Parents gâtés, enfants frustrés ? - Société - Discussions
Marsh Posté le 25-03-2006 à 16:42:52
Et vous qu'en pensez vous?
Marsh Posté le 25-03-2006 à 16:57:28
Bresse a écrit : Et vous qu'en pensez vous? |
Je trouve que c'est un excellent article qui, au delà de la crise actuelle, dresse un constat pragmatique du désequilibre entre les générations et qui recentre le débat, au delà des gesticulations anti CPE qui ne sont que l'écume du malaise qui bouillonne chez une génération qui a du mal a s'intégrer au monde du travail alors qu'une autre s'accroche à ses prérogatives. Je suis profondément opposé aux manifs anti CPE en tant que telles, et suis content qu'un journaliste ait donné une analyse plus pertinente que "on nous précarise".
Je crois que les jeunes qui manifestent sincèrement sont manipulés par une certaine gauche qui les utilise pour défendre ses privilèges.
Cet article dresse un constat très fin de ce que les jeunes trentenaires, dont je suis, ont à l'esprit.
J'en suis le premier peiné mais une époque de vaches grasses se referme, il va falloire affronter les vaches maigres et dans ce contexte, il vaut mieux avoir du piston et du pognon. Triste constat.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 17:01:52
Et ben voila!
Marsh Posté le 25-03-2006 à 17:31:07
buenosaires73 a écrit : ... |
tu ne te trouves pas insultant envers eux ? et un peu sur de toi ?
sposalizio a écrit : Pour faire court - ... |
hé bé quand tu vas faire long ça va faire quoi ?
sinon quel est le pourcentage de jeunes à avoir bac +4,5 ou plus ? ( je parle pas sur hfr )
juste pour situer ce " problème "
Marsh Posté le 25-03-2006 à 17:51:16
et oui
plus on avance plus on a l'impression de reculer ...
avant que j'entre au lycée, on nous disait: "sans bac, vous n'aurez rien"
je suis sortie à bac+3 des études et je n'ai rien eu
il a fallu que j'accepte un cdi avec un salaire de bac+2 pour trouver un emploi. J'ai fait valloir mon diplome à l'entretien mais vu qu'il ne cherchait que des bac+2 et que c'était la seule réponse positive depuis des mois, j'ai accepté
la génération de nos parents ont vraiment eu de la chance
ils leur suffisaient de réussir un concours et il obtenait un boulot stable !
même le niveau de vie a changé; le salaire est à peine suffisant pour payer un loyer exorbitant et toutes les factures; du coup très peu de loisirs et donc beaucoup de morosité
pour moi, le cpe n'augure rien de bon; certes il y en a qui joueront le jeu en formant des jeunes et en gardant de bons éléments, mais il y en a qui ne vont pas se gener à licencier à tout-va !
il n'y a qu'à voir comment certaines entreprises se servent des stagiaires !
Marsh Posté le 25-03-2006 à 17:53:51
sposalizio a écrit : Suis d'avis que l'auteur renomme le sujet. Ce serait sans doute plus clair et plus visible. Présenté ainsi on ne se rend pas bien compte du sujet réellement abordé avant de cliquer et de se plonger dans l'article. |
Pourquoi pas ? Je ne voulais pas tomber dans le débat pour / contre le CPE. Je suis preneur de toutes bonnes idées qui permette à ce débat de se développer intelligemment.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 17:59:21
buenosaires73 a écrit : Je trouve que c'est un excellent article qui, au delà de la crise actuelle, dresse un constat pragmatique du désequilibre entre les générations et qui recentre le débat, au delà des gesticulations anti CPE qui ne sont que l'écume du malaise qui bouillonne chez une génération qui a du mal a s'intégrer au monde du travail alors qu'une autre s'accroche à ses prérogatives. Je suis profondément opposé aux manifs anti CPE en tant que telles, et suis content qu'un journaliste ait donné une analyse plus pertinente que "on nous précarise". |
Je ne dirai rien de plus.
Sauf peut-être sur la fin et sur l'idée de "vaches maigres" qui rejoint le poncif de la crise économique éternelle.
A savoir que le problème est dans la redistribution des richesses, nullement dans le tarissement de ces dernières.
