Peau noire, cheveux crépus, histoire d'une aliénation - Société - Discussions
Marsh Posté le 19-02-2008 à 09:42:04
Tout d'abord chapeau pour l'article et tes réflexions . J'ai tout lu mais je n'ai pas encore regardé la vidéo, je le ferais ce soir, et je ferais part de mon avis sur le sujet.
Marsh Posté le 19-02-2008 à 16:33:55
Super bon topic, mais je connais énormément de filles de couleur blanche qui défrisent, raidissent, colorisent leurs cheveux ? (chirurgie aussi et autre pour se rapprocher de l'"idéal" beauté de cette époque)
par contre je suis contre l'uniformisation de la culture dominante comme écrit. C'est un peu pervers et amène l'intolérance envers ceux qui se look différents, ou ont des idées différentes si on va là (différents tout court même donc "ethnique" ou culturelle entre autre). Et il me semble que l'on va dans ce ses, que ça ne touche pas seulement une "couleur" de peau, mais un phénomène beaucoup plus vaste, une grande majorité de gens jugent par la différence d'apparence. Et une énorme quantité de gens sont racistes inconsciemment à mon avis...
Comme je le dis toujours seul une révolution de l'esprit pourra changer tout ça, un long travail sur soi, et une longue réflexion...
"L'autre question très intéressante, c'est notre perception des beautés très différentes. Ayant vécu en Afrique enfant, j'ai été habituée à considérer comme belles des femmes à la peau très noire et aux cheveux crépus. Je me souviens d'une élève d'origine africaine en France qui était d'une beauté sculpturale. Comme elle posait de nombreux problèmes de discipline, j'en parlais à un surveillant et au hasard de la conversation, j'en vins à mentionner sa beauté. Il était surpris sur le moment puis quelques jours plus tard, il vint me trouver pour me dire qu'il l'avait mieux observée et qu'elle était effectivement sublime. Il n'avait tout simplement pas VU sa beauté non pas par racisme mais tout simplement parce qu'elle ne correspondait en rien à nos codes. Je me demande si je fais la même erreur de perception avec d'autres ethnies que je n'ai pas aussi bien connues. "
là par contre c'est aussi une histoire de goût, d'attirance maintenant je conçois que beaucoup de gens formattés aiment le même type de fille, sont je me répète inconsciemment "racistes" si ce n'est pas consciemment ou intolérants, ou ne correspondent pas aux critères de beauté de cette époque (bah j'aime pas les grandes, les petites, les rousses, les noires, son look, les cheveux ceci, les yeus cela, ses idées, comme elle vit etc. et jugent (!))
Marsh Posté le 19-02-2008 à 16:47:41
ReplyMarsh Posté le 19-02-2008 à 16:48:00
oui regarde mon edit
je précise qu'il y a bien autre chose dessous, pas lu ta réaction avant
j'ai aussi une cousine aux cheveux "crêpus" style sud qui de toute sa vie se défrisera, aura la pince à raidir dans les mains...
et oui des asiats qui ondulent leurs cheveux pour faire glam
Marsh Posté le 19-02-2008 à 16:52:31
c'est plus subtil ok, je l'ai dit, lis moi plutôt que quoter hors contexte
(là c'est moi que tu vas enfermer dans un avis, sur hfr où les gens préferrent lire les quotes que le post original en entier )
je voulais appuyer que ce phénomène est englobé par un beaucoup plus vaste.
sinon perso je ne trouve pas belle beyoncé...mais c'est une autre histoire
Marsh Posté le 19-02-2008 à 18:03:31
Je pense qu'il y a à la fois des facteurs liés aux critères de beauté dominant dans un pays ou une société donnée et des facteurs liés à une volonté de s'intégrer (dans le sens "mieux se fondre dans la masse" ). Et à mon avis, les deux "types" de facteurs ne sont pas forcément liés mais parfois, ils sont bien sûr liés.
Donc, une jeune femme Noire qui défrise ses cheveux veut être proche du modèle de beauté dominant dans le pays / la société où elle vit. Bon, ce modèle peut largement sortir d'un pays ou d'un continent et peut venir de l'extérieur (exemple : le cas de Asiatiques vivant au Japon qui ont recours à la chirurgie pour débrider leurs yeux).
