Facile, facile… elle t’a quand même envoyé balader !
 
-         Et ?
 
J’ai du mal à trouver mes mots.
 
-         Et ? Et… et c’est insultant, tu ne trouves pas ? Tu ne te sens pas humilié ? Perdu ?
 
C’est à son tour de hausser les épaules.
 
-         Pourquoi insultant ? Après tout, elle ne m’avait rien demandé, c’est moi qui l’ai abordée. Je trouve au contraire qu’elle a été très gentille. Et je ne me sens pas humilié du tout.
 
-         Tu es bizarre.
 
-         C’est toi qui est bizarre, mon petit Fred. Bon, à ton tour maintenant.
 
 
 
 
 
Il me regarde. Je déglutis.


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Ma chaîne YouTube d'écrivain qui déchire son père en pointillés - Ma page d'écrivain qui déchire sa mère en diagonale
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Marsh Posté le 14-09-2006 à 10:52:45    

Pas que je lise que de la fantasy... comme toutes les nanas (j'imagine), j'aime bien une bluette de temps en temps.  
Mais là... non. Tu sais ce que ça me donne comme impression? Que c'est sous-titré: "c'est moi la grenouille, je suis un mec superhyprasensible (et trop cool et trop beau en plus). Grâce à une longue étude, j'ai tout pigé à la gente féminine, mais ma sensibilité à fleur de peau m'empêche de trouver l'âme soeur. Peut-être que si j'écris des trucs vrais sur la vraie vie, ça changera..."
 
C'est bon sur un blog, mais pas dans un roman. Enfin, c'est mon avis, il n'engage que moi.
 :hello:

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Marsh Posté le 14-09-2006 à 10:52:45   

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Marsh Posté le 14-09-2006 à 10:54:53    

Ce n'est pas parce que c'est écrit à la première personne que ça raconte ma vie (sinon j'aurais du mal à le vivre :D).
 
Ceci dit, je suis effectivement trop cool et trop beau, ça me fait plaisir que tu sois d'accord là dessus :p
 


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Marsh Posté le 14-09-2006 à 11:38:05    

Grenouille Bleue a écrit :

Ce n'est pas parce que c'est écrit à la première personne que ça raconte ma vie (sinon j'aurais du mal à le vivre :D).
 
Ceci dit, je suis effectivement trop cool et trop beau, ça me fait plaisir que tu sois d'accord là dessus :p


 
Comment ne pourrais-je pas l'être? :smileyentotalepamoison:
 :D

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Marsh Posté le 14-09-2006 à 16:26:54    

Salut Grenouille! Depuis le temps...
 
Bon, l'écriture, le style, tout y est mais pour être très franc, j'ai trouvé ça... chiant, aussi ennuyeux qu'une biographie de candidat de la Star Ac' et personnellement, je ne sais pas si un tel roman aurait rellement du succès auprès des djeunz que tu vises.
 
Mais bon, on ne sait jamais. Pour la forme c'est comme d'hab, pour le fond, je suis plus dubitatif.

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Marsh Posté le 09-11-2006 à 22:20:12    

Ben moi je suis pas très douée pour donner une critique constructive, mais en tout cas j'ai pris du plaisir à te lire et je me reconnais dans le style d'écriture, jveux dire, ça me paraît réaliste, j'imagine très bien les personnages. et j'aimerais lire des bouquins comme celui-là. Après c'est vrai que j'attends de voir ce que ça donne dans la longueur, le développement de l'histoire, tout ça... mais à priori, c'est bien parti :)

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Marsh Posté le 10-11-2006 à 17:34:22    

lutine9 a écrit :

Ben moi je suis pas très douée pour donner une critique constructive, mais en tout cas j'ai pris du plaisir à te lire et je me reconnais dans le style d'écriture, jveux dire, ça me paraît réaliste, j'imagine très bien les personnages. et j'aimerais lire des bouquins comme celui-là. Après c'est vrai que j'attends de voir ce que ça donne dans la longueur, le développement de l'histoire, tout ça... mais à priori, c'est bien parti :)


 
 
D'accord avec elle, c'est pas de la grande littérature mais en même temps ça n'en a pas non plus la prétention... J'ai également pris du plaisir à te lire et je serai content de lire la suite si elle existe. Sinon je pense que ça pourrai marcher si la suite tient en haleine (enfin si on peut dire ça comme ça); j'aime bien l'humour qui se dégage de ton écriture, de ton style, et il est vrai que j'aime bien ce genre de récit (un peu Begbeider like, j'espère que tu ne souffrira pas de la comparaison ^^).
 
Voilà, bonne continuation et bon courage ;)

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