Par contre je plussoie doublement sur la manipulation de jeunes gens qui n'ont pas pigés que si on leur sert (à tort) des emplois précaires, c'est que ceux plus agés qui disent les soutenir s'octroient en réalité les richesses qui devraient être partagées.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 18:11:14
Très bon article en effet!
Mais là j'ai pas le tps d'en débattre.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 18:22:21
Il y a également bcp de jeunes qui pensent justement que ca sera trop facile... ca aussi il faut le souligner...
Edited.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 18:24:32
cedbest a écrit : Il y a également bcp de jeunes qui pensent justement que ca sera trop facile... ca aussi il faut le souligner... |
et ?
ça facilite quoi ?
Marsh Posté le 25-03-2006 à 18:30:26
Clair, ça n'a rien à voir, aucun rapport avec le sujet
Si nos parents n'avaient pas tout ça, ce n'est pas parce qu'on est priviligiés par rapport à eux, c'est parce que ça n'existait pas
(sauf pour le ciné)
Marsh Posté le 25-03-2006 à 18:33:40
Le seul reproche que je ferais à cet article c'est qu'on part du postulat suivant : "nos ainés ont vécu à une époque plus prospère que nous". Mais l'article ne donne pas beaucoup d'explications sur les raisons de cette constatation. Par exemple moi je pensais que notre époque serait plus prospère car le babyboom se transformant en papyboom les jeunes allions avoir beaucoup plus de boulot que nos parents. Ce n'est pas l'impression que cet article donne.
bouh94 a écrit : et oui |
Quelles sont les études qui sont reconnues à bac+3 ? Je croyais que c'était plutôt bac+2 et bac+5 les échelons.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 18:41:37
Excellent topic.
Très bon article en effet (j'aurai aimé en connaitre la source).
Cela rejoint quelque peu mon analyse personnelle sur le mouvement actuel anti-cpe. Je crois qu'aujourd'hui, la révolte de la jeunesse, surement instrumentalisée aussi par une gauche nullisime qui y voit l'occasion de damer le pion à la Droite, revêt une réalité bien profonde.
Les jeunes se sentent floués et qu'on les mène en bateau de puis longtemps. Ils savent que par le passé, les conditions socio-économiques n'étaient absolument pas les memes. Meme dans les pays à faible taux de chomage, connaissent le meme phénomène (dans une moindre mesure du fait que ce sont des pays qui ont fait beaucoup de réformes), à savoir baisse des revenus meme pour des cadres, haussse du cout de la vie, aggravation du climat sur le marché du travail...
A ce sujet, s'il est vrai que si on est diplomé, l'on trouve toujours une place de cadre, c'est bien plus dur de trouver un emploi et de le conserver.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 18:43:32
jimmythebrave a écrit : Excellent topic. |
Citation : Que pensez vous de cet article du Point |
Marsh Posté le 25-03-2006 à 18:46:47
kaloskagatos a écrit : Le seul reproche que je ferais à cet article c'est qu'on part du postulat suivant : "nos ainés ont vécu à une époque plus prospère que nous". Mais l'article ne donne pas beaucoup d'explications sur les raisons de cette constatation. Par exemple moi je pensais que notre époque serait plus prospère car le babyboom se transformant en papyboom les jeunes allions avoir beaucoup plus de boulot que nos parents. Ce n'est pas l'impression que cet article donne. |
plus prospère mais peut-être que nos parents et grand-parents n'ont pas bien gérer ça aussi, c'était les premières générations qui, pour la majorité en tous cas, ne vivaient plus de la terre, ils ont découverts voir inventé tout ça peut-être pas au top pour nous...
Marsh Posté le 25-03-2006 à 18:52:05
L'analyse est tres bonne et a propos de l'age moyen des partis c'est vrai que l'on peut se sentir invisible vis a vis du monde politique, je viens d'avoir 18 ans et les elections prochaines ne me font pas envies. Il n'y a personne dans ces partis de tout bords qui semblent prendre en compte ou réellement comprendre ce qui se passe (en tout cas ils ne propose pas d'alternative), résultat je me sens "seul" dans cette maison de retraite qu'est la politique francaise.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 19:08:33
zex a écrit : L'analyse est tres bonne et a propos de l'age moyen des partis c'est vrai que l'on peut se sentir invisible vis a vis du monde politique, je viens d'avoir 18 ans et les elections prochaines ne me font pas envies. Il n'y a personne dans ces partis de tout bords qui semblent prendre en compte ou réellement comprendre ce qui se passe (en tout cas ils ne propose pas d'alternative), résultat je me sens "seul" dans cette maison de retraite qu'est la politique francaise. |
Il suffit d'avoir discuté qq instants avec un jeune énarque pour savor que ça ne changera pas uniquement quand les politiques rajeuniront, il faudra également qu'ils se soient frottés à la réalité.