Mais cette jeune femme Noire peut aussi penser qu'en ayant des cheveux défrisés, elle ressemblerait tout simplement un peu plus à la majorité des jeunes femmes qui vivent dans le même pays qu'elle.
Marsh Posté le 19-02-2008 à 18:13:48
+1 d'un autre coté j'imagine que passer un entretien d'embauche avec une coupe afro, ou des tresses ou pire des deads c'est mort d'avance
Marsh Posté le 19-02-2008 à 18:17:04
une opinion sur les blancs qui se font des tresses? sur les blancs qui s'habillent comme des "afro-américains"?
pour moi ce sont des grosses conneries, destinées à nous monter les uns contre les autres!
Un homme reste un homme, qu'il soit noir avec des cheveux lisse ou blanc avec des tresses.
Malcolm X, avec de tels propos, encourage la haine raciale
Marsh Posté le 19-02-2008 à 18:48:54
Très beau topic, sujet intéressant, je décerne mon seal of approbation
Marsh Posté le 19-02-2008 à 19:04:37
Un peu tiré par les cheveux comme topic.
Je trouve l'idée super negative.
sylphide pinklady, tu t'es deja defrisé les cheveux ?
Parce que moi, si, et c'est pas pour antant que l'on rentre dans des tergiversations socio-culturelle.
Déja, il y a le critere esthetique et pratique, et je pense qu'il ne faut pas aller vraiment plus loin.
Comme deja dit ici, chaque "type" de personne a toujours +/- envie d'autre chose, d'avoir une autre tête.
Les blondes veulent etre brunes et inversement, les asiats avec des cheveux bouclés etc..
Bref, c'est surtout pour une question de paraitre, point barre
Par contre, je ne dis pas qu'il y ai pas des criteres "racistes" qui peuvent entrer en jeu lorsque certains utilisent ces produits (c'est peut etre un peu fort mais bon??).
Combien de fois j'ai vu des critiques de dirigeants / responsables parce qu'un black avait les cheveux tressés (super clean, mais pas europeens quoi).
Enfin...
Au fait, coté defrisage, ça marche super fort dans les pays du sud de l'europe aussi.
Pour ce qui est de la dangerosité des produits... bof.. je connais des gens qui font ça depuis des dizaines années, c'est pas pour autant qu'ils n'ont plus un poil sur le caillou ou qu'ils ont choppé un cancer.
Marsh Posté le 19-02-2008 à 19:08:48
henri-alexandre a écrit : Je pense qu'il y a à la fois des facteurs liés aux critères de beauté dominant dans un pays ou une société donnée et des facteurs liés à une volonté de s'intégrer (dans le sens "mieux se fondre dans la masse" ). Et à mon avis, les deux "types" de facteurs ne sont pas forcément liés mais parfois, ils sont bien sûr liés. |
disons que je trouve que ca n'a rien de plus alienant de vouloir ressembler a X ou Y peu importe sa couleur de peau...
vouloir ressembler a qq un c'est DEJA une alienation.
autant je suis d'accord avec malcolm X sur les noires de l'epoque qui voulaient faire "plus blanche que blanche" autant aujourd'hui je vois pas vraiment le probleme avec les pretendues stars du rnb qui se font eclaircir la peau...
Marsh Posté le 19-02-2008 à 19:17:53
Et les blanches qui se font teindre en rousses?
Et les suédoises qui se font teindre en brunes?
Et celles qui ont les cheveux plats et qui se les font friser?
C'est de l'aliénation, aussi?
Marsh Posté le 19-02-2008 à 19:25:04
Je comprends pas trop la problématique du topic.
tu dénonces?
tu critiques?
Tu mélanges tout et n'importe quoi?
ça m'a l'air un mix des trois.
Marsh Posté le 19-02-2008 à 20:13:35
En gros l'idée (j'ai mis en gros donc ne me sautez pas sur le dos merci ) est que défrisage et blanchiment de la peau= aliénation et volonté de ressembler aux cannons de beauté actuels.
Je suis totalement d'accord pour le blanchiment de la peau, qui est une technique autement dangereuse, et bête dans le fond, parce qu'on ne peux pas changer la couleur de sa peau (oui oui machin obvious toussa...)(bon je sais pas comment M. Jackson a réussi mais ce n'est pas le sujet) . J'assimille ça à celles et ceux qui ont recours à la chirurgie esthétique pour paraître "plus beau", ou plus jeune, et qui au lieu de se rendre chez un psychologue ou psychiatre se font opérer et tombent dans un engrenage: "maintenant que mon menton été refait, mon nez ne me plaît plus etc...". C'est vrai que c'est plutôt réducteur de prendre cet exemple uniquement avec les Noirs...