Personnelemnt, j'ai 32 ans, je suis ingénieur, je bosse dans une boîte de conseil/SSII. Mes parents agriculteurs m'ont poussé à faire des études et je me retrouve avec un rythme de vie de cinglé, une pression à tout casser et un pouvoir d'achat catastrophique (loyer exhorbitant, salaire plus ou moins bloqué)...J'aurais mieux fait de rester aux champs...à moins que la prochaine réforme de la PAC ne lamine mes derniers espoirs de retour à la terre.
Bref, il va bien falloire affronter la dure réalité et rentrer dans le jeu des chaises musicales de la vie salariée.
Même si mes parents se décidaient à puiser dans un hypothétique bas de laine pour m'aider, ça ne changerait rien au constat: je préférerais avoir des perspectives professionnelles que tendre la main.
Le décallage entre la manière dont la génération précédente a été portée par les événements et la grave lucidité avec laquelle nous devons les affronter est saisissante.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 19:50:10
l'article vient de "Le Point" de cette semaine.
La couverture avec Sarko qui fait la gueule. Ben alors Cécilia ? lol
Eeeeh merde j'ai pas vu qu'on l'avais déjà dit, et allez encore un modo au cul pour pas avoir lu les 40 posts précédents
Quand je vous entends je me dis que je suis vraiment dans la mouise pour pas dire dans la me***, malgré que ma mère et mon père soient des années bénie (43 et 53 ans) ils ont pas investis et les voilà locataire respectivement d'un 38 mètres carré à 4000 francs par mois (en résidence) et à 3800 pour un 68 mètres carré, bien sûr je n'ai aucun patrimoine (grand-mère vivant dans un appartement en Eure et Loire et mon autre grand mère qui va voir son héritage divisée en trois part avec celle de ma mère autant dire pas grand chose....).
Mon père est criblé de dette et bientôt au chômage et ma mère a bien 5000 euros sur son compte cela ne va pas lui permettre d'acheter un maison..... Et moi qui veut faire mon pauvre IUT informatique... Autant faire plombier.
Marsh Posté le 25-03-2006 à 20:00:16
Tu as gagné.
Marsh Posté le 26-03-2006 à 01:29:41
CHATMIX a écrit : mouarfff abusé cet article |
Quelle pertinence de l'analyse.
Bien, de mon point de vue, je suis assez d'accord.
Mon père est d'une génération encore antérieure (il a aujourd'hui 77 ans), mais bien profité d'une période de plein emploi, de diplomes de haut niveau, pour se hisser à des situations confortables.
Il a connu le chômage dans les années 80, mais a retrouvé des places à forte rémunération.
Ce genre d'équivalence, bon niveau d'études <=> bonne situation, n'existe plus. Il en prend un peu conscience. Il en prend également conscience car en tant que retraité, il n'a plus aucun pouvoir, et se contente de subir désormais. Subir les baisses continuelles de pouvoir d'achat du fait d'une stagnation des pensions en particulier. Ca l'amène à s'interroger sur certaines questions de ce genre.
Cette prise de conscience n'est pas faite par les soixantenaires, qui ne ne sont pas encore à la retraite.
Attendons de voir l'évolution, dans 10 ans, plus aucun d'entre eux ne sera dans le monde du travail.
Marsh Posté le 26-03-2006 à 10:34:14
buenosaires73 a écrit : |
jimmythebrave a écrit : |
Je trouve également que l'analyse de cette article est passionnante et j'y adhère tout a fait.
Mais j'avoue que j'ai du mal à comprendre en quoi elle vous amène à penser que les jeunes qui estiment que le CPE est une régression sociale pour la France sont manipulés
Peut être parce que vous êtes convaincu que le CPE permettra un grand bon en avant
Dans ce cas qu'elle catégorie de personne est vraiment manipulée, y'en à t il réellement une qui est manipulée et par qui
Mais mes interrogations me semblent HS par rapport à l'article qui, à mes yeux, ne dresse qu'un constat sur la situation actuelle et se garde de mettre en avant les méfaits ou les bienfaits d'une réforme sur les conditions de licenciement.
Marsh Posté le 26-03-2006 à 10:38:00
checool a écrit : Dans ce cas qu'elle catégorie de personne est vraiment manipulée, y'en à t il réellement une qui est manipulée et par qui |
Très bien dit. Ca m'énerve un peu quand les opinions sont soit tout blanc, soit tout noir, et qu'un des deux partis s'appropri "sa" vérité et l'affiche en grand, en disant que l'autre parti se fait manipuler
Dans ce cas là on pourrait très bien dire que ce sont les pro-CPE qui "se sont fait avoir" par la belle parole de l'UMP
Enfin bon, on ne va pas dire ça quand même, respectons la liberté de penser et de s'exprimer pour chacun
Marsh Posté le 26-03-2006 à 10:41:14
d'autant que à gauche tout le monde n'est pas contre et à droite tout le monde n'est pas pour
par contre où tout le monde est d'accord c'est qu'il y a un enjeux politique terrible derrière
Marsh Posté le 26-03-2006 à 11:02:43
Topic et article très intéressants !
Est-ce que selon vous, ce constat a une chance de s'améliorer dans les prochaines années avec le départ à la retraite massif des baby-boomers ? C'est probablement très simpliste comme vision, mais si leurs places se retrouvent vacantes, il devrait y avoir une grosse demande sur le marché de l'emploi, donc des conditions d'embauche et d'évolution par la suite en rapport avec cette demande. Reste à voir le poids des retraites dans tout ça
Marsh Posté le 26-03-2006 à 11:17:29
Encore faudrait-il que les postes soient systématiquement remplacés. Et ça, c'est loin d'être sur. Je pense que l'on surestime l'influence de ces départs en retraite. Cela va améliorer la situation mais sans plus AMHA.
Marsh Posté le 26-03-2006 à 11:24:29
Dans la mesure où ma génération est moins nombreuse que celle qui va mettre les voiles, le remplacement systématique n'est peut-être pas absolument nécessaire non plus, non ?
Marsh Posté le 26-03-2006 à 13:25:19
checool a écrit : Je trouve également que l'analyse de cette article est passionnante et j'y adhère tout a fait. |
Pour moi, le mouvement anti-cpe qui était au départ "pur" c'est à dire sans récupération politique, est de plus en plus soutenu par la gauche. N'oublions pas que l'UNEF est l'officine du PS.
Mais là n'est pas la question. Si au départ, les revendications étaient bien claires, je constate un glissement vers un sentiment de mal-etre général.
Les jeunes ont l'impression d'être une génération sacrifiée pour le confort des "vieux".
C'est pour ça quand le gros bataillon de baby boomers arrivera en retraite, dans les années à venir, les jeunes risquent de vouloir "se venger". Comme ne plus accepter de financer les retraites. En effet, a ce moment-là, il faudra donner encore plus vu que le rapport cotisant-retraité sera encore plus critique.
Marsh Posté le 26-03-2006 à 13:27:09
Syndrome jeunesse "tout tout de suite et maintenant ..."
Dire que nos parents n'ont pas trimé aussi dans leur jeunesse pour avoir un job etc ... quelle inéptie ...
Marsh Posté le 25-03-2006 à 16:28:18
Que pensez vous de cet article du Point ?
Les parents sont entrés facilement dans le monde du travail. Leurs enfants n'y parviennent pas. Crise, chômage et précarité professionnelle troublent leur sommeil. Enquête sur une génération qui se sent flouée et déclassée.
Violaine de Montclos
Elle a 24 ans, le bac, six ans d'études derrière elle. Elle est tout sauf une tire-au-flanc. Sous sa pancarte « Jeune en solde », elle bat le pavé parisien, jeudi 16 mars, contre l'avis d'un père inquiet. « Il n'aime pas me savoir ici. Mais à mon âge, lui qui n'a fait que deux ans d'études avait déjà un boulot, bien payé, et un appartement. »
« A mon âge »... Ces mots sont depuis quelques semaines sur les lèvres de tous les jeunes de ce pays. Opposants ou partisans du projet Villepin. Pro ou anti-blocage. Etudiants concernés par le contrat ou trentenaires sous-employés. Comment ne pas entendre, bien au-delà du bras de fer syndical et politique, l'expression exaspérée de cette nouvelle inégalité ? Une inégalité qui n'est plus seulement de classe ni de couleur de peau : une inégalité de génération. « A mon âge » : une génération entière se compare aujourd'hui à ses aînés et se sent flouée.