Pour les cheveux crépus là je ne suis plus d'accord. Et pourquoi ce serait une aliénation de se faire défriser les cheveux? Pourquoi serait-ce pour ressembler à quelqu'un? Je suis noire, je me défrise les cheveux, parce que je trouve ça beaucoup plus pratique, je n'aime pas les tresses, et encore moins les tissages parce que ça fait effet perruque. Je pense que la psychologue qui a écrit cette étude n'a jamais essayé de mettre un coup de peigne dans des cheveux crépus, et n'en a jamais eu sur la tête pour dire des trucs comme ça.... Plus facile à coiffer, donc moins de temps dans la salle de bains, c'est pour ça que je l'ai choisit.
Pour le danger, quasiment dire qu'on est inconscientes faut pas charrier, et arrêter de prendre les gens pour des imbéciles, oui c'est un produit dangereux, mais y'a des marques auxquelles ont peut se fier, et il faut faire attention à ce que la personne qui applique le produit sache ce qu'elle fait. Quand on va dans un salon généralement elles savent ce qu'elles font sinon elles n'auraient plus de clientes, et c'est comme partout, il y a parfois des ratés à causes de gens qui n'y connaissent rien....
Sinon entre parenthèses pour une psychologue qui fait une espèce d'étude sur ce sujet par ler de "caractère racial" me fait doucement rigoler enfin bref
Marsh Posté le 19-02-2008 à 21:20:57
la question a écrit : Je comprends pas trop la problématique du topic. |
toujours à troller celui là...
si ça te plait pas tu n'es pas obligé de participer!
Marsh Posté le 19-02-2008 à 21:28:14
maurice chevallier a écrit : Et ne parlons pas des asiatiques qui se font friser |
ça c'est surtout quand elles commencent à vieillir
Marsh Posté le 20-02-2008 à 07:33:11
L'idée du topic n'est pas stupide, simplement l'orientation vers la population noire me fait encore penser a la notion classique de crise d'identité des Noirs.
L'exemple du defrisage n'est simplement pas le meilleur, parce que d'une part, on rentre dans un critere esthetique qui peut changer suivant le type de population, et d'autres part parce que je pense qu'un certains nombres d'exemples presents dans la seconde et troisieme reponse sont completement orienté.
Il n'y a pas que les p'tites black qui portent des rajouts, des perruques, ou qui ont eu des problemes avec leur cuir chevelu. Loin de là...
Marsh Posté le 20-02-2008 à 07:47:14
Samourai a écrit : |
De bons prétextes pour ne pas avoir à lui répondre ? Un peu facile.
Marsh Posté le 20-02-2008 à 08:11:49
Le truc qui fonctionne le mieux est d'ignorer.
Regarde, tu quotes et t'as déjà un de ses potes qui vient titiller à son tour.
Marsh Posté le 20-02-2008 à 08:31:07
Parler d'aliénation pour une tendance culturelle est déjà un troll en soi.
Faux topic polémique qui s'écroule sous son propre non sens.
Je ne suis pas noir mais pourtant je grille régulièrement sous les UV pour avoir une peu plus mate et en plus j'ai les cheveux très bouclés. Suis je une aliénation du peuple blanc selon toi ?
Marsh Posté le 20-02-2008 à 08:48:42
Il s'agit du travail d'une sociologue sur l'amérique des années 50/60/70, pas du mémoire d'un étudiant en cosmétologie.
Il faut savoir étudier les périodes sociales sans égocentrisme. Il faut savoir aussi différencier l'auteur de l'étude de celui qui rapporte les propos. Le terme "aliénation" est à mettre au crédit de l'auteur.
Peut-on discuter des sciences sans discréditer les intervenants ?
Marsh Posté le 20-02-2008 à 09:01:34
ShonGail a écrit : Il s'agit du travail d'une sociologue sur l'amérique des années 50/60/70, pas du mémoire d'un étudiant en cosmétologie. |
Quand le postulat de base tient debout, peut-être.
Et vu ton précédent post, c'est priceless comme remarque.