« Les parents des jeunes concernés par le CPE sont en fait les derniers sauvés du système », explique le sociologue Louis Chauvel. Au-dessus d'eux, toute une génération d'hommes et de femmes encore actifs ou à la retraite a sorti son épingle du jeu. Ils n'échappent pas, bien entendu, à la crise, au chômage, à la précarisation professionnelle. Mais ils sont entrés facilement dans le monde du travail, à des salaires immédiatement encourageants. Ils n'ont pas eu à faire des années d'études et des dizaines de stages non rémunérés pour y être légitimes. Et surtout, ils se sont hissés, en termes de niveau de vie, globalement beaucoup plus haut que leurs propres parents. Leurs enfants, eux, n'y parviennent pas et sont précipités sur la pente descendante.
Tous les chiffres, toutes les analyses prouvent cette inversion de la machine à la défaveur des plus jeunes de ce pays. Pourtant, cette nouvelle inégalité est longtemps restée invisible, comme si leurs difficultés étaient le propre de leur âge, alors qu'elles sont l'apanage d'une époque. « Nous nous heurtons souvent à une sorte de déni », explique Cathy, l'une des fondatrices du collectif Génération précaire, qui rassemble des stagiaires en colère âgés de 20 à... 35 ans. « Parents, supérieurs hiérarchiques pensent que nous fantasmons sur un âge d'or qui n'aurait jamais existé, ils essaient de nous faire croire qu'ils ont connu les mêmes difficultés : "Pour nous aussi, ç'a été dur, nous aussi, qu'est-ce que vous croyez, on en a bavé." »
Faux. Trois chiffres, parmi tant d'autres, le démontrent aisément. En 1972, le taux de chômage à la sortie des études était de 4 %. Il oscille aujourd'hui entre 20 et 30 %. En 1977, un quinquagénaire gagnait 15 % de plus qu'un trentenaire. Aujourd'hui, l'écart de salaire entre ces deux tranches d'âge est de 40 %. A la fin des années 60, enfin, on devenait instituteur avec le bac en poche. Aujourd'hui, le diplôme demande cinq années d'études supérieures. Oui, l'âge d'or a existé. Et il est bel et bien fini. « C'est la première fois qu'en temps de paix une génération se sait moins bien traitée que la précédente, martèle Louis Chauvel. Cela crée un climat étrange, inédit, entre ces deux générations qui vivent ensemble. »
Frustration. Incompréhension. Raphaël, 30 ans, n'a pas de mots assez durs pour qualifier ceux qui lui servent de supérieurs hiérarchiques dans l'entreprise où lui qui est père de trois enfants est encore considéré comme un « jeune » devant faire ses preuves. « J'ai fait bien plus d'études que la plupart d'entre eux. Nombreux sont ceux qui sont d'ailleurs entrés dans cette boîte sans diplômes. Pourtant, à quelques années de la retraite, ils ont des salaires que je n'atteindrai jamais, étant donné le niveau auquel j'ai été embauché et le peu d'augmentation dont j'ai déjà bénéficié. Il existe un écart monstrueux et totalement injustifié entre nous. Ils savent que c'est ma génération qui va devoir se saigner pour leur offrir une confortable retraite, et ils n'en ont aucun complexe. Et je les entends, à la machine à café, se plaindre de leurs enfants qui sont, selon eux, incapables de trouver du boulot ! » Franck, 26 ans, raconte ces repas de famille où des papy-boomers à la mémoire courte narrent à une jeune classe enragée leurs débuts triomphants dans la vie active. « Le message est clair : ils y sont arrivés, très jeunes, et à la force du poignet, alors que nous, les branleurs, les éternels étudiants, leur demandons encore de l'argent de poche. Ils oublient de préciser qu'à l'époque toutes les portes leur étaient ouvertes, tandis qu'aujourd'hui personne n'a besoin de nous. »