Marsh Posté le 20-02-2008 à 10:03:22
Topic faussement polémique et au but flou, en plus l'auteur est même pas noir
Marsh Posté le 20-02-2008 à 10:16:26
Sylphide pinklady, tu perds ton temps sur HFR (et sur la majorité des forums internet à mon humble avis ). Un message argumenté, de plus de 2 lignes, sans polémiques, insultes, trolls, ricanements, mépris.... cela n'intéresse pas grand monde ici.
J'ajoute que la question soulevée n'est pas nouvelle, il me semble l'avoir déjà lu (peut-être par Malcom X ?)
Marsh Posté le 20-02-2008 à 10:17:14
Ca reste une coiffure avant tout. De là à voir un phénomène de société
Penses-tu que la mode du bronzage vienne du fait que les blancs veulent ressembler aux noirs ?
J'avais effectivement entendu dire qu'à l'époque de James Dean, beaucoup de Maghrébins voulaient être coiffés comme lui, avec les difficultés techniques que cela suppose. C'est amusant tout au plus.
Les différences physiques distinguant les origines ethniques sont vouées à disparaître. Regarde les Etats Unis, la société évolue vers une couleur de peau légèrement bazanée à force de métissages. Il y a peu de vrais noirs foncés, beaucoup ont une peau claire voire très claire ! Pour les cheveux, c'est pareil voire pire, car on peut en faire ce que l'on veut et c'est même encouragé par la mode
Marsh Posté le 20-02-2008 à 10:25:15
Samourai a écrit : |
Applique à toi-même en premier lieu ce que tu demandes aux autres.
Et s'il te plait, évite de jouer à la victime par la suite.
tico a écrit : L'idée du topic n'est pas stupide, simplement l'orientation vers la population noire me fait encore penser a la notion classique de crise d'identité des Noirs. |
Voilà.
ça semble vachement orienté, très étroit d'esprit comme problématique et comme façon de l'aborder.
Déjà le mélange défrisage-blanchiment de peau, deux choses différentes dans leur finalité.
De plus le manque total de recul, vis-à-vis du sujet, dans la façon de l'aborder.
Les japonaises qui fuient le soleil pour avoir un teint de lait, est-ce aussi une aliénation?
Les européennes qui passent leurs heures à griller au soleil, est-ce aussi une aliénation?
Les juives qui se font opérer du nez, est-ce aussi une aliénation?
Les brésiliennes qui se font opérer à leur 16 ans, est-ce aussi une aliénation?
Et au delà de ça, te rends-tu compte et dans ce cas dans quel but reprends-tu sans le moindre recul de la propagande d'un mouvement identitaire (la référence à Malcom X aurait dû te mettre la puce à l'oreille) pour asseoir ton discours?
Marsh Posté le 19-02-2008 à 09:10:18
A voir absolument cette video d'une émission consacrée à l'auteur, une femme extrêmement intéressante et agréable à écouter :
http://www.dailymotion.com/video/x [...] erald_news
(zappez le speech initial du présentateur qui est assez useless )
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Revenant sur son premier défrissage, Malcolm X lachait les mots suivants::
"Ce que je pouvais être ridicule! J'admirais dans la glace un Noir avec des cheveux "blancs" (...)
Je venais de faire mon premier pas vers la dégradation de soi. J'avais rejoint cette multitude d'hommes et de femmes noirs qui, en Amérique, à force de bourrages de crâne, finissent par croire que les Noirs sont "inférieurs" et les blancs "supérieurs" à tel point qu'ils n'hésitent pas à mutiler et à profaner les corps que Dieu leur a donnés, pour essayer d'avoir l'air "chouette" selon les critères des Blancs.
Regardez autour de vous, aujourd'hui encore, dans n'importe quelle petite ou grande ville, du drugstore à quat'sous au salon "intégré" du Waldorf Astoria, et vous verrez des femmes noires en perruques vertes, roses, violettes, rousses et blond platine, ridicules comme des pantins de vaudeville. Et vous vous demanderez si les Noirs ont tout à fait perdu la tête, perdu contact avec eux-mêmes"
Interview de Juliette Sméralda, sociologue. Auteur de "Peau noire, cheveu crépu, Histoire d’une aliénation".