L'universitaire canadien Timothy B. Smith - auteur de « La France injuste » (Autrement) - pose un regard sévère, pour ne pas dire horrifié, sur la façon dont l'Hexagone a, selon lui, sacrifié sa jeunesse. Contrairement à nombre de ses voisins européens, à démographie et croissance semblables, les responsables français auraient choisi depuis un quart de siècle d'arbitrer en défaveur des jeunes. « La France est beaucoup plus riche qu'il y a trente-cinq ans. Mais cette richesse n'est pas partagée avec les jeunes. La prospérité a bénéficié à ceux qui ont 50, 60 ans aujourd'hui, alors que les jeunes se sont appauvris. La classe politique française a fait peser tous les sacrifices sur leurs épaules. »
Déclassement. Signe visible et mesurable de cette injustice générationnelle : le déclassement. Les enfants de cadres sont les premières victimes de cette histoire économique qui s'est mise sur la marche arrière. Alors que leurs parents avaient fait un bond en avant, eux dévissent, littéralement. Depuis vingt ans, ils sont de moins en moins nombreux à atteindre le statut de cadre de leur père, et, s'ils y parviennent, c'est en moyenne pour une rémunération nettement plus faible. Les parents, s'ils étaient dans le déni, réalisent un jour ou l'autre avec stupeur que leurs enfants n'ont plus accès aux mêmes quartiers, au même nombre de mètres carrés habitables, aux mêmes écoles pour leurs propres enfants.
Marie, 29 ans, décrit avec agacement l'air consterné de sa mère visitant l'appartement qu'elle et son compagnon viennent d'acquérir. Dix ans d'études à eux deux, deux salaires, un endettement sur trente ans, pour un espace dérisoire et loin, si loin du centre-ville. « Ça me fait tout drôle de te voir là-dedans, m'a-t-elle dit. Sans doute a-t-elle enfin réalisé que les temps avaient changé. » Jacques, 28 ans, regrette d'avoir appris à ses parents qu'il venait de remplir une demande de logement social. « Pour moi, ça n'a rien d'extraordinaire, mais pour eux, qui avaient réussi au point de pouvoir offrir à leurs enfants de longues études supérieures, ç'a été un choc de comprendre que je rentrais dans ces plafonds. Ils ont du même coup réalisé que mon petit frère de 25 ans ne mettait pas de mauvaise volonté à trouver du travail, et que ma soeur, la seule de nous trois à avoir obtenu un CDI, était en fait sous-employée. Ils ont ouvert les yeux. »
Drôle de secousse, pour une société fondée sur le progrès économique et social, que ce constat de recul. Il est loin, bien loin le temps où les enfants adoucissaient la fin de vie de leurs parents grâce à des revenus supérieurs aux leurs. En ces temps où la jeunesse est mal venue et mal payée sur le marché du travail, en ces temps où, pour la première fois de l'Histoire, le niveau de vie est plus élevé à ne rien faire de 60 à 65 ans qu'à travailler à temps plein de 30 à 35 ans, la solidarité intergénérationnelle joue dans l'autre sens. A 25 ans, on s'éternise, faute de pouvoir prendre son envol, sous le toit parental. A 35 ans, on loue à bas prix un appartement à ses parents qui, au même âge, en étaient déjà propriétaires. « Finalement, à niveau d'études égal, ce sont les jeunes dont les parents ont un gros patrimoine, ce sont les fils et les filles de ceux qui ont des pistons, des contacts, qui finissent par s'en sortir », regrette Louis Chauvel. Tout le système méritocratique est foulé au pied.
Ceux qui ont accepté les règles du jeu, qui ont mené sous la pression du chômage ambiant des études dont on leur disait qu'elles leur garantissaient un avenir, ceux qui, à l'ombre des papy-boomers, se sont laissé renvoyer l'image d'une génération docile et pantouflarde s'aperçoivent aujourd'hui qu'ils sont les grands perdants du système, et sans doute pour longtemps. Qui, au sein de la classe politique, n'a pas perçu cette amertume, qui n'a pas compris que, bien au-delà du débat sur le CPE, toute une tranche d'âge de ce pays, globalement plus diplômée et plus pauvre que ses aînés, parle aujourd'hui de quelque chose qui ressemble à son honneur perdu, n'a rien saisi des récents événements. Il est vrai que l'âge moyen, en politique, est aujourd'hui de 57 ans