1. Pourriez-vous décrire les grandes étapes (historiques et sociologiques) de l’apparition du défrisage ?
Le phénomène du défrisage, ou encore du « lissage » du cheveu crépu, dans les formes qu’il emprunte depuis la fin du 19e siècle semble être éminemment lié à l’esclavage des Noirs dans les Amériques. Le défrisage à froid – qui est la forme la plus « évoluée » du phénomène – est la dernière phase d’une technicité qui n’a eu de cesse de se perfectionner depuis la seconde moitié du 19e, lorsque les Noirs – y compris les femmes -, commencent à avoir accès à l’éducation et au savoir et qu’ils vont se charger de mettre au point les différents procédés qui seront l’aboutissement des défrisants modernes, dont les contenus se distinguent essentiellement par la différence de dosage de leur teneur en ammoniaque. Cette technique révolutionnaire a été précédée du défrisage à chaud qui, lui-même, a été précédés d’ancêtres bricolés mais dont le trait commun n’a jamais cessé d’être le lissage du cheveu crépu.
2. Selon vous, ce basculement des canons esthétiques opéré au moment de l’esclavage est symbolisé par « la perte du peigne ». Pouvez-vous nous en dire plus ?
L’arrachement de l’Africain de sa matrice, sans aucun des accessoires nécessaire au coiffage de son cheveu et au soin de sa peau, le regard très négatif que le Blanc posera sur ses caractères somato-biologiques, les conditions inhumaines de son asservissement sur des plantations où il travaillait telle une bête de somme sans répit, sans hygiène, sans soins d’aucune sorte, sont les trois paramètres déterminants à prendre en compte pour comprendre le sens du défrisage et de l’éclaircissement. Le fait que ce sens soit "perdu" aujourd’hui ne signifie pas que l’origine du phénomène se soit dissout et que sa symbolique première ne continue pas à véhiculer l’idée que l’Africain et les Afro-descendants ont un complexe d’infériorité face à ceux dont ils "imitent" la texture de cheveu, ou par rapport auxquels ils cherchent à atténuer la couleur de leur peau(Voir page 77 de Peau noire cheveu crépu, où j’expose la question de la perte du peigne).
Ce sont, de manière très globale, les esclaves domestiques, ceux qui vivent en contact permanent avec les Blancs, qui seront les relais les plus efficaces de la culture corporelle des maîtres qu’ils transmettent aux esclaves des champs. Le fait que cette catégorie d’esclaves vit dans la maison du maître, avec parfois des enfants mulâtres qui ont un cheveu plus frisé que crépu, a fait que très tôt, le colon leur cède des brosses et des peignes usagés, afin qu’ils soient "présentables", puisqu’ils vivent dans sa maison. Ce n’était pas seulement l’usure de ces accessoires qui explique les problèmes qu’ont eu les esclaves à s’en servir, mais leur inadaptation à la structure même du cheveu crépu, pour le coiffage duquel les Africains ont inventé le peigne afro, dont je décris les principales qualités dans mon ouvrage (p.76-77).
Comparé au peigne afro à grosses dents bien écartées, aux pointes délicatement arrondies pour démêler en douceur le cheveu crépu, le peigne des Blancs est à petites dents plutôt serrées, et adapté au coiffage d’un cheveu lisse ou ondulé. Il n’est pas difficile de s’imaginer le contexte dans lequel prend naissance ce que l’on nomme l’aliénation de l’Africain envers son cheveu : Ce n’est pas le maître qui se sert du peigne afro, mais l’Africain qui se sert de celui du maître. Il n’en faut pas plus pour que l’exercice qui consiste à coiffer le cheveu crépu avec le "mauvais" peigne se transforme en une opération-torture. Le phénomène touchera les générations successives et constituera le prétexte idéal à la décision d’en "supprimer" la texture-qui-fait-souffrir certes, mais que les Africains avaient bel et bien appris à trouver "laide" et "courte". J’expose, p. 98, en détails cet aspect de la problématique.
3. En quoi, selon vous, la pratique du défrisage a une dimension culturelle concernant les peuples noirs ?
Si l’on convient que tous les Noirs – plus généralement, toutes les personnes au cheveu crépu – se défrisent, cela revient à reconnaître une dimension socioculturelle à cette pratique, puisque le caractère racial qui l’entérine- le commun dénominateur – est la texture crépue/frisée du cheveu. Le fait que, par ailleurs, ce phénomène voit le jour à un moment critique de l’histoire du peuple noir, permet de le dater historiquement dans la diaspora afrodescendante et dans les sociétés africaines continentales, qu’il touche près d’un siècle plus tard, dans les années 1970. parmi toutes ces composantes du peuple noir, s’observe très souvent une difficulté à composer avec la texture crépue de leur cheveu, comme si celle-ci ne pouvait se combiner à ce qu’elle regarde comme la « modernité », qui revêt l’apparence du clair (peau) et du lisse (cheveu).
4. D’après vos diverses recherches, comment les femmes noires justifient-elles la pratique du défrisage ?
L’argument récurrent est celui de la facilitation de la coiffure. Vient ensuite celui du plus grand choix de coiffures qui est attribué au cheveu lisse (alors qu’en réalité c’est le cheveu crépu qui présente ce potentiel). L’on peut ajouter à ces deux critères principaux d’ordre fonctionnel, deux autres subsidiaires mais non moins éclairants, qui sont la modernité, et la beauté. Ce sont des jugements de valeurs qui apprécient le cheveu crépu à partir de canons esthétiques empruntés à la culture dominante. Ils sont donc axiologiques.
5. Selon vous, la pratique du défrisage, généralisée, et celle de l’éclaircissement, plus marginale, sont –elles du même ordre ?
Oui, le défrisage et l’éclaircissement de la peau sont toutes deux des pratiques désidentificatrices, dans la mesure où elles procèdent du même souci de "supprimer le stigmate". La peau noire et le cheveu crépu occupant, dans la culture occidentale d’abord, et dans celle des peuples dominés par les canons esthétique de celle-ci, le statut de "stigmates". La fréquence plus ou moins élevée (aspect quantitatif) de la pratique ne lui enlève pas sa signification sociologique. A l’origine, les Africains mis en esclavage se sont attaqués au cheveu crépu, qui était le caractère somato-biologique qui faisait le plus horreur au Blanc et qui posait aux porteurs eux-mêmes le plus de problèmes. Par ailleurs, le cheveu est une fibre très résistante, capable de supporter des traitements "maltraitants" un certain temps. Les abus et les choix de produits expliquent les alopécies partielles ou totales et les attaques du cuir chevelu…
La peau, en revanche, est extrêmement fragile, et même ignorants, beaucoup de gens savent de manière intuitive combien il est facile de lui faire mal et de se faire mal. Elle couvre, qui plus est, l’ensemble du corps : il faut donc être bien avisé pour s’attaquer à elle. Les personnes qui ne le sont pas, sont celles qui souffrent actuellement de maladies cutanées graves, causées par l’abus de dermocorticoïdes et autres substances concoctées chez elles… L’on se trouve là dans le même cas de figure que celui du bronzage : il y a des amateurs qui s’exposent au soleil, sans tenir compte des conseils du corps médical, en sous-estimant le potentiel pathogène de leur engouement ; et puis il y a les personnes avisées, qui bronzent "raisonnablement".
6. Votre ouvrage traite du rapport des peuples noirs à leur propre image. Où s’arrête la pratique esthétique et où commence l’aliénation ?
C’est là une question fondamentale, lorsque l’on s’intéresse aux problématiques identitaires. Le peu de recherches dont l’on dispose dans ces domaines – et ceci malgré l’importance que continue à revêtir le mouvement de la Négritude -, semblent indiquer que le Noir connaît peu ou mal son image. Je pense qu’il faut appréhender cette réalité à partir de caractéristiques culturelles avant d’en parler en termes d’aliénation.
Il faut cependant convenir que cette situation a généré des formes d’aliénation qui sont de trois types : • Les sujets Noirs ne semblent pas gênés de se projeter dans des supports culturels desquels leur propre image est complètement absente (magazines, télés, institutions administratives dans les DOM-TOM dirigées par des Français de l’hexagone…)
• Les sujets Noirs ne semblent pas avoir de problème à pratiquer des religions du livre (christianisme majoritairement) dont toutes les icônes sont représentées par des Caucasoïdes (Blancs), tout comme ils ne semblent pas dérangés par la représentation du démon en personnage auquel ils s’identifient inconsciemment, puisqu’il est de leur couleur.
• Les sujets Noirs ne semblent pas avoir de problème à offrir des poupées blondes à leurs filles : partout, il est donné à voir des petites filles noires câlinant des poupées blanches et coiffant leurs cheveux généralement longs et blonds. Les parents de ces enfants ne semblent pas se rendre compte que c’est par ce vecteur que se transmet l’aliénation (l’enfant renie ses propres caractères raciaux) et qu’ils sont à l’origine de cette situation. La petite fille, par exemple, n’apprend pas à jouer avec le cheveu crépu – que pourrait porter une poupée qui lui ressemble -, et elle grandit avec la croyance que son cheveu qu’elle ne sait pas traiter est un handicape à sa beauté, et cela d’autant plus facilement qu’elle porte en elle la « mémoire » du cheveu de la poupée qu’elle a manipulé des années durant.
7. Quel est, d’après vous, le rôle de l’industrie cosmétique ? Est-elle à l’origine de cette aliénation ou ne fait-elle qu’en profiter ?
J’ai signalé plus haut, que ce sont les Afro Américains qui, dès le dernier quart du 19e siècle, ont mis au point les cosmétiques que s’appliquent leurs congénères, avant d’en étendre l’industrie à l’échelon national, puis international… L’industrie de la cosmétologie n’est certainement pas directement « responsable » de l’aliénation des Noirs, mais le fait qu’elle en soit un partenaire très actif, car elle profite ainsi d’un marché juteux, autorise à penser qu’elle l’entretient - et, par la recherche dont profite ce secteur de pointe, les produits offerts aux consommateurs, par leurs performances, leurs emballages attrayants, leurs parfums, leur « modernité » -, qu’elle se laisse très difficilement soustraire les énormes profits qu’elle en tire.
8. Que pensez-vous des personnes qui reviennent au cheveu naturel par « militantisme » ?
C’est une démarche qui demande une force de caractère extraordinaire. Lorsque les femmes qui se défrisaient ont à réapprendre à vivre avec leur texture naturelle, elles qui ont perdu l’habitude de les aimer tels quels, de les coiffer patiemment, de les soigner avec les accessoires adaptés, etc… c’est de processus de réinvestissement affectif qu’il faut faire état. Toutes n’y arrivent pas, la pression sociale leur paraissant insupportable. Celle qui y arrivent sont préparées psychologiquement à repartir à la conquête de soi. Pour s’aider, certaines s’investissent d’un discours militant, démonstratif et justificatif qui leur permet de résister au risque d’une éventuelle rechute… Passer le cap de l’acceptation pleine et entière de soi, elles n’ont plus besoin de l’artifice du militantisme pour assumer leur caractère racial : elles vivent désormais en paix avec leur cheveu et cela va généralement de pair avec une acceptation pleine et entière de leurs corps.
9. Le principal problème de cette aliénation n’est-il pas tout simplement le manque d’information, à la fois sur la nature du cheveu crépu, sur ses qualités et son potentiel ?
Bien sûr, les aspects que vous soulignez sont importants, mais bien des femmes ont les informations qu’il faut, sans pour autant se détacher des pratiques esthétiques désidentificatrices. Je crois cependant que ce travail d’information doit être poursuivi, de manière à toucher les personnes qui n’en ont pas encore bénéficié. Cette tâche devrait s’accompagner d’une véritable recherche en rapport au potentiel du cheveu crépu, aux traitements contemporains auxquels ils se prêtent avec aisance, aux modèles dont la finalité serait d’inspirer les femmes qui auraient envie de les essayer, voire de les adopter… Et puis, pourquoi ne pas revisiter les trésors de coiffures qu’offraient l’Afrique matricielle, il y a encore peu ?
Bibliographie
Juliette SMERALDA. Peau noire, cheveu crépu. Histoire d’une aliénation. Ed. Jasor. Guadeloupe. 2005
Juliette SMERALDA. Du cheveu défrisé au cheveu crépu Ed. Anibwe. Paris. 2007
Ayana D. BYRD & Lori L. THARPS. Hair story. Untangling the roots of black hair in America. St’Martin’s Press. New York. 2001
Willie L. MORROW. 400 Years Without a Comb : The Untold Story. Ed. Milady Pub Corp
Kathy Russell, Midge Phd Wilson, Ronald Hall .The Col
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Plusieurs réflexions en vrac :
Je ne sais pas si ce sujet a déjà été abordé ailleurs, j'ai fait une recherche qui n'a rien donné. Si ce sujet doit être fusionné avec un autre que j'aurais loupé, merci de me l'indiquer.